La contamination au bacille du charbon avait atteint, entre le 1er et le 17 octobre, au moins 42 personnes, toutes résidant aux Etats-Unis. Mais en l'espace de deux semaines, le nombre des incidents relatifs à des contaminations éventuelles, s'est envolé, atteignant, selon le FBI, le chiffre de 2 300, toujours pour les seuls Etats-Unis. Dans « l'écrasante majorité des cas », il s'agissait de fausses alertes, a assuré le directeur de l'agence fédérale, Robert Mueller.
Cependant, la situation s'est aggravée aux Etats-Unis : 29 personnes ont dû être hospitalisées à Washington, après qu'on a découvert que le système de ventilation du Capitole, siège du Congrès, avait été contaminé par le bacille de charbon.
En France, Bernard Kouchner a signalé que 38 alertes ont été enregistrées en 48 heures dans 17 départements. Son collègue de l'Intérieur, Daniel Vaillant, a estimé qu'il n'y avait « pas de problèmes réels » dans notre pays concernant le charbon, l'objectif du gouvernement étant, a-t-il martelé, « la précaution, la précaution, la précaution ».
Pour autant, la veille épidémiologique française, selon la formule du Pr Jacques Drucker, directeur général de l'Institut de veille sanitaire (InVS), a été placée en « hyper-alerte » (« le Quotidien » d'hier). Le site Internet de l'InVS* a mis en ligne la dernière fiche de maladie à notification obligatoire, celle du charbon. Elle distingue les cas certains (cas de charbon quelle que soit la forme clinique après l'isolement de Bacillus anthracis à partir d'un échantillon clinique) des cas probables (sans confirmation microbiologique), les cas de charbon cutané et les autres formes cliniques (méningée, septicémique, digestive, pulmonaire ou rhinopharyngée).
Conduite à tenir en situation d'urgence
Dans le même temps, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a publié les fiches de prise en charge thérapeutiques destinées aux médecins**. Ces fiches, dont le ministre délégué à la Santé avait annoncé la diffusion lors de sa conférence de presse du 5 octobre sur le plan Biotox, indiquent la « conduite à tenir en situation d'urgence » en cas d' « alerte infectieuse identifiée » liée à d'éventuels agents pathogènes comme ceux de la variole, de la peste et, bien entendu, du charbon. Dans ce dernier cas, la fiche mentionne la ciprofloxacine comme antibiotique utilisé en traitement prophylactique des personnes exposées au charbon.
La France dispose de doses en nombre suffisant pour traiter 11 000 personnes et 50 000 dans leur entourage, a précisé Bernard Kouchner.
Deux autres antibiotiques, également par voie orale, peuvent être administré en prophylaxie à l'adulte, en première intention : l'ofloxacine ou la lévofloxacine. « Nous travaillons en concertation étroite avec les pouvoirs publics pour augmenter nos stocks d'antibiotiques en fonction des directives », a précisé au « Quotidien du Pharmacien » Colette Taillardat, pharmacien responsable chez Bayer France. Le journal fait état d'un courrier adressé fin septembre par l'AFSSAPS à tous les grossistes-répartiteurs pour leur demander de « veiller tout particulièrement au respect des dispositions de l'article R.5115 du code de Santé publique et notamment (...) d'être en mesure de satisfaire à tout moment la consommation durant au moins deux semaines ». Les stocks, du coup, auraient été augmentés « de façon sensible » pour garantir de deux à quatre semaines d'approvisionnement.
Dernier élément du dispositif mis en place en France, le numéro vert (0800.240.250) qui permet aux médecins de dialoguer avec quatre professionnels de santé a reçu plusieurs dizaines d'appels pour sa première journée de fonctionnement.
La Fédération française des médecins généralistes MG-France), tout en exprimant « sa satisfaction » à son propos, juge « regrettable » qu'il ait fallu attendre près de deux semaines après la décision du plan de sécurité Biotox pour qu'il soit opérationnel, un délai qualifié d' « injustifié » par MG-France.
Aux Etats-Unis, pendant ce temps, la filiale du groupe chimique allemand Bayer a annoncé qu'elle allait fournir 200 millions de comprimés de son médicament Ciprobay (à base de ciprofloxacine) au marché américain. Un volume qui représente le triplement des livraisons habituelles. Pour l'atteindre, Bayer a décidé de produire son médicament sept jours sur sept et 24 heures sur 24, dans deux de ses usines. Les comprimés de 500 mg sont vendus au prix unitaire de 1,83 dollar, soit le prix qui était pratiqué avant les attentats du 11 septembre, a souligné la vice-présidente du groupe, Karen Dawes.
De son côté, le secrétaire de la Santé Tommy Thompson a annoncé l'intention du gouvernement américain de stocker des antibiotiques pour être en mesure de traiter 12 millions de personnes pendant une durée de trois mois.
* www.invs.sante.fr.
** www.afssaps.sante.fr
Pour en savoir plus
Un dossier sur les aspects médicaux et réglementaires du plan Biotox
htt://www.quotimed.com
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