LA MORTALITÉ cardio-vasculaire a fortement diminué au cours de ces 25 dernières années, grâce à l'amélioration de la prise en charge des maladies cardiaques et à la lutte contre les principaux facteurs de risque. Mais des progrès importants sont encore à faire dans certains domaines, comme celui de la prise en charge de la mort subite de l'adulte. Si l'on manque de données précises, on peut situer entre 40 000 et 60 000 le nombre de morts subites d'origine cardiaque enregistrées chaque année en France, soit dix fois plus que de victimes d'accidents de la route. La France a pris beaucoup de retard par rapport à d'autres pays européens ou aux Etats-Unis en terme de prise en charge préhospitalière immédiate de ces arrêts cardiaques. Le taux de survie est actuellement très faible, de l'ordre de 2 à 3 %, alors qu'il peut atteindre 30 % dans certains pays.
Dépister les antécédents familiaux.
La mort subite de l'adulte est d'origine coronaire dans 80 % des cas après 35-40 ans. Chez les patients plus jeunes, et notamment les jeunes sportifs, les causes génétiques sont prédominantes. Il peut s'agir de pathologies cardiaques avec atteinte visible du coeur : cardiomyopathie hypertrophique (la plus fréquente), cardiomyopathie dilatée, dysplasie ventriculaire droite arythmogène ou de rares anomalies électriques sur coeur apparemment sain, comme le syndrome de Brugada. Seulement 10 % des patients atteints de ces pathologies sont à risque de mort subite. Il existe des facteurs de risque qu'il faut savoir rechercher : antécédents familiaux de mort subite, antécédents personnels de syncopes inexpliquées à l'effort, de palpitations accompagnées de malaises. Mais, la plupart du temps, l'arrêt cardiaque survient à l'effort chez un sujet asymptomatique. L'examen médical et l'interrogatoire de tout patient pratiquant une activité sportive intense doivent permettre de dépister les sujets à risque et de conduire à la réalisation d'une échographie avec avis cardiologique si nécessaire.
Des facteurs de risque rythmique spécifiques.
Une étude prospective parisienne, menée depuis 1967, a permis de suivre plus de 7 000 hommes sur 25 années et d'identifier des facteurs de risque. A côté des facteurs de risque classiques de maladie coronarienne, il existe des facteurs de risque rythmique, plus spécifiques de la mort subite. Comme vu précédemment, le risque familial est important. Dans cette étude, on a enregistré deux fois plus de morts subites dans le groupe des sujets dont un parent avait fait un arrêt cardiaque, et neuf fois plus parmi ceux dont les deux parents étaient décédés subitement. Mais, au terme de cette étude, d'autres facteurs sont également apparus liés au risque de mort subite. Un taux élevé d'acides gras circulants, mesuré chez les sujets à l'entrée dans l'étude, s'est révélé corrélé au risque de survenue d'une mort subite, mais non au risque d'infarctus du myocarde. L'obésité abdominale semble également liée au taux de mort subite, et, ce indépendamment de l'indice de masse corporelle, car, même chez les patients ayant un IMC inférieur à 25 kg/m2, le risque était multiplié par trois en cas d'obésité abdominale. Enfin, le risque de décès par mort subite augmente progressivement avec la fréquence cardiaque de repos, mais, plus spécifiquement encore, en cas d'élévation modérée de la fréquence cardiaque à l'effort, lorsque la différence entre fréquence à l'effort et fréquence au repos est basse.
Tout se joue dans les premières minutes.
La connaissance plus approfondie de ces facteurs de risque spécifiques permettra dans le futur d'identifier précocement les sujets à risque et de proposer des mesures de prévention primaire. Mais, actuellement, réduire le nombre de décès par mort subite passe avant tout par une amélioration de la prise en charge préhospitalière. Le délai de prise en charge est le principal facteur pronostique de survie et de séquelles neurologiques. Tout se joue dans les premières minutes suivant l'arrêt cardiaque. Cette prise en charge dépend de chaque citoyen. Tout témoin d'un arrêt cardiaque, dans un lieu public ou dans le cadre de la structure familiale, devrait connaître les gestes indispensables à réaliser : prévenir immédiatement les secours, commencer un massage cardiaque et utiliser un défibrillateur automatisé externe s'il y en a un à proximité. Or, aujourd'hui en France, moins de 20 % des témoins d'une mort subite réalisent un massage cardiaque. Un sondage de TNS Healthcare pour la Fédération française de cardiologie révèle que seulement 1 % des personnes interrogées savent que la défibrillation fait partie des gestes à accomplir et peut être accomplie par toute personne formée. Depuis le décret du 4 mai 2007, le grand public est en effet autorisé à utiliser un défibrillateur automatisé externe avant l'arrivée du SAMU ou des pompiers. La France connaît un retard important en terme d'équipement de ses lieux publics en défibrillateurs, mais les collectivités locales, les grandes entreprises et les centres commerciaux en font peu à peu l'acquisition.
D'après la conférence de presse « Comment prévenir la mort subite ? », avec la participation des Prs Etienne Aliot, Jacques Beaune, Nicolas Danchin, Albert Hagège, Xavier Jouven et Christian Spaulding.
Une campagne grand public
Un important travail d'information du grand public va être réalisé en 2008 par la Fédération française de cardiologie, avec la campagne annuelle « Arrêt cardiaque : 1 vie = 3 gestes », organisée conjointement avec la Société française de cardiologie et en partenariat avec de nombreux acteurs éminents de l'urgence médicale et du secourisme. Le coup d'envoi de la campagne aura lieu le 19 janvier, lors d'une conférence publique gratuite sur l'arrêt cardiaque, en marge des 18es Journées européennes de la Société française de cardiologie, au palais des Congrès, à Paris. Site Internet (www.1vie3gestes.com), film pédagogique, diffusion de brochures, campagne média, événements en régions, notamment dans le cadre de la Semaine du coeur (22-29 septembre), rythmeront l'ensemble de l'année. Cette campagne a un double objectif : inciter le grand public à se former aux gestes de premiers secours et encourager l'équipement en défibrillateurs des lieux publics et des entreprises.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature