L’épidémie actuelle diabète de type 2 est en partie expliquée par le mode de vie sédentaire et l’alimentation de type occidentalisé, mais aussi par des altérations épigénétiques provoquées par des facteurs environnementaux au cours de la vie fœtale. Le rôle délétère de divers polluants, comme l’Acide téréphtalique (TPA), les Polybromodiphényléthers (PBDE, largement utilisés dans les jouets pour leur effet retardateur de flamme), la dioxine ou l’arsenic (qui agit directement sur les cellules bêtapancréatiques) chez la femme enceinte comme chez le fœtus dès la conception, a été établi. Ces polluants modifient la programmation fœtale in utero, et l’altération de l’expression des gènes se maintient ensuite dans le temps. À terme, les enfants devenus adultes mais aussi les générations suivantes peuvent développer des maladies métaboliques comme l’obésité et le diabète.
Il a ainsi été montré que le bisphénol A, retrouvé dans 93 % des cordons ombilicaux analysés en Europe, est responsable à terme d’obésité, de diabète de type 2, d’hypertension artérielle et de puberté précoce. La dioxine est quant à elle responsable de maladies auto-immunes, dont le diabète de type 1. La grossesse est un moment où la femme est plus sensible à ces polluants ; elle peut développer à terme ce type de maladies.
À côté du rôle des polluants, celui de l’environnement métabolique du fœtus est aussi très étudié. L’obésité chez les femmes enceintes est délétère à court terme pour le fœtus, mais aussi à plus long terme chez les enfants. Les anomalies de la nutrition du fœtus sont en effet responsables d’altérations épigénétiques, qui passent par différentes voies dont la plus étudiée est la méthylation de l’ADN. Lorsque le gène est méthylé, son expression est altérée et par là même la protéine pour laquelle il code. Par exemple, des travaux expérimentaux menés sur un modèle de rates soumises à un régime hypercalorique ont mis en évidence chez le fœtus des anomalies au niveau cérébral dans le noyau arqué thalamique (1). Le noyau arqué possède deux populations de neurones ayant des effets inverses sur l’appétit, et la surnutrition maternelle, comme d’ailleurs la sous-nutrition, entraîne une augmentation du nombre de neurones de l’appétit. Ceci se traduit après la naissance par une hyperphagie, elle-même responsable d’une obésité à l’adolescence puis plus tardivement d’une hyperglycémie et de diabète. Une cascade d’événements comparable est observée chez l’humain.
À la lumière de ces différentes données, la lutte contre l’obésité et le diabète chez les adultes doit donc être débutée avant la naissance, et sans doute avant même la conception. Les recherches évaluent désormais des stratégies interventionnelles pour promouvoir activité physique et équilibre alimentaire chez les femmes obèses avant la grossesse. Ceci est d’autant plus important que des travaux récents (2) ont montré que l’obésité maternelle est à l’origine d’un surrisque de mortalité de 35 % chez leurs descendants à l’âge adulte (34 à 61 ans), principalement de cause cardiovasculaire.
D’après les sessions : Making an Impact in Gestational Diabetes ; Diabetes in Pregnancy the Metabolic Environement in Mother and Child ; Longer-term Consequences of Gestational Diabetes on Offsprings.
(1) Ross MG et al. Ann Nutr Metab 2014;64(suppl 1):36-44
(2) Reynolds RM et al. BMJ 2013;347:f4539
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