Entre les blouses blanches et les robes noires, l’urgence n’a pas le même sens. En témoigne l’avis du Conseil d’État qui a différé toute prise de décision avant l’été dans l’affaire Vincent Lambert. Mais au-delà de la famille Lambert qui se déchire et attend un verdict et des multiples procédures, il était peut-être urgent d’attendre. La réflexion menée par le Conseil d’État ne concerne pas seulement ce cas douloureux relayé par les médias, mais plus de 1 500 personnes en état dit végétatif chronique ou pauci-relationnel. Une fois rendu, l’arrêt aura valeur de jurisprudence et sera sans nul doute respecté dans les services de réanimation et de soins palliatifs de l’Hexagone. Dans cette perspective, l’absence de décision n’est peut-être pas un aveu d’impuissance. Elle contraint à dissiper les zones d’ombre, les non-dits qui permettent à chacun d’entre nous de défendre des attitudes contradictoires. Que signifie le mot déraisonnable par exemple ? La poursuite d’une alimentation artificielle revêt-elle un caractère déraisonnable, critère retenu par la loi Leonetti pour justifier l’arrêt d’un traitement ? Le dictionnaire dans cette affaire ne se révèle pas d’une grande aide. Déraisonnable est défini par Le Robert par « qui n'est pas raisonnable ». Nous voilà guère avancés. Jean Leonetti sollicité par le Conseil d’État au même titre que l’Académie nationale de médecine, l’Ordre national des médecins et le Comité consultatif national d’éthique devra préciser comment un simple adjectif décide du sort d’une vie. Même lorsqu’il s’agit d’une vie entre deux, de cette vie entre état conscient et état végétatif, où semblait-il nul ne sait ce que Vincent Lambert éprouve, ressent, désire. Dans un remarquable décryptage de la décision du Conseil d’État, Denys de Béchillon dans le Huffington Post souligne comment « il est, en pratique, épouvantablement hasardeux d’interpréter les signes potentiellement révélateurs de ce qui reste à l’intéressé de conscience et de volonté ; les expertises dont Vincent Lambert a fait l’objet sont pour partie anciennes et contradictoires. Bref, le brouillard est à peu près total ». Et si le passage par le Conseil d’État permettait pour une fois à la justice et à la médecine de parler d’une seule voix ? Comme si dans cette affaire hors norme, la justice avait décidé d’être d’exception...
Le fait du mois
Affaire Lambert, une justice d’exception
Publié le 28/02/2014
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Gilles Noussenbaum
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Source : legeneraliste.fr: 295
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