Classique
La chanteuse allemande Martha Mödl, célèbre interprète des opéras wagnériens, est décédée en décembre dernier à Stuttgart, à trois mois de l'anniversaire de ses 90 ans.
Voix phénoménale, inclassable car de tessiture immense mais définitivement dramatique, tragédienne, elle avait encore interprété, à Mannheim, au début de l'année, la comtesse dans « la Dame de pique » de Tchaïkovski, et il y a six mois, la nourrice dans « Boris Godounov », à Berlin. Peu avant son 85e anniversaire, celle qui a été la vedette incontestée du temple wagnérien de Bayreuth pendant les années cinquante et soixante, avait souligné que seule la mort la ferait s'arrêter. « Je ne déteste rien de plus que de voir des cantatrices âgées faire leurs adieux à la scène. Moi, je disparaîtrai tout simplement un jour. Amen. »
Née le 22 mars 1912 à Nuremberg, Martha Mödl n'a toutefois commencé à chanter sur scène qu'à 28 ans. Celle qui a été l'une des interprètes préférées du chef d'orchestre Wilhelm Furtwängler ( « sa voix est comme issue d'une boîte magique », aimait-il à dire) a débuté en 1942, en pleine guerre, dans l'opéra d'Engelbert Humperdinck, « Hänsel und Gretel ». Très vite elle évolua vers les rôles de soprano dramatique. Sa carrière s'accéléra en 1951 quand elle campa dans « Parsifal » une bouleversante Kundry pour la réouverture du Festival de Bayreuth, après la Seconde Guerre mondiale. Isolde dramatique et sensible dans « Tristan et Isolde », au Metropolitan Opera de New York, éblouissante Brünnhilde du « Crépuscule des Dieux » à Bayreuth (son rôle préféré), dont elle a réalisé, en 1953, un enregistrement de référence sous la baguette de Furtwängler, Léonore palpitante et blessée dans « Fidelio » de Beethoven, Martha Mödl a fait admirer dans le monde entier sa voix sombre, presque rauque, sensuelle, et son jeu d'une grande force émotionnelle. On l'a souvent surnommée « la Callas allemande » et comparée sur scène à un fauve.
Artiste avant tout, elle a été loin de dédaigner des compositeurs plus modernes comme Richard Strauss (elle fut sur le tard une ahurissante Clytemnestre dans « Elektra »), Kurt Weill (Leocadia Begbick, la mère maquerelle du bordel de « Mahagonny »), Peter Eötvös (la servante pour la création allemande des « Trois Surs ») ou Aribert Reimann (la momie de « la Sonate des Spectres »). Avec elle disparaît l'un des derniers monstres sacrés du chant wagnérien.
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