LE PALUDISME d'importation à Plasmodium falciparum représente, en France, près de 5 000 cas par an et est responsable d'une vingtaine de décès. Le pronostic dépend en grande partie de la rapidité d'établissement du diagnostic et de la prise en charge.
Dans les actions visant à réduire le délai de diagnostic, l'information du voyageur est prépondérante. Dans ce contexte, il est important de prendre en considération certaines modifications des aspects socio-épidémiologiques du paludisme d'importation. En effet, entre 1998 et 2004, il y a eu une augmentation importante de patients originaires de pays d'endémie. La proportion de migrants dans les cas de paludisme d'importation est passée de 54 à 70 %. Cela implique la nécessité d'un recentrage de l'information délivrée aux voyageurs en direction de cette population. Les modalités de diffusion doivent être diverses (associations, voyagistes, médias, médecins, pharmaciens...), et les messages à faire passer sont simples : importance de la prévention et informations sur les symptômes d'alerte nécessitant un avis médical urgent. Le diagnostic de paludisme doit être évoqué devant toute fièvre, isolée ou non, chez un voyageur au retour d'un pays d'endémie.
La confirmation du diagnostic reste, en 2007, fondée en première intention sur les tests microscopiques : frottis sanguin et goutte épaisse. Les tests de diagnostic rapide (HRP-2 + pLDH), de plus en plus employés par les laboratoires, peuvent être utilisés en complément, en cas de doute diagnostique dans un contexte clinique évocateur, mais ne doivent pas se substituer aux tests microscopiques. Le diagnostic se heurte à deux difficultés. La parasitémie est parfois faible et les cas sont rares.
La prise en charge optimale des cas de paludisme nécessite une orientation des patients au cas par cas, vers la structure de soins la mieux adaptée, en fonction de la gravité des symptômes.
Cependant, la pertinence des critères de gravité établis par l'OMS (révisés en 2000) restait controversée. C'est pourquoi un travail important a été fait dans le cadre de ces recommandations, afin d'établir des critères de gravité du paludisme d'importation chez l'adulte, plus particulièrement adaptés à la prise en charge dans un contexte de soins européens, avec une évaluation de la fréquence et de la valeur pronostique de chaque critère. Ces critères vont permettre d'orienter au mieux le patient, soit en service de réanimation, soit en postréanimation, soit, encore, en fonction de l'expérience des médecins en charge du patient, en service de médecine. En ce qui concerne le cas des hyperparasitémies isolées, des valeurs seuils sont proposées pour adapter au mieux le niveau de prise en charge.
De même, la possibilité de traiter un patient adulte en ambulatoire dépend de nombreux facteurs. Il s'agit de critères diagnostiques, clinico-biologiques et sociaux incluant la bonne compréhension du traitement, la nécessité d'une observance parfaite et la mise à disposition rapide des médicaments. En ce sens, certains centres de prise en charge du paludisme ont pris l'initiative, dans les situations socio-économiques difficiles, de débuter le traitement au sein de leur structure et de fournir l'ensemble du traitement au patient, avant son retour à domicile. De plus, il est nécessaire d'insister sur l'importance du suivi clinique et biologique à J3, J7 et J28.
Chez l'enfant, la prise en charge est toujours hospitalière. La prudence incite donc à prendre en charge en réanimation tout enfant présentant un des critères cliniques de gravité définis par l'OMS.
Les molécules les plus récentes en première ligne.
Les recommandations pour le traitement des formes simples de paludisme prennent en compte la mise à disposition de nouvelles molécules. En première ligne sont conseillées l'atovaquone-proguanil (Malarone) ou l'artéméther-luméfantrine (Riamet, traitement réservé aux collectivités). La quinine et la méfloquine (Lariam) sont des médicaments de deuxième ligne. Enfin, l'halofantrine (Halfan) ne doit être utilisée que dans des situations très particulières, sous surveillance médicale hospitalière du fait de sa cardiotoxicité. Chez l'enfant, les traitements de première ligne sont, au choix, méfloquine, atovaquone-proguanil ou artéméther-luméfantrine (les deux derniers ont l'AMM à partir de 5 kg de poids). L'halofantrine est réservée à la deuxième ligne et doit être utilisée avec une grande prudence.
Le traitement du paludisme grave reste fondé, chez l'adulte, sur la quinine intraveineuse en réanimation avec dose de charge. Chez l'enfant, une dose de charge n'est pas recommandée, du fait du risque de toxicité accru.
D'après un entretien avec le Pr Thierry Debord, infectiologue à l'hôpital d'instruction des armées Begin, Saint-Mandé.
* Société de pathologie infectieuse de langue française, www.infectiologie.com.
Lutte antivectorielle et chimioprophylaxie
Deuxième volet indispensable de la prise en charge du paludisme, la prophylaxie repose sur deux éléments clés : la lutte antivectorielle individuelle associée à la chimioprophylaxie.
La prophylaxie antivectorielle comprend l'utilisation de moustiquaires imprégnées, la protection vestimentaire et les répulsifs cutanés. Les recommandations pour le type de répulsifs à utiliser sont celles de l'AFFSAPS, publiées dans le « BEH » n° 24 de juin 2007. Pour les enfants de moins de 30 mois, les avis sont divergents. Le Haut Conseil de la santé publique autorise l'utilisation du DEET à partir de l'âge de 2 mois, à une concentration inférieure à 30 % et à condition de respecter les contre-indications. En revanche, le groupe de pédiatrie tropicale de la Société française de pédiatrie préconise une abstention de l'utilisation de tout répulsif en dessous de 6 mois. Entre 6 et 30 mois, pourront être employés : le DEET à une concentration comprise entre 10 et 30 %, le citriodiol, entre 20 et 30 %, et l'IR3535, à 20 % à partir de 12 mois. Ces réserves sont la conséquence de la difficulté d'appréciation des effets secondaires et de la toxicité neurologique, notamment du DEET.
En ce qui concerne la chimioprophylaxie, les recommandations sont mises à jour annuellement dans le « BEH ». Enfin, les indications du traitement de réserve doivent être limitées aux situations d'isolement (lorsque le voyageur se trouve à plus de douze heures d'une structure de soins) ou lorsque la chimioprophylaxie est impossible du fait de séjours répétés, rapprochés, ou d'expatriation prolongée. Les molécules utilisées sont soit l'atovaquone-proguanil, soit l'artéméther-luméfantrine. Les voyageurs doivent être sensibilisés, d'une part, sur les risques de contrefaçon de médicaments dans les pays d'endémie et, d'autre part, sur la limite des tests de diagnostic rapide qui ne sont pas recommandés pour l'autodiagnostic chez le voyageur.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature