La Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a condamné un obstétricien à verser 197 100 euros par an à un adolescent lourdement handicapé depuis sa naissance. À cette rente s’ajoutent 2 millions d’euros à verser, ainsi qu’une seconde rente annuelle de 7 300 euros à destination des parents de l’adolescent.
L’accoucheur devra-t-il payer sur ses deniers propres, ou son assureur prendra-t-il en charge la totalité de l’indemnisation ? Tout dépend du plafond de garantie dont bénéficie le praticien (la loi fixe un minimum de 3 millions d’euros). Tout dépend aussi de la durée de vie du jeune handicapé.
L’accident est survenu le 29 juillet 2000 dans une clinique de Cagnes-sur-Mer, dans les Alpes-Maritimes. L’accouchement, très difficile, s’était terminé par une césarienne. La décision de « césariser » a-t-elle été trop tardive ? Est-ce la cause de l’asphyxie de l’enfant, à l’origine de son handicap ? Les expertises et les jugements se sont empilés ces dernières années, sans parvenir à une conclusion concordante. Hier, la Cour d’Appel a tranché. Le médecin a été jugé responsable du handicap. L’arrêt « liquide définitivement le préjudice », selon le jargon judiciaire.
L’obstétrique responsable des sinistres les plus coûteux
L’obstétrique, spécialité à risque, entraîne moins de sinistres que la chirurgie. Mais quand un accident survient, le coût du préjudice est souvent très élevé, car la victime – l’enfant – a une vie entière à vivre. « Nous avons enregistré des condamnations ou des prévisions de condamnations de cette nature, réagit un assureur. Ces sommes sont considérables mais conformes aux évaluations en cas de pareille catastrophe. Elles risquent à l’avenir d’être significativement encore plus importantes si le projet de décret élaboré par la Chancellerie sur la nomenclature des dommages corporels était adopté en l’état. »
En obstétrique, le risque est dit "long" car une réclamation peut intervenir plusieurs années après l’acte médical, et le règlement du dossier peut se dérouler sur plusieurs années.
Pour le SYNGOF, il faut revoir la réglementation en place
Le Dr Jean Marty, président du SYNGOF (Syndicat national des gynéco-obstétriciens de France), livre ce commentaire : « Selon mes informations, il s’agit d’un cas typique d’un enfant malformé avant la naissance, et qui a eu une naissance difficile. L’enfant s’est dégradé dans un deuxième temps, son handicap ne serait pas lié aux conditions de l’accouchement. Le médecin a eu la maladresse de corriger le dossier médical, ce qui n’a pas plaidé en sa faveur. Je crains que le total des indemnités à verser dépasse un jour son plafond de garantie. Pour éviter que des médecins soient conduits à la ruine personnelle, nous demandons que le fonds [mis en place par Xavier Bertrand pour les sinistres très lourds, NDLR] intervienne au-delà du plafond de garantie, même si l’affaire a débuté avant 2012. »
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