D'une part, des instances officielles pléthoriques en nombre : direction générale de la Santé, Conseil supérieur d'hygiène publique, Haut Comité de la santé publique, INSERM, Institut de veille sanitaire, sans oublier une vingtaine d'agences spécialisées (AFSSA, AFSSAPS, etc.) ; d'autre part, des médecins représentés par leur Ordre, par plusieurs dizaines de sociétés savantes et par autant de syndicats médicaux.
Devant ce qu'il appelle la « double balkanisation » des structures qui se disputent une position centrale fort encombrée dans la politique de santé, le Pr Maurice Tubiana pose carrément la question : l'Académie a-t-elle encore sa place ?
Evidemment, la situation était plus claire en 1820, l'année où parut l'ordonnance royale (du 20 décembre) portant création de l'Académie royale de médecine. Près de deux siècles plus tard, le nouveau président de l'institution a donc naturellement à cœur de réaffirmer qu'elle est « plus utile que jamais, mais à condition de clarifier sa place et sa fonction ».
Face à des « concurrents » submergés par les urgences, médiatiques ou réelles, la préparation du budget, ou la réflexion à court et à moyen terme, l'Académie dispose, se félicite-t-il, d'avantages appréciables : « La pérennité, l'indépendance, la liberté d'expression, une structure multidisciplinaire et la capacité de faire appel à tous les experts, français ou étrangers, le tout en échappant à la tentation du jugement précipité et des compromis. »
Un renouveau en trois chapitres
Le renouveau de la rue Bonaparte passe aussi par une réforme en trois chapitres principaux :
- La redéfinition des missions, tout d'abord, avec la formalisation des autosaisines ; l'Académie, en effet, ne saurait limiter ses réponses aux seules questions que lui pose le gouvernement. Il faut aussi créer la possibilité d'enquêter auprès des pouvoirs publics sur les suites données aux recommandations de l'Académie.
- Le « rajeunissement des cadres », avec le développement du corps des correspondants qui permet d'accueillir des personnalités en activité, et l'accroissement des champs de compétences à l'intérieur de l'Académie. « A l'heure où les sciences fondamentales, de la virologie à la biologie cellulaire et moléculaire, de l'épidémiologie aux biomathématiques ont un rôle plus en plus grand, explique le Pr Tubiana, il faut que nous ayons dans notre compagnie des spécialistes de tous les domaines. » Des spécialistes, ajoute-t-il, qui « ne se limitent pas aux seuls scientifiques, mais aussi des juristes, des économistes de la santé et des experts en sciences humaines et sociales : si l'on considère les principaux problèmes de la santé au XXIe siècle, le vieillissement de la population, la prévention dans les trois domaines de la santé définis par l'OMS (santé physique, santé mentale et santé sociale) ».
Toujours au sujet des correspondants, le Pr Tubiana souhaite qu'ils soient recrutés parmi « les plus brillants, les plus éminents » des jeunes collègues.
- Le renforcement du prestige et de la crédibilité de l'Académie. Pour « réapprendre à distinguer l'important de l'accessoire et le long terme de la fausse urgence », l'Académie dispose de ses traditionnels rapports et avis, de son Bulletin, mais aussi d'un site informatique dont le rôle doit être défini.
« Il nous faudra du temps, des moyens, du courage », note en conclusion le nouveau président, qui assure n'en pas manquer. Il est vrai que l'œuvre de modernisation de l'Académie est de longue haleine, engagée depuis plusieurs années par les présidents successifs, Charles Pilet et les Pr Claude Sureau et Gabriel Blanchet. C'est au Pr Louis Hollender, chirurgien et strasbourgeois connu pour ses ouvrages sur la chirurgie de l'estomac, du pancréas, du côlon et sur la pathologie chirurgicale générale, élu vice-président pour 2002, qu'il appartiendra de poursuivre la tâche en 2003. En qualité de président de la commission hospitalo-universitaire de l'Académie, il s'est signalé par trois rapports sur des sujets délicats : la désaffection pour les carrières hospitalo-universitaires, l'accompagnement de la fin de vie et la formation des médecins étrangers en France.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature