Le chantier de l'intégration dans la société des handicapés a été déclaré ouvert par Jacques Chirac en 2003, année européenne des accidentés de la vie. La France compte 45 000 personnes souffrant de troubles psychiatriques chroniques et/ou handicapées, dont 13 000 enfants, privés de place dans un établissement de soins.
Ces malades, « qui ne sont pas, ou mal, soignés, on les retrouve sous les ponts ou dans les prisons déjà surchargées » : 40 % des sans-abri et 30 % de la population carcérale relèvent de la psychiatrie. « On les retrouve aussi dans leurs familles, lesquelles vivent un enfer, car elles n'ont comme formation pour se battre contre la maladie, la souffrance et souvent la violence du sujet mentalement atteint que l'amour qu'elles lui portent », affirme l'association Droit aux soins et à une place adaptée (DSP)*.
Une atteinte aux droits de l'homme
Pour les Drs Pierre Rivière et Roger Salbreux, pédopsychiatres, fondateurs de DSP au printemps 2002, les droits de l'homme ne sont pas respectés. Treize mille filles et garçons à la porte de centres médico-éducatifs français, mais 3 000 d'entre eux sont pris en charge en Belgique. Et parmi les jeunes qui vivent dans des structures appropriées, 25 000 ne seraient pas scolarisés.
Même problème pour les adultes : 32 000 sont sans CAT, foyer ou maison d'accueil spécialisée. Dans les hôpitaux et les services psychiatriques, la fermeture des lits devient la règle. Sans oublier le manque de psychiatres, « de 600 à 700 », selon l'association. Pour DSP, la coupe est pleine.
Une manifestation le 15 mars à Paris
Aussi l'association a-t-elle renvoyé, devant un tribunal symbolique, le
15 mai dernier, les chefs de gouvernement de la période comprise entre 1996 (date de création de l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie, ONDAM) et 2002, MM. Juppé et Jospin, ainsi que les ministres de la Santé, Gaymard, Gillot et Kouchner, les ministres de l'Education, Allègre et Lang, et Mme Royal, secrétaire d'Etat aux Personnes handicapées. Tous sont poursuivis pour « non-assistance à personne en danger », « discrimination » ou « mise en péril de mineurs ». Le ministre actuel de la Santé, le Pr Jean-François Mattei, alerté par les médecins concernés, leur fera savoir, le 16 mai, qu'ils doivent, désormais, « faire des choix parmi les malades », conformément à l'ONDAM.
Pour tenter de faire bouger les choses, DSP appelle à une marche dans les rues de Paris, le 15 mars, qui s'achèvera sous les fenêtres du ministre. Plusieurs autres organisations sont partie prenante, comme le Collectif des démocrates handicapés, le Syndicat des psychiatres français, l'Association pour la défense et le développement des handicapés en milieu scolaire, le Syndicat national d'unité des directeurs et des instituteurs FO et l'Association médicale de défense de la déontologie et des droits des malades. Toutes réclament la mise en uvre immédiate d'un plan d'urgence fondé sur la reconnaissance des besoins réels, en soins, en enseignement adapté, en places et en établissements spécialisés.
Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux Personnes handicapées, a déjà eu connaissance du SOS lancé par DSP. Au « Quotidien » qui lui demandait le 7 octobre comment elle comptait « procéder pour résoudre le problème posé par 45 000 handicapés mentaux en situation d'abandon, dont 13 000 enfants », elle répondait qu'en la matière « des chiffres divers circulent ». Et d'ajouter : « Je veux, avant de répondre, faire le bilan de l'existant. Je vous laisse donc la responsabilité de vos chiffres et de vos affirmations, d'autant plus que la réponse ne peut pas être uniquement quantitative. Avant de créer de nouvelles places dans des établissements spécialisés, il faut être plus attentif au choix de vie de chacun et à ses facultés d'adaptation. Il faut notamment mettre l'accent sur l'intégration scolaire, professionnelle et sociale ».
* Tél. 06.63.10.04.74 et 01.43.34.90.76.
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