Les maladresses et les reculs législatifs de Roselyne Bachelot, d’une part… L’adresse et les avancées chirurgicales du Pr Lantieri, de l’autre… En schématisant, voilà ce qu’ont retenu de 2010 les
médecins généralistes. Les résultats de notre sondage Call Medica Call/Le Généraliste suggèrent d’abord qu’il était temps que Roselyne Bachelot change de portefeuille ministériel. En effet, quel est le comble de l’agacement ces derniers mois pour les généralistes de l’Hexagone ? La désastreuse campagne de vaccination contre le H1N1 !
La profession a visiblement peu goûté d’être mise à l’écart de cette campagne, en théorie pour des raisons de conditionnement des produits, en réalité pour des motifs de gros sous, avant que le ministère de la Santé ne revienne en arrière au tout début de 2010 en concédant aux praticiens la possibilité de vacciner, pour moins de 7 euros la piqûre. Pour un généraliste sur deux, le principal motif de frustration en 2010 est d’avoir été ainsi court-circuité sans trop de ménagement, avant d’être remis dans la boucle, mais quasiment au prix de l’acte infirmier...
En comparaison, même la taxation annoncée des feuilles de soins papier apparaît loin derrière, citée comme principale source d’allergie par seulement un généraliste sur cinq. Pourtant, les discussions autour de la fameuse taxe auront animé une grande partie de l’année : elle est à l’origine des mouvements de fermeture des cabinets qui ont émaillé le premier semestre et de pas mal d’aller-retours de la part des pouvoirs publics, avant que la Sécu ne tranche, fin avril, sur une entrée en vigueur début 2011.
Paradoxalement, on retrouve aussi la réforme Bachelot dans les motifs de satisfaction des médecins généralistes. Mais c’est parce que la ministre a fait amende honorable que les généralistes sont contents. Un gros tiers d’entre eux applaudit à l’abandon des mesures coercitives de la réforme « HPST »?: déclaration obligatoire de congés et pénalités pour les récalcitrants aux «?contrats santé solidarité?». Comme motif d’allégresse, on s’attendrait à plus enthousiasmant. Sans doute faut-il y voir une nouvelle preuve que 2010 n’a pas apporté de grandes nouveautés.
Au hit-parade de la satisfaction, l’annonce par Nicolas Sarkozy du C à 23 euros est retenue à la première place par seulement 19 % de nos sondés. Il faut dire qu’elle était attendue depuis longtemps et puis, accordée au printemps, il
faudra ensuite du temps pour qu’elle se concrétise au 1er janvier prochain… Reste la dynamique initiée par Elisabeth Hubert : rapport sur la médecine de proximité, puis annonce d’une réforme par le président. C’est, objectivement, le plus gros chantier initié cette année, mais, visiblement, les généralistes attendent à voir. On leur a déjà tellement promis...
La greffe du visage les enthousiasme
Concernant les points saillants de l’actualité médicale, l’opinion des généralistes apparaît plus partagée encore. 31,5 % retiennent la première greffe visage-bouche-paupière réalisée fin juin par l’équipe du Pr Laurent Lantieri à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil. Sacré exploit effectivement : l’opération a duré 12 heures, c’est la treizième greffe de visage dans le monde, cinq ans après Isabelle Dinoire à Amiens et c’est, surtout, la première fois que l’on réalise le tour de force de greffer les paupières avec tout le système lacrymal. On est loin bien sûr du cabinet de médecine générale, mais c’est, peut-être, une façon pour les généralistes de célébrer l’excellence médicale française. En comparaison, l’arrivée de nouveaux médicaments dans le diabète est d’une utilité quotidienne pour les médecins de ville : un gros quart (26,5 %) en fait l’événement médical majeur de 2010. À côté de ces deux nouveautés médicales, la polémique sur le Médiator®, pourtant récente et très médiatisée, l’apparition de la dengue en métropole et, même, la recrudescence de la rougeole ne sont cités que par un peu plus d’un médecin sur dix.
Notre sondage a enfin voulu savoir comment ont été perçues les principales mesures de santé publique prises pendant l’année. Pas de doute possible, c’est l’arrivée du méningocoque C dans le calendrier vaccinal qui recueille la majorité des suffrages : pour plus de 4 médecins sur 10, c’est la meilleure décision prise en santé publique cette année. Un tel score peut surprendre compte tenu de l’incidence faible (quelques centaines de cas par an) de la méningite C dans notre pays. Sans doute l’extrême gravité de cette infection fulgurante, mais aussi le changement que la vaccination représente dans la pratique des généralistes expliquent-elles que les praticiens soient si nombreux à faire de sa prévention une priorité. Et la médiatisation des cas avec, notamment, la vaccination de plusieurs milliers d’étudiants à Lille cet automne y est sans doute aussi pour quelque chose.
À côté, l’implication des généralistes dans le dépistage systématique du Sida n’est placée en tête que par 11 % des sondés. C’est peu. Et beaucoup moins que le rôle croissant qui leur est désormais attribué dans la prévention du cancer du col de l’utérus.
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