LE QUOTIDIEN - Un an et demi après le lancement du plan, quel bilan dressez-vous ?
FLORENCE LUSTMAN - L’année 2008 a été dédiée à la mise en route du plan, autrement dit à l’élaboration de normes, de recommandations, de cahiers des charges, car ces référentiels de bonne pratique n’existaient pas. Je fais remarquer au passage que la rédaction de ces guides s’est faite en parfaite concertation avec tous les partenaires (France Alzheimer, la Fondation Médéric Alzheimer, l’association des départements de France, l’Industrie du médicament...). Sur la base de ces cahiers des charges, nous avons lancé les appels à projets. Et 2009 a été marquée par la mise en chantier d’un certain nombre d’expérimentations, qui sont porteuses de beaucoup d’espoir. S’il ne fallait d’ailleurs retenir qu’un seul objectif du plan, ce serait celui-là : l’amélioration de la qualité de vie des malades et de leurs aidants. Dix-sept conventions financières ont été signées pour des MAIA (Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer), ces guichets uniques qui permettent l’intégration au plan local de toutes les compétences sanitaires et médico-sociales. Onze projets de plate-formes de répit ont démarré (à Marseille, Dunkerque, Dijon...). Quarante équipes pilotes spécialisées Alzheimer ont entamé leur travail au sein de SSIAD (services de soins infirmiers à domicile) et de SPASAD (services polyvalents d’aide et de soins à domicile) pour favoriser le maintien à domicile, plébiscité par les malades et leurs familles. On peut dire que quelque chose de concret a commencé sur le terrain.
En2009, un pas majeur pour la recherche aura été franchi, avec la découverte par l’équipe du Pr Philippe Amouyel, de l’institut Pasteur de Lille, de nouveaux gènes impliqués dans la maladie (« le Quotidien » du 8 septembre). Grâce au plan, ce sont 58 projets qui sont en cours, qu’il s’agisse de recherche fondamentale, clinique, en sciences humaines et sociales ou en nouvelles technologies, qui totalisent 27 millions d’euros.
Concernant la prise en charge des malades Alzheimer en maison de retraite, la mission Ménard avait relevé qu’elle n’était pas satisfaisante. Que prévoyez-vous à ce niveau ?
Nous avons réuni les experts afin de mener une réflexion sur la prise en charge de ces patients, qui présentent certains jours des troubles du comportement, à d’autres périodes non. Il est ressorti de ces travaux qu’il faut leur proposer des espaces dédiés. L’idée est toute simple, il s’agit de grands espaces, de l’ordre de 150 m2, où ils seront pris en charge. Ce sont les PASA (pôles d’activités et de soins adaptés), qui bénéficient d’une architecture adaptée et d’un personnel formé. Si les troubles sont plus importants, la prise en charge de ces personnes s’envisage alors en UHR, unités d’hébergement renforcées. À ce jour, nous avons déjà reçu 27 demandes d’investissement pour des PASA et 72 pour des UHR, ainsi que plusieurs centaines de candidatures à la labellisation. Et, à la fin de cette année, nous devrions disposer d’un outil de tarification pour cette mesure.
Le comité de suivi du plan évoque des difficultés à faire parvenir les nouveaux moyens financiers jusqu’aux CMRR (centres mémoire de ressources et de recherche)...
L’arrivée des financements en bout de chaîne est en effet un problème. Mais le constat vaut pour toutes les mesures, sauf la recherche, qui, elle, bénéficie d’une structure dédiée, la Fondation de coopération scientifique. Mais dès qu’il s’agit de crédits délégués (c’est aussi le cas des accueils de jour, des maisons de retraite...), il y a des soucis. Il arrive par exemple que les financements soient bien transmis à l’hôpital, encore faut-il qu’ils soient bien alloués ensuite. Ce qui pêche, aussi, c’est la remontée d’informations, qui permettrait de vérifier le bon usage de ces fonds. Nous devons rendre plus transparente l’utilisation des fonds par les administrations centrales. Le site Internet, accessible à tous, est là pour cela : www.plan-alzheimer.gouv.fr.
2010 sera-t-elle l’année de l’évaluation de toutes ces expérimentations ?
Année de l’observation, de l’évaluation pour une éventuelle généralisation du concept. L’idée est que d’ici à 2012, on puisse généraliser ces innovations, pour autant qu’elles aient fait leurs preuves.
Autre sujet sur lequel nous devons travailler, c’est l’accès au diagnostic. Selon une enquête menée par l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) fin 2008, 91 % des personnes interrogées souhaiteraient connaître leur diagnostic si elles présentaient des troubles évocateurs de la maladie. Il faut absolument motiver les généralistes, car nous comptons vraiment sur eux comme porte d’entrée naturelle au diagnostic. Nous développons en parallèle un dispositif d’annonce et d’accompagnement, afin de diminuer les situations de grand stress vécues par les malades et leurs proches à ce moment crucial.
› PROPOS RECUEILLIS PAR AUDREY BUSSIÈRE
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