Comment éviter que l'épidémie de grippe hivernale, se superposant à celle du Covid-19, ne vienne aggraver l'état sanitaire de la France ? Les appels à la vaccination se multiplient, sans qu'il y ait toutefois de consensus sur les populations à prémunir ou la question de l'obligation.
L’Académie plaide pour une obligation pour les soignants
L'Académie nationale de médecine réitère ce 21 septembre sa proposition de rendre obligatoire la vaccination annuelle des soignants contre la grippe saisonnière, qu'ils exercent dans le secteur public ou libéral, dans les établissements de santé et dans les EHPAD, ou encore à domicile, auprès des personnes âgées. « C'est une responsabilité éthique de protéger les patients dont ils ont la charge », déclare-t-elle. La couverture vaccinale des soignants, en 2018-2019, n'était que de 35 % dans les établissements de santé (67 %, pour les médecins, 48 % pour les sages-femmes, 36 % pour les infirmiers et 21 % pour les aides-soignants) et 32 % dans les EHPAD.
L'Académie souligne que le risque d'infection grippale est plus élevé chez les soignants qu'en population générale. Or, 50 à 80 % d'entre eux continuent de travailler quand ils sont infectés, ce qui représente un risque non négligeable pour leurs patients. « La grippe nosocomiale est fréquente dans les hôpitaux et dans les EHPAD où elle entraîne une mortalité qui peut atteindre 60 % », rappelle l'Académie, en se fondant sur les données du Haut Conseil de la santé publique.
« La pandémie de Covid-19 impose aujourd'hui de reconsidérer » la (récurrente) question de l'obligation vaccinale des soignants, qui a déjà été inscrite dans la loi en 2006, avant qu'un décret ne suspende cette mesure, insiste l'Académie de médecine. « Nul ne peut prédire l'ampleur ni la gravité de la grippe saisonnière 2020-2021. Le risque d'une saturation des services hospitaliers par l'addition de cas de grippe sévère aux cas de Covid-19, aggravée par l'incapacité des soignants malades, ne peut être encouru », conclut-elle.
Aura-t-elle gain de cause ? Partageant les réticences de sa prédécesseure Agnès Buzyn, le ministre de la Santé Olivier Véran bottait en touche dans un entretien au « Quotidien » le 12 septembre dernier. « Il faut une loi pour obliger la vaccination des soignants, ce qui n'est pas possible dans les délais impartis. Cela n'est pas faisable », déclarait-il.
Vacciner massivement ou cibler ?
Par ailleurs, quelque 75 députés de la majorité ont lancé, ce 20 septembre dans le « Journal du Dimanche », un appel « à une vaccination massive et solidaire » contre la grippe.
« Nous attendons toutes et tous avec impatience le vaccin contre le coronavirus. Profitons d'ores et déjà des vaccins existants car ils sont nos meilleurs alliés dans cette lutte contre les virus », écrivent les signataires (dont le Dr Julien Borowczyk, LREM, Loire ou le Pr Jean-Louis Touraine) en s'engageant eux-mêmes à se faire vacciner.
Ils demandent en outre que les mutuelles offrent cette année la prise en charge du vaccin antigrippal à tous les Français (afin que les personnes à risques et les plus de 65 ans ne soient pas les seuls à pouvoir bénéficier du remboursement intégral). Ils suggèrent d'autoriser les soignants à détenir un stock de vaccins contre la grippe et le pneumocoque pour assurer des campagnes de vaccination partout. Et saluent la commande par Olivier Véran d'un stock de 13 millions de doses de vaccins antigrippaux, « bien plus que les années précédentes ».
Néanmoins, la stratégie de vaccination massive ne semble pas celle préconisée par le gouvernement. « Pour l'instant, l'accent est mis sur la population cible, l'enjeu n'est pas pour l'heure d'élargir à l'ensemble des Français », explique toujours dans nos colonnes Olivier Véran. « On va sensibiliser très fortement les Français vulnérables, un public cible de 17 millions de personnes de par leur âge, leur état de santé ou leur profession. Il faut impérativement améliorer la couverture vaccinale contre la grippe. Les taux de vaccination antigrippale en France sont trop faibles, même en EHPAD », précise-t-il.
Même si le nombre de vaccins disponibles « est un peu augmenté cette année en France par rapport à l'année dernière, nous ne recommandons pas une vaccination grippale pour tous, sinon les personnes qui en ont réellement besoin n’en auront pas. Il faut garder les doses pour ces personnes à risque. La vaccination contre la grippe vise une population bien définie et non la population générale, y compris les enfants, sauf ceux qui ont des risques particuliers », commente, de son côté, la Pr Élisabeth Bouvet, présidente de la Commission technique des vaccinations de la Haute Autorité de santé. Et de conclure sur une note d'espoir : « Il est probable qu’il n’y ait pas une grosse épidémie de grippe du fait des mesures barrières. »
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