Une salmonelle résistant à presque tous les antibiotiques

Publié le 22/08/2011

La bactérie Salmonella Kentucky préoccupe les scientifiques. Détectée à partir de 2002 chez des voyageurs de retour d’Égypte, du Kenya et de Tanzanie, elle commence à s’implanter en Europe, touchant aujourd’hui, dans plus de 10 % des cas, des personnes n’ayant pas voyagé à l’étranger. Et le nombre de cas explose : alors qu’entre 2002 et 2008, 500 cas ont été recensés pour la France, le Royaume-Uni et le Danemark, 270 cas ont été confirmés pour la France seule entre 2009 et 2010.

Mais le plus inquiétant, comme le soulignent dans un communiqué l’Institut Pasteur, l’Institut de veille sanitaire de l’INRA, est que Salmonella Kentucky est devenue résistante à presque tous les antibiotiques. Dans le cadre d’une étude internationale, des chercheurs réunis autour de François-Xavier Weill et Simon Le Hello (Pasteur), qui publient leurs travaux dans le « Journal of Infectious Diseases » (en ligne, 3 août) retracent l’évolution de la bactérie. Au début des années 1990, un fragment d’ADN comprenant des gènes de résistance à six molécules s’est intégré dans le chromosome de Salmonella Kentucky. Au milieu des années 1990 est apparue par mutation la résistance aux quinolones, puis, au début des années 2000, celle aux fluoroquinolones, actuellement l’un des traitements clés des infections sévères à Salmonella. L’Égypte pourrait être le berceau de l’apparition de ces résistances, les premières ayant été probablement acquises par l’intermédiaire des filières aquacoles, qui recouraient massivement aux antibiotiques. Quant à l’explosion récente des cas, elle serait liée à la propagation de la bactérie en Afrique dans la filière volaille, grande consommatrice de fluoroquinolones. Les chercheurs ont en outre montré récemment l’existence en Afrique du Nord de souches devenues résistantes aux céphalosporines de troisième génération et aux carbapénèmes, « le dernier rempart thérapeutique contre la bactérie ».

Quant à l’Europe, le risque est la contamination de la volaille d’élevage, entraînant une propagation à grande échelle. Les chercheurs soulignent l’importance d’une veille microbiologique nationale et internationale, en particulier pour les pays du Sud, et la nécessité de rationaliser l’utilisation des antibiotiques dans les filières d’élevage à l’échelle mondiale.

R. C.

Source : lequotidiendumedecin.fr