Journée du Refus de la misère : le cri d'alarme de MDM, le plan du gouvernement

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Publié le 17/10/2017
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Crédit photo : S. Toubon

En 2017, la 5e puissance mondiale n'est toujours pas en mesure de prendre soin des plus fragiles sur son territoire, tel est le constat que dresse l'association dans son 17e rapport annuel sur l'accès aux droits et aux soins des plus démunis, publié ce jour mondial du refus de la misère, au moment où le gouvernement donne le coup d'envoi d'une concertation destinée à construire une stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes (voir encadré).

Et les décisions politiques sur l'accueil des migrants, les expulsions des bidonvilles, ou encore la lutte contre la prostitution, aggravent la santé des précaires, constate l'ONG, en appelant à lutter contre « une grammaire qui renverrait les précarités les unes contre les autres », lit-on sous la plume de Yannick Le Bihan, directeur des Opérations Monde. 

Santé et prévention défaillantes 

L'état de santé des personnes démunies est intimement lié à leurs conditions d'accueil et de vie, observe MDM, à partir de ses missions dans les 20 centres d'accueil, de soins et d'orientation (CASO). Les infections y sont plus fréquentes, ainsi que les problèmes digestifs, cutanés et respiratoires. 60 % des patients souffrent d'une pathologie chronique, 80 % ont besoin d'un traitement. En moyenne, les personnes présentent 4,6 dents cariées et 4,8 dents absentes. 

La santé mentale de ces populations est dégradée : 9 % souffrent de troubles d'ordre psychologique : troubles anxieux et troubles dépressifs qui augmentent avec la durée de résidence en France. 

L'an passé, 47 % des patients reçus dans les CASO présentaient un retard de recours aux soins, liés aux entraves à l'obtention d'une couverture maladie, plus de 45 % des femmes enceintes n'étaient pas suivies, et 38 % des patients avaient besoin d'une prise en charge urgente. MDM alerte sur la malnutrition qui touche 2,3 % des enfants de moins de 5 ans vus à Mayotte, sous sa forme sévère, et 11 % d'entre eux, sous sa forme modérée. 

MDM déplore le défaut de prévention dont témoignent les patients des CASO. Moins d'une personne de plus de 15 ans sur deux est à jour pour le DTP et le BCG, et moins d'une sur trois est à jour pour le ROR, la coqueluche et l'hépatite B. Chez les enfants, huit sur dix sont à jour pour le DTP, sept sur dix pour le BCG, le ROR et la coqueluche et six sur dix pour l'hépatite B. Seulement 29 % des femmes ont déjà réalisé un frottis cervico-vaginal dans leur vie, soit trois fois moins que la population générale. Seulement 12 % des femmes ont recours à une contraception (cinq fois moins que le reste de la population). Enfin, ces personnes méconnaissent leur statut sérologique pour les hépatites (à 79 %) et le VIH (74 %).

Plaidoyer pour un accès aux droits universels

Plus de 84 % des personnes n'ont aucune couverture maladie, lorsqu'elles sont accueillies pour la première fois dans les CASO. Et un patient sur cinq évoque des difficultés financières dans l'accès aux soins. Revendication de longue date, MDM demande la fusion de l'aide médicale d'État (AME) (moins de 0,5 % des dépenses d'assurance-maladie) dans le régime général de la Sécurité sociale, ainsi que l'augmentation du seuil d'attribution de la CMUc au niveau du seuil de pauvreté. 

Toujours pour améliorer l'accès aux soins, MDM milite pour la promotion de l'interprétariat professionnel dans toutes les structures médico-sociales et le développement et la pérennisation des actions de médiation en santé, ainsi que pour un soutien significatif des permanences d'accès aux soins de santé. 

L'ONG tire la sonnette d'alarme sur l'accueil et l'intégration des précaires dans la société. Seulement 8 % des patients des CASO ont un logement personnel, 60 % sont hébergés, plus de 21 % vivent dans la rue ou en hébergement d'urgence. Un dispositif par ailleurs saturé avec plus de la moitié des demandes au 115 qui n'aboutissent pas.

MDM s'inquiète enfin du sort des mineurs non accompagnés, dont 3 046 ont poussé la porte des CASO en 2016. Alors qu'ils devraient être protégés et placés sous la responsabilité de l'aide sociale à l'enfance, leur minorité est souvent réfutée après des évaluations sommaires et subjectives, à la méthodologie contestée, déplore l'ONG.

 

Un plan de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes. Le président Emmanuel Macron a donné le coup d'envoi d'une concertation destinée à construire une stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, qui sera déployée à partir du printemps 2018. Concrètement, une quarantaine d'acteurs de la lutte contre la pauvreté se sont réunis ce midi à l'Élysée. « C'est un grand moment de concertation et de co-construction (...) dans un souci d'investissement social vis-à-vis de notre jeunesse », a déclaré la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, en précisant que neuf millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté en France. Le taux de pauvreté moyen en France est d'un peu plus de 14 %, et atteint près de 20 % chez les enfants et les jeunes (3 millions d'enfants, soit un enfant sur 5, vivent dans une famille sous le seuil de pauvreté), ainsi que 36 % des familles monoparentales et 70 % dans ces familles quand les mères sont inactives. De plus, 20 % des étudiants sont pauvres, a rappelé l'Élysée.


Source : lequotidiendumedecin.fr