Invité ce mercredi matin des « Débats sans tabou* » à Paris, le Dr Olivier Véran, neurologue au CHU de Grenoble, député socialiste de l’Isère et rapporteur du premier volet de la loi de santé (prévention), s’est employé à rassurer ses confrères médecins sur quelques points conflictuels de ce texte tout en affichant sa solidarité avec Marisol Touraine dans une période très agitée.
Le tiers payant intégral généralisé ? « J’écoute religieusement la ministre qui dit qu’elle ira jusqu’au bout de cette réforme », a assumé le député socialiste, insistant sur le « renoncement caché aux soins ». « Solidaire du gouvernement » sur ce sujet de forte crispation, Olivier Véran a en revanche souligné l’impérieuse nécessité de garantir aux médecins un système technique « totalement fiable », et non pénalisant pour la profession, qu’il s’agisse du temps passé pour le travail administratif ou du règlement dans les délais rapides.
« Depuis des mois, je défends sur ce sujet une stratégie pragmatique et non idéologique, nous devons d’abord être capables de démontrer que le tiers payant fonctionne parfaitement, avec un interlocuteur unique », a-t-il assuré, rappelant les propos de François Hollande promettant un système « beaucoup plus rapide et efficace ». « Par exemple, il ne faut pas que les médecins généralistes passent du temps de consultation à vérifier les droits de leurs patients », a illustré le parlementaire. Quant au rôle de l’assurance-maladie dans cette réforme, le député calme le jeu : « Ce n’est pas parce que l’argent transite par la caisse que ce sera un levier de chantage. » Le neurologue est même allé plus loin en suggérant des « pénalités » contre les organismes payeurs (caisses et complémentaires) en cas de défaut ou retard de paiement.
Pas question de désosser le métier de médecin
Le député socialiste s’est efforcé de dédramatiser sur deux autres points sensibles.
La montée en puissance des agences régionales de santé (ARS), accusées de préparer une carte sanitaire libérale ? « Le volet ambulatoire des SROS [schémas régionaux d’organisation des soins] n’est pas opposable, a répété Olivier Véran. Les ARS n’ont pas vocation à dicter aux médecins des modes d’organisation d’en haut mais à identifier des priorités de santé de santé publique ou d’accès aux soins. Et l’ARS n’a pas de leviers pour sanctionner. » Un groupe de travail doit être mis sur pied par Marisol Touraine sur la place des médecins dans les lieux de décision dans les territoires avec les ARS.
Quant aux pratiques avancées des professions paramédicales et aux nouveaux métiers de santé, autre sujet qui fâche dans la loi de santé, Olivier Véran a insisté sur l’opportunité d’évoluer en ce sens pour les médecins eux-mêmes. « On devrait pouvoir s’appuyer sur des paramédicaux beaucoup plus compétents dans certains domaines, a-t-il expliqué. C’est une occasion en or de regagner du temps médical. Il ne s’agit pas de déléguer des actes courts ou de "désosser" le métier de médecin mais aussi de mieux rémunérer le temps de consultation. » Là encore, un groupe de travail est programmé.
Au-delà de tel ou tel chapitre de la future loi, le député PS a salué la méthode de Marisol Touraine. « Elle dépose un projet de loi, constate les désaccords et s’engage sur une vraie concertation avant même le débat parlementaire. Et n’oubliez pas le rôle du Parlement ! », a-t-il lancé, une façon d’admettre que les lignes de cette loi controversée peuvent encore bouger.
* Une série de rencontres organisées par le Syndicat des médecins libéraux (SML) avec « Décision Santé » et « le Quotidien du Médecin ».
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