L’habitude d’introduire le
gluten
dans l’alimentation de l’enfant à l’âge de 6 mois est profondément enracinée dans bon nombre de pays développés. Cela dit, on n’a jamais testé avec rigueur la date optimale d’introduction du
gluten
dans l’alimentation de l’enfant.
De nombreux cliniciens estiment que, chez les enfants qui ont un risque familial de maladie
cœliaque, l’introduction du
gluten devrait être repoussée, ce qui permettrait le développement de la barrière intestinale et de la réponse
immune. Pourtant, des travaux réalisés en
Suède, dans les années 1980 et 1990, ont suggéré que l’introduction de petites quantités de
gluten entre 4 et 6 mois chez des enfants allaités réduisait le risque de survenue de la maladie.
Par ailleurs, chez les enfants ayant un risque génétique de diabète de type 1, des travaux ont suggéré que le risque de diabète de type 1 et de maladie
cœliaque était augmenté chez les enfants recevant du
gluten soit avant 4 mois, soit après 7 mois ; ce qui laisse à penser qu’une fenêtre existe, entre 4 et 7 mois, durant laquelle l’introduction de
gluten pourrait faciliter l’induction d’une tolérance.
Il était nécessaire de clarifier la relation entre le risque de maladie
cœliaque et la date à laquelle le
gluten est introduit. Ce qui a conduit à la mise en place de l’étude
CELIPREV,
multicentrique, prospective, comparant l’introduction précoce de
gluten à l’introduction retardée chez des enfants présentant un risque familial de maladie
cœliaque.
Un risque familial
Les 832 enfants inclus dans ce travail avaient un parent au premier degré atteint de maladie
cœliaque.
Chez ces enfants, le
gluten était introduit soit à 6 mois (groupe A) soit à 12 mois (groupe B). Le
génotype
HLA était déterminé à 15 mois ; la
sérologie à la recherche d’une maladie
cœliaque à 15, 24 et 36 mois puis à 5, 8 et 10 ans. Les patients ayant des résultats
sérologiques positifs avaient des biopsies intestinales.
L’objectif principal de l’étude était la
prévalence d’une auto-immunité de type maladie
cœliaque ou d’une maladie
cœliaque avérée à l’âge de 5 ans.
Parmi les 707 enfants toujours dans l’essai à 36 mois, à 2 ans d’âge, une plus forte proportion d’enfants du groupe A avait une auto-immunité de type maladie
cœliaque (16 %
versus 7 %) et une maladie
cœliaque avérée (12 %
versus 5 %).
Risque similaire, mais survenue retardée
Mais, à 5 ans, il n’y avait plus de différence significative entre les deux groupes.
À 10 ans, le risque d’auto-immunité de type maladie
cœliaque était bien plus élevé chez les enfants ayant un groupe
HLA à haut risque que chez ceux ayant un groupe
HLA standard (38 %
versus 19 %). Même situation pour la maladie
cœliaque avérée (26 %
versus 16 %).
Conclusion : ni l’introduction tardive de
gluten, ni l’allaitement maternel ne modifient le risque de maladie
cœliaque chez les enfants à risque. Toutefois, l’introduction différée de
gluten est associée à une survenue plus tardive de la maladie. Ce qui pourrait être bénéfique dans cette période cruciale de développement, indiquent les auteurs de l’étude.
Dr Emmanuel de Viel
Lionetti E et coll. N Engl J Med 2014 ; 371 : 1295-303.
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