La Fédération des médecins de France (FMF) constate avec inquiétude l’augmentation récente du nombre de « mises sous entente préalable », procédures utilisées par les caisses primaires d’assurance-maladie à l’encontre de médecins généralistes accusés (notamment) de surprescription d’indemnités journalières (IJ).
« Cinq confrères ont été rappelés à l’ordre ces dernières semaines par la CPAM du Rhône, et dans l’Oise, le Jura et le Gard, le recadrage des caisses prend de l’ampleur », précise le Dr Marcel Garrigou-Grandchamp, membre de la cellule juridique de la FMF qui estime à une « cinquantaine » le nombre de médecins concernés sur le territoire.
Selon la loi, la procédure de mise sous entente préalable consiste pour l’assurance-maladie à mettre sous tutelle un médecin dont le nombre de prescriptions d’IJ indemnisées « rapporté au nombre de consultations effectuées » est supérieur « aux données moyennes constatées pour une activité comparable » des autres médecins exerçant sous l’autorité de la même ARS ou de la même caisse. Le praticien épinglé a alors six mois pour rentrer dans les clous.
Prescriptions : rapport de un à quatre
Pour le Dr Garrigou-Grandchamp, le « nœud du problème » réside dans la définition de l’« activité comparable »que « l’assurance-maladie accommode à sa sauce ». « Seul le nombre d’IJ est pris en compte dans cette comparaison, proteste le médecin lyonnais. Rien du profil de la patientèle et rien du type d’actes (consultation, visite, urgence), sans compter que l’échelon régional est bien trop large pour être efficace ». Il cite le cas de ce médecin généraliste de Villeurbanne (69), prescripteur en trois mois de 4 600 IJ, tandis que la moyenne de ses confrères immédiats, à « activité comparable », est de 1 280 IJ.
« Mais ce confrère travaille beaucoup avec la toute proche clinique du Tonkin et fait énormément de "traumato" », argumente le Dr Garrigou-Grandchamp.
Selon les derniers chiffres de l’assurance-maladie, les médecins généralistes français ont prescrit en moyenne 3 507 IJ en 2010. On constate un rapport de un à quatre selon les régions, de 883 à Paris à 3 638 dans le Pas-de-Calais.
Délit statistique ?
La FMF vient d’alerter par courrier la ministre de la Santé Marisol Touraine et la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, Catherine Lemorton, sur cette « pression grandissante » subie par la profession, explique le Dr Garrigou-Grandchamp.
Le syndicat exhorte les médecins « épinglés » à prendre un avocat et à ne pas opter pour la « mise sous objectifs », une solution alternative qui consiste pour le médecin à s’engager à réduire lui-même le nombre de ses prescriptions d’IJ dans un délai fixé (par la caisse). Pour le Dr Garrigou-Grandchamp, « accepter, c’est implicitement accepter d’être "coupable" alors que vous êtes victime de délit statistique ». Et prendre le risque de payer une amende de plus de 6 000 euros.
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