COMME ELLE L'AVAIT déjà fait quelques jours plus tôt lors de son entretien avec Nicolas Sarkozy en compagnie du Pr Luc Montagnier, Françoise Barré-Sinoussi s'est inquiétée des risques que fait peser la crise financière sur la recherche et la lutte contre le sida et la tuberculose. L'infection par le bacille de Koch «est la plus commune et la plus évitable des causes de décès chez les personnes infectées par le VIH. La recherche contre la tuberculose est une des clés de la lutte contre les deux maladies», a-t-elle déclaré après l'hommage appuyé que lui ont réservé les participants à la conférence de presse organisée en préambule de la Conférence mondiale sur la santé respiratoire, organisée à Paris, du 16 au 20 octobre, par l'Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires (UICTMR). «La France doit tenir ses engagements envers le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme», a-t-elle souligné.
La présence du prix Nobel était l'occasion pour l'organisation non gouvernementale new-yorkaise, Treatment Action Group (TAG), qui milite depuis 1992 contre le sida, de rappeler les chiffres alarmants publiés dans son dernier rapport sur l'évolution des investissements de R&D dans la tuberculose, en 2005-2007. «Pour atteindre les objectifs du Plan mondial contre la tuberculose, les financements en R&D devraient être multipliés par cinq jusqu'à 2milliards par an. Or les données disponibles pour ces trois dernières années montrent que les promesses faites par les gouvernements et le secteur public ne seront pas tenues. En fait, les investissements stagnent à moins de 500millions par an, bien loin de ce qui serait nécessaire pour développer de nouveaux outils diagnostiques, de nouveaux médicaments et de nouveaux vaccins», a expliqué le Dr Mark Harrington, directeur exécutif de TAG.
La tuberculose tue chaque année deux millions de personnes dans le monde et elle «est aux portes de l'Europe», a-t-il souligné, rappelant l'ampleur de l'épidémie en Europe de l'Est. L'émergence en 2006 de tuberculoses à bacilles multirésistants (MDR-TB) et ultrarésistants (XDR-TB) fait planer la menace d'épidémies encore plus graves.
« N'ayez pas peur ».
«L'éradication de la tuberculose est possible, a, pour sa part, indiqué le Dr Paul Nunn, coordinateur TB/VIH et pharmacorésistance à l'OMS. Mais elle ne se fera pas avec les outils actuels.» Les outils mis en oeuvre pour le diagnostic, le traitement et la prévention de la tuberculose ont tous été développés entre le début du XXe siècle et les années 1960. «Nous devons aussi attirer de jeunes chercheurs avec de nouvelles idées et de la créativité dans la recherche sur la tuberculose mais aussi sur les maladies infectieuses. C'est vrai pour le sida, la tuberculose et le paludisme», a souligné Françoise Barré-Sinoussi. «N'ayez pas peur», leur a-t-elle lancé, ajoutant que la recherche en réseau qu'elle a toujours pratiquée n'était en rien un frein à leur carrière mais pouvait «faire avancer la science»
> Dr LYDIA ARCHIMÈDE
Des avancées
L'Alliance mondiale pour le développement de traitements antituberculeux (TB Alliance) vient de signer un accord de collaboration avec sanofi-aventis en vue d'accélérer la découverte, le développement et l'utilisation clinique de médicaments contre la tuberculose. L'Alliance a déjà mis au point deux molécules qui se trouvent à un stade clinique et douze autres sont en cours d'élaboration. Sanofi-aventis, qui a découvert la rifampicine au début des années 1960, est elle aussi très engagée dans la recherche thérapeutique.
La fondation Bill et Melinda Gates annonce l'attribution de 32 millions de dollars à CREATE, le consortium coordonné par des chercheurs de l'université Johns Hopkins (Baltimore, Maryland), pour répondre efficacement à l'épidémie de VIH/sida. Les fonds vont permettre de financer trois grandes études interventionnelles, au Brésil, en Zambie et en Afrique du Sud.
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