MISE EN PLACE depuis 1998 par le Syndicat national des dermatologues (SDNV), la Journée nationale de prévention et de dépistage des cancers de la peau devrait, cette année encore, mobiliser des centaines de dermatologues bénévoles dans l'ensemble du territoire, y compris les DOM-TOM. Une opération soutenue par le ministère de la Santé, l'Institut national du cancer (INCa) et les Laboratoires Avène, qui permet de rappeler la très préoccupante évolution du nombre de cancers de la peau dans le monde : 2 à 3 millions de nouveaux cas par an, dont 130 000 mélanomes à l'origine de 66 000 décès. En France, le taux d'incidence double tous les dix ans : chaque année, plus de 100 000 cas nouveaux de cancers de la peau sont détectés, dont environ 8 000 mélanomes responsables de 1 500 décès. Tous types confondus, les cancers de la peau tuent 5 personnes chaque jour en France. Les mélanomes, les plus dangereux, sont une des causes de mortalité par cancer la plus importante dans la tranche d'âge des 25-35 ans.
Des dermatologues mobilisés mais inquiets.
Pour l'ensemble des cancers cutanés, un dépistage le plus précoce possible est essentiel pour une efficacité optimale du traitement. L'intervention d'un dermatologue est, dans ce cas, capitale : après un examen minutieux, s'il suspecte fortement un mélanome, c'est lui qui procédera au prélèvement de la lésion afin de réaliser un examen anatomo-pathologique qui peut seul affirmer qu'il s'agit ou non d'un mélanome. Si le diagnostic est confirmé, une intervention chirurgicale sera rapidement programmée pour une «exérèse large» et un traitement local du cancer. Si la lésion n'est pas cancéreuse, le dermatologue, en fonction des risques de chaque patient, fournit un ensemble de conseils de prévention et préconise un rythme de visites de surveillance adapté à chaque cas. Un rôle clé que les dermatologues craignent de ne plus pouvoir assurer. Ils sont actuellement 3 400 en France (92 % en cabinets privés et 8 % en services hospitaliers) mais, à l'horizon 2015, si l'évolution actuelle se confirme, leur nombre aura diminué de moitié en France. Alliée au passage obligatoire par le généraliste, la pénurie qui se profile risque d'allonger les délais d'accès et de contribuer «à retarder le dépistage et le traitement précoces des cancers», s'inquiète le SNDV, qui, depuis deux ans, alerte les autorités sanitaires, «sans obtenir de réponses appropriées».
Ils seront néanmoins nombreux le jeudi 15 mai à accueillir le public dans les centres ouverts dans toute la France pour un examen de dépistage anonyme et gratuit*. Le dépistage sera aussi l'occasion d'informer et de sensibiliser pour que chacun ait conscience du risque à s'exposer au soleil, le principal facteur de risque connu des cancers de la peau. «Savoir se protéger du soleil, en associant vêtements et produits solaires, fait partie de l'éducation sanitaire», soulignent les dermatologues. Certaines idées reçues doivent être aussi rectifiées : «Le mélanome ne se développe pas toujours à partir d'un grain de beauté préexistant, mais peut survenir en n'importe quel endroit du revêtement cutané», expliquent-ils. De même, «il existe des mélanomes qui ne sont pas noirs ou bruns, mais couleur chair (mélanome achromique), ce sont les plus agressifs, leur diagnostic est souvent tardif car ils sont difficiles à identifier». En tout état de cause, «une lésion cutanée qui ne guérit pas avec un traitement banal, ou qui persiste plus de trois à quatre mois, doit faire l'objet d'un diagnostic précis pour s'assurer qu'il ne s'agit pas d'un cancer».
L'ABC de l'auto-examen.
Si le dépistage par un dermatologue constitue la chance de survie, chacun doit avoir un rôle actif dans la prévention. Outre la protection contre les expositions solaires surtout des enfants – les coups de soleil dans l'enfance ou l'adolescence sont un facteur de risque du mélanome –, une autosurveillance doit être régulièrement pratiquée. Les personnes qui ont un grand nombre de grains de beauté de diamètre supérieur à 4 ou 5 mm, celles qui ont dans leur famille un cas de mélanome ou qui ont elles-mêmes déjà eu un mélanome, les individus à peau claire qui développent particulièrement des brûlures solaires sont les plus à risque de mélanome. Pour repérer les signes suspects dès leur apparition, l'auto-examen de la peau doit être réalisé environ trois fois par an, en observant toutes les parties du corps, de la tête aux pieds. La règle ABCD permet de mémoriser les signes d'alerte :
– A comme asymétrie : forme non circulaire avec deux moitiés qui ne se ressemblent pas ;
– B comme bords irréguliers : bords dentelés, mal délimités avec parfois une extension du pigment sur la peau autour de la tâche ;
– C comme couleur non homogène : présence de plusieurs couleurs (noir, bleu, marron, rouge ou blanc) ;
– D comme diamètre : diamètre en augmentation (en général supérieur à 6 mm) ;
– E comme évolution : toute tache qui change d'aspect rapidement (forme, taille, épaisseur, couleur).
* Un Numéro Vert (0800.777.707) et un site Internet (www.syndicatdermatos.org) sont mis à disposition du public pour connaître le centre d'accueil le plus proche.
Dix ans d'intervention
Le bilan après dix ans d'intervention publié par le Syndicat des dermatologues est éloquent, même s'il sous-estime la réalité du fait d'une perte probable de l'information. Pour préserver l'anonymat du patient, le dermatologue dépisteur remet au patient, en cas de suspicion de cancer, une fiche qu'il doit remettre au médecin qui le prend en charge. Ce dernier est chargé ensuite de transmettre les résultats anatomopathologiques au syndicat.
Depuis 1998, avec 1 000 dermatologues mobilisés chaque année dans plus de 300 centres :
220 000 patients ont consulté pendant la journée de dépistage ;
1 600 lésions cancéreuses ont été détectées : 1 200 carcinomes basocellulaires, 100 carcinomes spinocellulaires et 300 mélanomes.
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