EN 2006, L'UNITÉ de médecine légale (UML) de l'hôpital de Bondy, dans la Seine-Saint-Denis, a accueilli quelque 9 831 victimes de violences physiques ou psychologiques, volontaires dans 97 % des cas. On y compte 4 772 femmes et 5 059 hommes, âgés de 31 ans en moyenne pour les premières et de 28 ans chez les seconds. Dans la population féminine, l'agression survient fréquemment à domicile (41 %), avec pour auteur le conjoint (31 %). Les agressions dont sont victimes les hommes se produisent plus souvent sur la voie publique (38 %) ou au travail (22 %), l'agresseur étant un inconnu dans la majorité des cas (54 %).
Les violences entraînent, selon l'étude des urgences médico-judiciaires et de l'UML de l'hôpital Jean-Verdier*, une incapacité totale de travail (ITT) médiane de 3 jours, tant pour les femmes que les hommes, ces derniers subissant toutefois davantage d'ITT dépassant 8 jours. L'enquête, conduite dans l'établissement séquanodionysien de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, s'inscrit dans le cadre des recommandations du plan Violence et soins, en application de la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004, qui vise à obtenir un «consensus pour définir les bonnes pratiques en matière de repérage des violences et de détermination de la durée d'ITT». Comme dans la récente étude menée chez des jeunes filles de 18 à 21 ans dans le même département, les résultats suggèrent que les violences constatées sont du même ordre dans la Seine-Saint-Denis que dans le reste du pays.
ITT et arrêt de travail.
Les auteurs soulignent l'intérêt de l'ITT, qui permet «de réaliser la synthèse du retentissement fonctionnel global des blessures, en prenant en compte la personne elle-même». «Cette notion, qui connaît une définition non pas médicale, mais jurisprudentielle, désigne la durée de gêne notable dans les actes de la vie courante» et elle renvoie aux «activités usuelles de la victime».«L'évaluation ne remet pas en cause la durée de l'arrêt de travail éventuellement prescrit, qui constitue une incapacité professionnelle», précisent encore les auteurs. Pour autant, «il n'y a aucun lien direct entre ITT et arrêt de travail: l'ITT concerne toute personne, quels que soit son âge et sa situation professionnelle. En outre, la durée d'un arrêt de travail éventuellement prescrit tient compte de la nature de l'activité et des tâches réalisées, ce qui n'est pas le cas pour l'ITT. Ainsi, la durée d'un arrêt de travail peut être inférieure, égale ou supérieure à la durée d'ITT déterminée. Contrairement à ce que l'appellation pourrait laisser croire, l'incapacité ne doit pas obligatoirement être totale». Depuis 1982, la Cour de cassation établit que l'incapacité n'implique pas nécessairement pour la victime l'impossibilité de se livrer à un effort physique afin d'accomplir elle-même certaines activités de la vie quotidienne. Sur le plan pénal, l'ITT permet d'apprécier la gravité des violences exercées afin de qualifier l'infraction. Pour les brutalités volontaires, une ITT supérieure à huit jours entraîne une qualification délictuelle. Pour les faits involontaires, la limite est fixée à trois mois.
* Étude, réalisée par Menouar Tedlaouti, Cyril Boraud, Samia Benmakroha, Meziane Addouche, Abdelhalim Boughiba et Patrick Chariot, « BEH » 19/6 mai.
L'UML de Seine-Saint-Denis
L'unité de médecine légale de Seine-Saint-Denis, créée en 1989 à l'hôpital de Bondy, reçoit les adultes et les enfants victimes de violences physiques, psychologiques ou sexuelles. Elle assure la prise en charge sanitaire des personnes placées en garde à vue dans les locaux de police ou de gendarmerie, les estimations d'âge chronologique (âge osseux), la surveillance médicale des femmes et des hommes en rétention administrative au centre de Bobigny et les examens externes des sujets décédés (levées de corps).
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