TRAVAIL, transports, éducation, urbanisme et environnement : les 16 experts réunis par l'INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) à la demande du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative, en juin 2007, se sont intéressés à tous les aspects de l'activité physique, de l'exercice physique de la vie quotidienne à la pratique sportive, en passant par l'activité de loisirs.
Les données scientifiques disponibles recensées à travers 2 000 articles publiés ont permis de conjuguer les approches sociologiques, épidémiologiques, physiologiques, cliniques, biologiques, et psychologiques.
Pratique insuffisante.
Les conclusions vont bien au-delà des évidences épidémiologiques et l'état des lieux dressé sur le niveau habituel d'activité physique de la population française est plutôt alarmant. En s'appuyant sur les travaux de l'INPES (Institut national de prévention d'éducation pour la santé), et notamment l'enquête nationale nutrition santé, les rapporteurs insistent sur le fait que «42% de la population générale ne pratiqueraient pas un niveau d'activité physique suffisant pour assurer un bénéfice pour la santé». D'après les mesures réalisées en matière d'activités sportives, la France fait partie des pays où la pratique est même la plus faible chez les préadolescents, alors «qu'il n'existe aucune recommandation précise pour l'activité physique à pratiquer à cette période de la vie».
Les données socio-économiques indiquent que la pratique d'une activité dépend du niveau d'études – plus de 80 % des personnes qui ont fait des études supérieures poursuivent des activités sportives. De même, le niveau de revenu est étroitement lié à la pratique plus ou moins régulière des loisirs. Curieusement, c'est en milieu rural que les activités sportives sont les moins recherchées, alors que les demandes explosent dans les villes de plus de 200 000 habitants.
Le facteur temps apparaît aussi comme un déterminant essentiel de l'activité physique. Avoir des enfants en bas âge, travailler dans une petite entreprise ou être à son compte sont autant de situations qui réduisent la probabilité de s'adonner à ces pratiques sportives. Pourtant, les experts s'accordent à dire qu'elles doivent être maintenues et recommandent de «pratiquer une activité physique de façon modérée cinq jours par semaine, ou bien 20minutes à raison de trois jours par semaine en plus d'une séance d'activité physique d'intensité élevée».
Quant aux effets de l'activité physique et sportive sur la santé, ils sont multiples. Les mécanismes énergétiques agissent surtout dans la prévention des maladies cardio-vasculaires et des maladies métaboliques, avec un effet bénéfique sur la mortalité prématurée. L'activité physique permet aussi le maintien de l'appareil locomoteur : «Le muscle et l'os vont s'adapter aux contraintes mécaniques qui leur sont imposées. La sédentarité est dramatique pour le maintien du capital osseux et de la fonction musculaire», indique Charles Yannick Guezennec, responsable du pôle de médecine du sport dans l'Essonne. «Ces mécanismes permettent de décrire et de proposer des plans d'activité physique qui peuvent entrer dans le champ de traitement», souligne-t-il. Aujourd'hui, des activités de résistance conjuguées aux activités d'endurance sont recommandées dans la littérature internationale, y compris pour les sujets âgés.
Prévention du cancer du côlon.
L'activité physique a bien sûr un impact direct sur les maladies métaboliques, obésité et diabète de type 2, qui ont un coût social important.
Toutefois, les travaux présentés mettent en évidence des conclusions moins attendues, par exemple, le lien entre l'activité physique et la prévention ou le traitement des cancers du sein et du côlon. L'action directe sur le temps de transit digestif pourrait conduire à un ralentissement de la croissance des tumeurs. Des travaux (43 sur 50) portant sur le cancer du côlon et le cancer colo-rectal ont permis de démontrer une diminution du risque chez les sujets qui avaient l'activité physique la plus importante, avec une réduction moyenne de 40 à 50 %.
Plusieurs publications mettent aussi en évidence le bienfait de l'activité physique vis-à-vis de la prise en charge des maladies dégénératives neurologiques, telles que la sclérose en plaques, la maladie de Parkinson ou encore la maladie d'Alzheimer. «Il s'agit là d'un nouveau champ d'investigation à explorer dans les années à venir », estime Jeanne Etiemble qui a coordonné ce groupe de travail. L'activité physique est d'ores et déjà reconnue comme un facteur favorisant la résistance au développement de la maladie d'Alzheimer qui retarde sa survenue ou ralentit sa progression. Ce ne serait d'ailleurs pas la seule action neurologique de l'activité physique. Les régions de l'hippocampe, cortex moteur, pédoncules cérébraux, cervelet seraient toutes sensibles à l'exercice physique qui peut freiner l'altération ou la perte neuronale. L'amélioration de l'oxygénation du cerveau par une pratique régulière a un effet probant chez les personnes âgées au niveau de la capacité de réaction, de la mémoire et du raisonnement. D'une manière générale, l'activité physique réduit l'anxiété de la population et diminue le niveau de dépression.
Parmi leurs recommandations, les experts préconisent d'inciter les gens à faire de l'exercice physique même au sein du monde du travail. L'entreprise doit pouvoir développer des espaces sur le lieu et le temps de travail pour soutenir et encourager ses salariés. En Suisse, certaines mutuelles accordent déjà des bonus à ceux qui pratiquent l'exercice physique et certaines compagnies vont jusqu'à rembourser partiellement des abonnements dans des salles de sport. L'exercice physique fera-t-il de plus en plus partie de la prescription ? Le rapport recommande de mieux promouvoir la dimension préventive et thérapeutique de l'activité physique.
Dyspnée et BPCO
L'activité physique est considérée comme l' outil thérapeutique le plus performant dans le traitement de la dyspnée et de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), la maladie respiratoire des fumeurs, dont la prévalence est galopante (troisième rang mondial des maladies mortelles en 2020). Il semble qu'elle puisse également jouer un rôle dans la prévention de cette maladie ou de ses complications.
L' asthme n'est plus une contre-indication à la pratique sportive. Au contraire, l'activité physique doit être largement recommandée chez les asthmatiques.
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