DANS UN CONTEXTE de «bouillonnement» d'expériences d'ETP, conduites par différents établissements de santé et centres financeurs (unions régionales de l'assurance-maladie, MSA), la HAS tente d'en établir les bases. Un « guide méthodologique de l'éducation thérapeutique du patient » a été édité à la fin 2007 (www.has-sante.fr). Il définit les objectifs de cette approche soignants-patient qui permet à «enfant, adolescent, ou adulte atteint d'une maladie chronique» d'acquérir des compétences utiles pour mieux comprendre et gérer au quotidien sa maladie, «quels que soient son stade et son évolution». Une méthode en passe d'être généralisée et dont l'efficacité a déjà été démontrée (meilleure observance des traitements, meilleure hygiène de vie, réduction des crises, des recours à l'urgence).
A ne pas confondre, ni restreindre, à l'apprentissage de gestes techniques ou à la simple information du patient sur sa maladie et son traitement, l'ETP doit devenir «une étape à part entière» dans la pratique médicale, qu'il n'est pas souhaitable de voir «improvisée», explique le Dr Olivier Obrecht, responsable du service Affections de longue durée et accords conventionnels à la HAS. Elle repose sur la formation et l'engagement du généraliste et d'une équipe multiprofessionnelle autour de lui, de la même manière qu'elle sous-entend une «participation active des patients».
Une approche à inscrire dans la durée (à l'image de la maladie chronique, qui accompagne un patient toute sa vie), mais dont l'analyse économique et organisationnelle par la HAS laisse aujourd'hui plusieurs points en suspens. L'impact «en fonction du patient, du médecin, ou du programme» sur les principales variables cliniques et de recours aux soins reste «flou», selon Fabienne Midy, chef de projet à la HAS. De même l'hétérogénicité des programmes, des montants des séances et du type de facturation (à la séance ou au forfait) «n'a pas permis une évaluation de l'augmentation du coût de la prise en charge de la maladie». Ces questions soulevées, reste à «coordonner l'offre sur le territoire» et garantir «une démarche souple», conclut Olivier Obrecht, qui puisse prendre en compte les patients qui souffrent d'une maladie chronique en France, soit 15 millions de personnes.
Et dans les faits ?
Après un « diagnostic individuel d'éducation thérapeutique » par le médecin traitant (45 minutes en moyenne), le patient est orienté vers un centre de santé où sont réunis des professionnels de santé (infirmier, ergothérapeute, podologue, psychologue, diététicien…). Ainsi, en milieu rural, à la maison de santé pluridisciplinaire de Saint-Amand (Nièvre) où exerce le Dr Michel Serin, généraliste, les personnes âgées à risque cardio-vasculaire, de même que les patients diabétiques, sont invités à s'exprimer et à participer au cours de trois séances de trois heures à intervalle de quinze jours. Depuis mai 2005, en groupes de cinq à dix personnes autour d'un éducateur, la maladie est abordée à l'aide de supports ludiques (sets de table récapitulatifs, « devoirs à la maison »…) d'une manière holistique : nutrition et diététique, activité physique, signes d'alerte, traitement, vécu de la maladie. Les patients, «sur la défensive au premier abord, repartent heureux», témoigne le Dr Serin. Il constate «qu'ils s'expriment mieux sans le médecin», que nombreux sont ceux qui viennent en couple, ou que d'autres achètent ensuite un appareil à tension. Autant d'implications qui, après les autres professionnels de santé, font du patient un partenaire. Une stratégie à valeur préventive que le Dr Serrin, «optimiste», veut voir comme un signe que «le système de santé commence à se structurer».
Offre de soins
Au coeur de l'ETP : un patient en phase de devenir «acteur de santé», qui va de pair avec la réflexion introduite en 2004 sur le rôle du médecin traitant, institué «garant du parcours de soins». Et Olivier Obrecht de rappeler que, si ce concept fait son chemin au niveau des mentalités, «il reste à lui donner un contenu» à l'échelle nationale.
Pour le Dr Jean-Louis Demeaux, généraliste à l'initiative du projet ETHICCAR (Evaluation de l'éducation individuelle et collective des patients à risque cardio-vasculaire en médecine générale), «l'identification et la reconnaissance de plusieurs temps de consultation» apparaissent comme une condition majeure à la «nécessaire appropriation par tous les médecins du principe de l'ETP». Laquelle ne saurait devenir une «sous-spécialité», mais doit s'inscrire dans la continuité de l'offre de soins.
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