BIEN QUE LE COMPORTEMENT du MoDem ait été fort peu lisible, le mouvement de François Bayrou, qui, au premier tour des municipales, a fait un score très inférieur à celui de la présidentielle, a beaucoup contribué à la clameur que la campagne a soulevée. L'électorat du MoDem se concentrant dans un petit nombre de villes, il était un peu partout en position d'arbitre sinon en capacité de vaincre. La démarche politique de M. Bayrou aboutit à l'échec de façon répétitive ; mais il a bu du petit lait quand il a vu combien son parti était sollicité par la droite, par la gauche et même par les communistes.
Ces municipales ont été largement dépolitisées ; les candidats ont éprouvé de vives difficultés dans leur évaluation de l'électorat. Un exemple : à Bordeaux, Alain Juppé a été élu avec une forte majorité dès le premier tour. Or, l'année dernière, les Bordelais n'ont pas voulu de lui comme député et il a été contraint de démissionner du gouvernement. Le message des électeurs semble dire qu'ils ne veulent pas de M. Juppé pour les représenter à l'Assemblée, mais qu'ils le considèrent comme un très bon maire. De même que les maires communistes sont très appréciés en région parisienne. De même que Gérard Coulomb, par exemple, a fait gagner le PS à Lyon parce que ses administrés sont satisfaits de son travail. Tout le poids de l'ancien ministre Dominique Perben, lui-même lyonnais, n'a pas eu raison du candidat socialiste.
LES PERDANTS NE DOIVENT PAS SE PLAINDRE MAIS EXALTER LA DEMOCRATIE
Les larmes de la défaite.
Il est vrai que le fossé entre la classe politique et les électeurs est très large. Pendant que les principaux partis mettaient au point de vastes stratégies, qui, pour beaucoup, ont d'ailleurs échoué, les votants, eux, semblaient souvent se moquer de la couleur des candidats. Ils exigeaient des gestionnaires efficaces, non seulement dans les hameaux, mais aussi dans les grandes villes. C'est ainsi qu'à Neuilly une guerre sans merci a jeté la droite indépendante contre la droite sarkozienne, puis contre la droite non sarkozienne ; et que, à Puteaux, le père a abreuvé d'injures sa propre fille. On nous rappellera que le phénomène n'est pas nouveau. Mais le contraste aura été remarquable entre des électeurs soucieux de ne donner un mandat qu'à ceux qu'ils jugent utiles et l'immense résonance médiatique des combats partisans. Certains candidats défaits se montrent même incrédules. Ils ne comprennent pas ce qui leur arrive ; ils s'interrogent sur les raisons de leur défaite alors qu'ils se croyaient munis d'un bilan favorable. Au-delà même de la gestion d'une ville, l'électeur tient tellement à sa liberté qu'il a parfois désavoué des sortants qui n'avaient pas démérité, mais dont les gens, tout simplement, s'étaient lassés. Ce n'est pas sans surprise que l'on a vu Fabienne Keller, maire de Strasbourg, pleurer à chaudes larmes parce que les Strasbourgeois seraient injustes à son égard. On ne l'accablera pas, mais on comprend la socialiste Catherine Trautmann, qui a rappelé qu'il lui est arrivé de perdre et qu'elle n'a pas pleuré.
On ne saurait mieux dire : est-il nécessaire de démontrer aux candidats que telles sont les rigueurs de la démocratie ? Non seulement ils ne sont assurés de rien, mais ils doivent prendre leur défaite, si illogique soit-elle, avec grâce. Autrement, ils finiront par nous faire croire qu'il existerait des mairies ficelées pour la durée, et presque pour l'éternité. Le pouvoir, Messieurs-Dames, est précaire. Il ne s'inscrit jamais dans le temps historique. Pour mieux l'exercer, il faut apprendre à s'en passer. Même Alain Juppé, qui n'est pas un modèle de sérénité quand le sort lui est funeste, a compris que l'accès au pouvoir est difficile et que le maintien d'un homme au pouvoir est un travail de tous les instants. On regrettera, bien sûr, les taux de participation des deux tours. On voit pourtant se dessiner deux courants, celui des abstentionnistes impénitents, qui augmente en général (pas en 2007), et la conviction impavide de ceux qui votent. Ils vont aux urnes avec détermination, avec fierté, avec cette certitude que leur vote compte très peu et énormément à la fois. Ensemble, comme dit l'UMP, tout est possible. Ensemble dans l'acte civique, et même si nous sommes tous l'adversaire de quelqu'un, nous perpétuons la démocratie.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature