ELLE EST RÉDIGÉE, il ne reste plus qu'à la poster. La Fédération des maladies orphelines (FMO) a décidé d'adresser au plus haut représentant de l'Etat une lettre ouverte. Prenant au mot le président de la République lors de son allocution du 22 avril dernier ( «La France dont je rêve est une France qui ne laisse tomber personne»), la FMO compte diffuser ce courrier dans la presse. Un autre sera envoyé aux députés, les incitant à solliciter la ministre de la Santé.
La FMO rassemble une centaine d'associations. Quatre millions de personnes sont concernées, insiste-t-elle, c'est quatre fois plus que les patients atteints d'Alzheimer. «Le plan Maladies rares a été pour nous un formidable élan d'espoir, dit Olivia Niclas, la présidente de la FMO . Nous avons collaboré activement et nous en sommes très fiers, mais on nous laisse entendre aujourd'hui qu'il n'y aurait pas de deuxième plan. Ce qui revient pour nous à dire que nos espoirs ne seraient pas concrétisés, les promesses non tenues.»
La création des 132 centres de référence constitue la mesure phare du plan 2005-2008. Mais leur application réclame de nombreux ajustements. Leur accès, d'abord, doit être amélioré, et ce grâce à une meilleure information de tous sur l'existence de ces centres. «Les généralistes ne sont pas forcément bien au courant, témoigne Valérie Bernard, présidente de l'association de Behçet. Et puis, «l'avis de ces centres n'est jamais pris en compte», renchérit Fabrice Barcq, président de APTES, l'Association des personnes concernées par le tremblement essentiel (voir encadré).
«Les médecins d'un centre pourront toujours indiquer noir sur blanc que tel patient nécessite un macaron orange [donnant droit à des places de stationnement réservées, NDLR] , la maison départementale du handicap pourra refuser la demande en invoquant que la personne n'est pas handicapée à 80%.» Ou encore les spécialistes du centre reconnaîtront qu'une mère a dû quitter son emploi du fait de la maladie de son enfant, mais elle n'obtiendra aucune compensation pour perte de salaire. «Ces centres manquent d'une réelle autorité. Et ça, ça se décrète, donc il faut passer par une forte volonté politique», résume Gilles Boustany, directeur général de la fédération. «La création de ces centres est une très bonne chose, mais notre situation est comparable à une partition de musique qui aurait été écrite pour dix instruments. Seule l'oreille avertie se rend compte que neuf sont défaillants. Pour nous, ces centres de référence ne cachent pas toutes les lacunes», insiste Olivia Niclas.
Errance administrative.
Une meilleure connaissance de l'épidémiologie des maladies rares faisait l'objet de l'axe numéro un du plan. «Nous n'avons là-dessus aucun retour, affirme Mme Niclas. On nous parle des études réalisées sur la mucoviscidose ou l'hémophilie mais ces initiatives-là étaient déjà dans les tuyaux, avant le plan.»
S'agissant de la recherche, l'argent aurait été affecté correctement. «Cependant, on nous laisse entendre que, dès cette année, on n'enregistre plus d'appels d'offres. Pour nous, et aussi pour de nombreuses personnes, chevilles ouvrières dans ce processus, la baisse d'intérêt est réelle et significative.» Certaines choses se seraient même aggravées, notamment dans la vie quotidienne des malades et de leur entourage : les démarches administratives seraient alourdies, les allocations de plus en plus difficiles à obtenir. «Trop souvent, nous n'entrons pas dans les cases», déplore Fabrice Barcq. «L'errance diagnostique, déjà trop longue [de sept ans en moyenne pour les maladies rares] , se poursuit par l'errance administrative, soupire Mme Bernard. Encore aujourd'hui, il arrive que, en consultation, nos interlocuteurs ne savent pas ce qu'est Orphanet* ou qu'un médecin-conseil de la Sécu n'ait jamais entendu parler du plan.»
«On ne peut pas avoir laissé ces 4millions de personnes monter dans le bus pour maintenant les abandonner sur le bord de la route.» La FMO réclame donc un deuxième plan, qu'on l'appelle «d'amélioration» ou «de concrétisation» du premier pour suivre et renforcer la prise en charge des maladies rares, ainsi que pour plus de clarté sur les choses réalisées, «bien que ce soit une figure de style, confie Olivia Niclas. On ne veut pas de cette autosatisfaction, totalement en décalage avec la réalité. Il est temps de réclamer des comptes sur les neuf points non mis en oeuvre.» Sur le site de la fédération, un bandeau affiche le décompte des jours précédant le 31 décembre 2008, qui sonne pour la FMO la mort de ce plan porteur d'espoir. Il est téléchargeable, ainsi que la pétition qu'il invite à signer.
www.maladies-orphelines.fr.
* Portail européen sur les maladies rares et les médicaments orphelins, créé en 1997 par l'INSERM et la Direction générale de la santé.
7 000 maladies rares
Sept mille maladies rares sont identifiées. Une cinquantaine de maladies rares touchent chacune quelques milliers de personnes en France, alors que cinq cents autres n'en atteignent que quelques centaines... et des milliers d'autres ne concernent que quelques dizaines de personnes. En France, 15 000 personnes sont atteints de drépanocytose, 8 000 malades de sclérose latérale amyotrophique, de 5 000 à 6 000 de mucoviscidose, 5 000 de myopathie de Duchenne, de 400 à 500 malades de leucodystrophie, quelques cas de progeria, ou vieillissement précoce.
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