Médicaments déremboursés au 1er janvier

Des hausses de prix souvent importantes qui pénalisent les patients

Publié le 14/01/2008
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LES VEINOTONIQUES, qui avaient vu leur taux de remboursement par l'assurance-maladie passer de 35 à 15 % en 2006, ont été totalement déremboursés depuis le 1er janvier dernier. Une situation qui fait suite à une décision prise en 2006 par Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, et motivée par un avis de la Haute Autorité de santé qui avait à l'époque jugé leur SMR (service médical rendu) insuffisant.

La semaine dernière, l'un des principaux syndicats de pharmaciens, la FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France), jetait un pavé dans la mare en dénonçant la hausse des prix de ces mêmes médicaments (parfois plus de 30 %) depuis leur déremboursement total. En France, on sait que les industriels peuvent fixer librement le prix des médicaments non remboursés, et que ces médicaments voient, à l'occasion de leur déremboursement, leur taux de TVA passer de 2,1 à 5,5 %. Selon la FSPF, ces hausses de prix mettraient «le pharmacien dans une situation intenable vis-à-vis de ses patients», qui seraient ainsi pris en tenaille entre la fin du remboursement et la hausse du prix de ces médicaments.

Inquiétudes.

Président de la commission économie d'officine à la FSPF, Philippe Besset assure que le rôle des pharmaciens est «d'alerter les laboratoires et les pouvoirs publics sur l'urgence de remettre un peu de bon sens dans le prix des médicaments».

Car les chiffres fournis par la FSPF parlent apparemment d'eux-mêmes. Le veinotonique le plus prescrit était jusqu'au 31 décembre vendu en officine à 5,51 euros en moyenne. Son prix recommandé par la FSPF est aujourd'hui passé à 7,52 euros, ce qui correspond à une hausse de plus de 35 %, «à marge officinale égale en pourcentage à ce qu'elle était auparavant», assure Philippe Besset. Mais, dans certaines pharmacies, on peut le retrouver à plus de 8,50 euros. Un antihémorroïdaire local a vu son prix public progresser de près de 85 %. Mais pour Philippe Besset, cette situation n'a rien de nouveau. «Lors des précédentes vagues de déremboursement, indique-t-il, certains collyres sont passés de moins de 2euros à plus de 5 euros». La FSPF appelle en conséquence de ses voeux une loi du type de celle qui avait été adoptée pour le prix unique du livre, «afin d'homogénéiser les prix en officine», indique Philippe Besset qui ajoute que «si certains veinotoniques restent aussi chers, nous serons amenés à proposer d'autres médicaments aux patients».

Car certains d'entre eux commenceraient à réagir. Un pharmacien d'Issy-les-Moulineaux, en région parisienne, dans une ville pourtant à fort pouvoir d'achat, assure que des patientes commencent à refuser d'acheter un veinotonique en raison de son prix.

Chez les médecins, certains vont encore plus loin. Généraliste à Saint-Denis, dans une tour de la cité du Franc-Moisin (93), le Dr Didier Ménard n'a pas attendu le déremboursement total des veinotoniques pour quasiment cesser de les prescrire : «Au début du passage au taux de remboursement de 15%, j'en prescrivais encore, mais je me suis vite rendu compte que mes patients se censuraient eux-mêmes en ne les demandant plus au pharmacien, en raison de leur coût.» Le Dr Ménard a essayé de convaincre ses patients ayant des problèmes veineux de passer aux bas de contention, «mais ça n'est pas donné non plus», dit-il. Il craint surtout les conséquences à long terme de cette nouvelle donne en matière de veinotoniques : «Si vous additionnez la fin du remboursement, la hausse de ces médicaments, dont le prix est devenu libre, et les franchises sur les boîtes de médicaments, au total, il y a des personnes, parmi les plus défavorisées, qui vont renoncer aux soins. Economiquement, c'est absurde, car les douleurs aux jambes vont s'accentuer, provoquer d'autres pathologies associées, et ces patients vont finir à l'hôpital. Ce sont des économies de bout de chandelle, alors que dans le même temps on engloutit pour rien des sommes considérables dans le DMP.»

De son côté, Christian Lajoux, président du LEEM (Les Entreprises du médicament), a assuré que la grande majorité des laboratoires concernés par les récents déremboursements avaient fait preuve de «modération».

«Je ne voudrais pas, explique- t-il, qu'un exemple isolé puisse laisser le sentiment que la profession ne respecte pas ses engagements sur ce point.»

Au ministère de la Santé, on indique que Roselyne Bachelot a envoyé à la fin décembre un courrier aux laboratoires pharmaceutiques comme aux pharmaciens, pour leur demander d'être «attentifs aux prix». Mais l'entourage de la ministre reconnaît que «quelques labos n'ont pas joué le jeu».

> HENRI DE SAINT ROMAN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8289