Coopération sanitaire franco-belge

Les patients de la zone frontalière pourront choisir un hôpital du pays voisin

Publié le 22/11/2007
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

APRÈS QUINZE ANNÉES de discussions et de pourparlers entre les autorités sanitaires des deux pays, la coopération transfronta-lière franco-belge va enfin devenir une réalité. Dès janvier 2008, les habitants de la zone frontalière pourront se faire soigner indifféremment dans les hôpitaux français de Roubaix, de Tourcoing, de Wattrelos ou dans l'établissement belge de Mouscron, et cela sans entente préalable et sans préjudice financier. Une petite révolution.

Des années de négociations et de réunions.

Il a fallu une bonne dose de patience aux initiateurs du projet Transcards pour faire aboutir leur idée… Des années de négociations et de réunions entre tous les partenaires concernés, de part et d'autre de la frontière.

«Des partenariats spécifiques existent déjà entre certains établissements belges et français. Mais dès que l'on veut généraliser le système à l'ensemble des hôpitaux d'une région, sans entente préalable, la coopération devient très complexe», explique Jean-Philippe Willem, chargé d'analyses stratégiques au centre hospitalier de Roubaix.

La difficulté tient notamment à la différence de couverture sociale entre patients belges et français. En Belgique, les consultations en ambulatoire n'ouvrent pas droit au tiers payant, alors que, en France, le patient ne paie que le ticket modérateur.

Pour permettre aux Français de garder ces conditions de prise en charge même lorsqu'ils consultent dans un hôpital belge, il a fallu adapter le système de facturation… De même, les mutuelles belges se substituent au régime obligatoire pour le règlement des frais engagés alors qu'en France elles ne prennent en charge que l'assurance complémentaire. Autant de différences qui expliquent la complexité du dossier.

Aujourd'hui, Transcards est enfin opérationnel, même si la ratification finale est en suspens pour cause d'absence de gouvernement en Belgique.

Premiers patients en janvier.

En octobre, une centaine d'a-gents de la Sécurité sociale française et belge se sont formés au dispositif. Ce mois-ci, ce sont les agents des quatre hôpitaux concernés qui sont initiés au nouveau système. Et dès janvier 2008, les premiers patients pourront passer la frontière pour se faire soigner à l'hôpital de leur choix, en Belgique ou en France.

«Le bassin de population concerné représente 400000habitants, ce qui estassez conséquent. Mais nous ignorons pour l'instant les flux que cet accord va engendrer, souligne Jean-Philippe Willem. Dans les spécialités déficitaires comme l'ophtalmologie, on peut s'attendre à un afflux de français en Belgique. De même, la scintigraphie développée à Mouscron risque d'attirer les patients. Mais on ne mesure pas bien les réactions des assurés face à cette possibilité qui leur sera offerte.» Autre inconnue : la réaction des médecins traitants. Tous ont reçu un document détaillé précisant les ressources médicales de chaque établissement afin de leur faciliter l'orientation des malades vers le service ad hoc. Il faudra sans doute un peu de temps pour que l'habitude du travail en réseau s'installe de part et d'autre de la frontière.

«Lorsqu'un accord de coopération marche, les échanges se développent très vite», assure, confiant, le responsable roubaisien. Réponse en 2008.

Des précédents

A Tourcoing, la coopération transfrontalière est déjà effective depuis de nombreuses années.

L'expérience a démarré avec la dialyse : faute d'unité spécialisée, l'hôpital Dron adresse ses patients français à l'hôpital de Mouscron. Une cinquantaine d'insuffisants rénaux suivent chaque semaine leur dialyse outre-Quiévrain.

A l'inverse, l'hôpital belge adresse à son homologue français ses patients atteints du VIH... Echange de bons procédés.

En matière d'imagerie, les praticiens belges ont accès à l'IRM tourquennoise tandis que les Français peuvent envoyer leur patients à Mouscron pour une scintigraphie.

Depuis quelques années, l'hôpital accueille même des praticiens belges dans son service d'urologie : «Nous ne parvenions pas à recruter un urologue, explique le Dr Michel Chenaud, président de la CME. Du coup, nous avons fait appel à nos collègues belges.»

Deux urologues travaillent à mi-temps à Tourcoing, ce qui a permis de ne pas fermer le service. «En Belgique, le statut de PH n'existe pas... Ce qui constitue encore un frein à la mobilité. Nos deux confrères ont du passer le concours de PH pour venir travailler chez nous.»

Transfrontalier avant l'heure, le CH de Tourcoing se réjouit de l'extension des coopérations. «Dans une période de restriction budgétaire, on a tout intérêt à éviter de multiplier les appareils coûteux et les techniques spécialisées. Si l'on peut mettre en commun nos équipements, c'est au bénéfice de tout le monde», explique-t-on.

> FLORENCE QUILLE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8263