ILS SONT CINQ à entrer en piste. Le ciel est avec eux, ce jour-là, un beau soleil inonde les carrières du Grand Parquet de Fontainebleau.
Elise, Jonathan, Victoria, Enora et Laurie sont venus des quatre coins de France pour présenter devant leurs familles et autres visiteurs du rassemblement hippique de la région parisienne une démonstration de dressage.
Pour apprendre à faire faire des déplacements latéraux à leur cheval et exécuter une révérence, ils ont passé un week-end de répétition à Blois chez Frédéric Sanabra, dresseur et cascadeur professionnel, puis deux jours de répétition à Fontainebleau. «Ils ne sont ni impressionnés ni stressés, commente un membre de l'association, mais simplement supercontents.»
Ces cinq jeunes cavaliers sont tous gravement malades et suivis par l'association Petits Princes. Ce qu'ils ont accompli ce jour-là représentait pour l'association le 3 000e rêve qu'elle aide à concrétiser, à l'occasion de son vingtième anniversaire.
Pas un, mais des rêves.
Depuis qu'elle a pris sa retraite il y a quatre ans et demi, le Dr Janine Lefèvre a rejoint l'équipe des Petits Princes. «Bénévole rêves», elle accompagne les enfants dans la «fabrication» puis la réalisation de leurs rêves.
Un rêve réussi, décrit-elle, «c'est bien celui de l'enfant et non celui de ses parents. Il faut parfois l'aider à bien cibler son souhait car il n'est pas toujours tout à fait sûr de ce qu'il veut». La préparation du rêve est d'ailleurs la phase la plus importante.
L'association ne se borne pas à la réalisation d'un seul rêve, puisqu'elle cherche à accompagner l'enfant tout au long de sa maladie. «Le rêve est le point de départ de la relation avec le Petit Prince et sa famille», précise le Dr Augustin d'Avout, qui exerce dans un centre de rééducation fonctionnelle et qui a rejoint l'équipe des bénévoles il y a quatorze ans. «C'est le suivi de l'enfant malade qui m'a intéressé chez Petits Princes. Nous essayons de réaliser un projet chaque fois que l'enfant ne va pas bien. On est toujours présent.» Ainsi, l'association Petits Princes prend des nouvelles des familles et sollicite les équipes médicales pour choisir le moment le plus opportun pour intervenir auprès de l'enfant.
«Nous essayons de “caler” un rêve avant une opération lourde, pénible, si ne n'est pas contre-indiqué. Ou bien les hôpitaux nous contactent, explique le Dr Lefèvre , quand ils se rendent compte que l'enfant a besoin d'être soutenu. Les parents, parce que trop accaparés par la maladie, n'ont pas toujours le courage ou même l'idée de penser aux rêves de leur enfant.»
Enora, qui est montée à cheval ce dimanche-là, était déjà partie à la rencontre des dauphins aux Açores, il y a trois ans, et des orques et des requins, l'an passé.
Des vocations sont nées au cours de la réalisation de ces projets. Mircea, passionné de dessin et de stylisme, a pu réaliser un stage chez un grand couturier ; il en fait aujourd'hui son métier. Théo, quant à lui, s'est vu ouvrir les portes de la grande cuisine, qu'il exerce aujourd'hui.
Des étoiles plein les yeux.
Les deux médecins bénévoles interviennent aussi dans la sélection des dossiers. La majorité des enfants sont suivis en hémato-oncologie. «On ne peut pas prendre les enfants qui ne sont pas assez communicants», explique le Dr Lefèvre. «Nous ne sommes pas capables de gérer les maladies psychiatriques avec troubles du comportement», ajoute le Dr d'Avout. En revanche, «il n'y a pas de petits et de grands rêves. Ce qui compte, c'est le moment de bonheur, ce sont les étoiles dans les yeux des enfants».
Les familles, et notamment les frères et soeurs, «un peu les grands oubliés», sont le plus souvent impliquées dans la réalisation des rêves du Petit Prince. «L'enfant malade culpabilise et peut se considérer comme le gêneur dans une famille, c'est lui qui complique les départs en vacances, par exemple. En entraînant sa famille dans des projets qui sont parfois très impressionnants, il est valorisé, il devient quelqu'un d'important. Et il a quelque chose d'extraordinaire à raconter aux copains», souligne le Dr Lefèvre.
Le rêve permet donc aux petits une projection dans l'avenir, «envisager autre chose que le traitement et les quatre murs de l'hôpital», témoigne encore le Dr Xavier Rialland, du service d'oncologie pédiatrique du CHU d'Angers. C'est aussi, lorsque le rêve est collectif, comme il l'a été à Fontainebleau, l'occasion pour les enfants réunis par un même centre d'intérêt, et pas seulement par la maladie, de se renvoyer les uns aux autres une image de soi plus positive.
L'association Petits Princes a besoin de bénévoles pour suivre les enfants et mettre en place leurs rêves.
www.petitsprinces.com, tél. 01.43.35.49.00.
A la rencontre du père Noël
L'association Petits Princes peut se targuer d'avoir permis, en 2007, la réalisation de plus de 200 rêves, soit un tous les deux jours.
Parmi les rêves réalisés en vingt ans, certains feraient pâlir d'envie les adultes bien portants : visiter les volcans avec Haroun Tazieff, partir à la recherche des ours blancs sur la banquise, visiter la NASA.
Thibault (10 ans) a rencontré le père Noël en Laponie, Raphaël (9 ans) a nagé avec les dauphins. Léa, Paul, Alexandre et Antoine ont visité des sites archéologiques en Égypte. Corentin (5 ans) a conduit un camion poubelle avant de récidiver aux commandes d'un TGV l'an passé.
«Si vous saviez le bonheur que cela fait d'oublier sa maladie quelques instants, de croire qu'on est meilleur que les autres, de croire que l'on peut se battre, de savoir que l'on peut être heureux et survivre!», témoigne Audrey, 16 ans. «Je ne me reconnais plus depuis que je rigole», avoue Hélène, 11 ans.
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