LA CAISSE nationale d'assurance-maladie (CNAM) vient de rendre publique une étude comparative sur les pratiques françaises et européennes en matière de consommation et de dépense de médicaments. Cinq pays ont été analysés (la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni), à travers neuf classes de médicaments : les antidiabétiques oraux, les antibiotiques oraux, les anti-asthmatiques, les hypocholestérolémiants, les produits de l'hypertension artérielle, les antidépresseurs, les tranquillisants, les IPP (inhibiteurs de la pompe à protons) et les antalgiques non narcotiques. Ces neuf classes représentent près de 40 % des dépenses totales de médicaments remboursés par le régime général, soit 8 milliards d'euros.
Premier enseignement de cette étude : la France est en tête de la consommation en volume pour six des neuf classes étudiées (antidiabétiques, antibiotiques, hypocholestérolémiants, antidépresseurs, tranquillisants, et antalgiques). Quant aux dépenses, la France se place au premier rang dans cinq cas sur neuf (les hypocholestérolémiants, les produits de l'hypertension artérielle, les IPP et les antalgiques) et au deuxième rang pour les quatre autres.
Mais surtout, précise la CNAM, «la France apparaît comme le pays le plus dispendieux avec le montant moyen par habitant le plus élevé des cinq pays analysés pour l'ensemble de ces neuf classes: 130euros par an, soit 32euros de plus que l'Italie», arrivée deuxième de ce palmarès. Autre exemple mis en avant par l'assurance-maladie : sur trois classes déterminées (les IPP, les statines et les hypertenseurs), le différentiel de consommation avec l'Allemagne atteint 1,5 milliard d'euros par an.
Quant aux raisons de cet état de fait, elles seraient dues, selon l'assurance-maladie, à «des volumes de consommation élevés, mais aussi à des coûts moyens de traitement plus élevés que dans les autres pays, induits par une structure de consommation différente» qui fait que «les produits les plus récents et les plus chers occupent une place prépondérante au détriment de molécules plus anciennes et souvent génériquées».
Pour Frédéric van Roekeghem, directeur de la CNAM, «la France est un pays de cocagne, beaucoup moins contraignant en matière de consommation de médicaments que les autres pays européens». Il précise en outre que les voisins analysés «ont des autorités de régulation qui émettent des recommandations médico-économiques très suivies, car présentes depuis plus longtemps que chez nous». Pour Frédéric van Roekeghem, il y a, en outre, «une culture de prescription plus économe dans d'autres pays qu'en France, et une culture des patients différente».
Sur la question de savoir si l'industrie pharmaceutique aurait une part de responsabilité dans les niveaux de consommation français, le directeur de la CNAM note tout d'abord que «l'industrie pharmaceutique est mondiale» mais se demande malgré tout si «face à la logique commerciale, notre dispositif de régulation est suffisamment efficace?»
HTA : les dépenses flambent en six ans
En France, selon les chiffres de l'assurance-maladie, près d'un adulte sur cinq est traité pour hypertension artérielle, soit environ 10,5 millions de personnes.
En six ans, le nombre de patients traités a augmenté de 2 millions sous la poussée conjuguée de l'accroissement et du vieillissement de la population, de l'allongement de la durée de vie, de la progression de pathologies, comme l'obésité et le diabète, et de l'amélioration de la prise en charge des malades.
Aujourd'hui, 61 % des patients sont traités avec plusieurs classes de médicaments (contre 55 % en 2000), 45 % des hypertendus consomment des hypolipémiants (contre 36 % en 2000), et 17 % d'entre eux consomment des antidiabétiques (contre 14 % en 2000).
Ce mouvement entraîne une hausse importante des dépenses : 4,4 milliards d'euros ont été dépensés en 2006 contre 2,6 en 2000, soit une hausse d'environ 54 %.
Compte tenu de ces chiffres, les médecins-conseils de l'assurance-maladie rencontrent depuis septembre les médecins généralistes pour les sensibiliser à cette question : comme le préconise la Haute Autorité de Santé (HAS), les traitements devraient reposer sur une très large utilisation des génériques et sur la prescription des nouveaux hypertenseurs (plus onéreux) «prioritairement en seconde intention».
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