NICOLAS SARKOZY est très encouragé par la réussite de l'opération Strauss-Kahn. On répète partout qu'il a, de cette manière, écarté un rival dangereux pour 2012, mais l'intéressé affirme qu'il ne ferme pas la porte à une éventuelle candidature à la présidence, même s'il est probable que son éloignement finira par le disqualifier.
En réalité, on prête au chef de l'Etat plus de machiavélisme qu'il ne peut en avoir. Il veut, et avec raison, abattre ces barricades qui ont fait, en France, une guerre civile du combat politique. Il souhaite, comme il ne cesse de le répéter, mettre au pouvoir les grands talents pour autant que leurs convictions ne soient pas incompatibles avec sa propre feuille de route. Si le comportement des Kouchner et des Martin Hirsch a donné lieu, à droite et à gauche, à des commentaires goguenards, l'élection de Dominique Strauss-Kahn au FMI est inattaquable. Elle montre en effet que la France a délégué à une institution internationale encore prestigieuse ce qu'on appelait naguère un grand commis de l'Etat. Elle a été conduite grâce à une belle harmonie de vues entre M. Sarkozy et M. Strauss-Kahn. Elle constitue l'exemple parfait de ce que droite et gauche peuvent faire ensemble. Elle rassure au sujet de la renommée de notre pays.
La liberté des ministres.
Les leaders du PS, tout en se félicitant de l'élection de DSK au FMI, établissent un bilan extrêmement négatif de la politique d'ouverture. Ils montrent que les ministres venus de la gauche n'ont pas d'influence sur la politique du gouvernement ; Ségolène Royal vient de se livrer, dans « le Monde », à une charge contre la nouvelle diplomatie française en tentant de montrer que M. Sarkozy fait souvent ce qu'il lui reprochait de faire pendant la campagne électorale. Il faut bien que le combat politique se poursuive. Mais, franchement, la démonstration des socialistes n'est pas convaincante. Les petites rebellions ne viennent pas toutes de ministres de gauche : Rama Yade et Rachida Dati sont deux exemples de caractères énergiques décidés à être eux-mêmes. Ces deux femmes s'expriment haut et fort, mais en même temps leur allégeance à M. Sarkozy ne date pas de la formation du gouvernement. Ce qui signifie que les incohérences, il est vrai fréquentes, que l'on décèle au sein du pouvoir, par exemple la « rigueur » de Christine Lagarde ou la « faillite » de François Fillon, prouvent simplement que notre régime n'est pas totalitaire. En même temps, il ne nous semble pas que ces dérapages sémantiques qui n'en sont pas vraiment modifient en profondeur la gestion des dossiers : rappelons-nous dans quelles conditions le mot guerre a été prononcé par M. Kouchner, en réponse à une question de relance et comment le plus superficiel des journalismes a fait faire le tour du monde à ce mot ; rappelons-nous que faillite est le mot lancé par M. Fillon à des agriculteurs corses qui lui réclamaient encore plus de subsides.
Lundi soir, sur France 2, Elisabeth Guigou pourfendait la politique économique et sociale du gouvernement, mais Jacques Attali qui, avec un groupe d'experts, prépare un rapport sur les moyens de réduire la dette et les déficits sans freiner la croissance, mettait tout le monde d'accord en affirmant avec force la nécessité du désendettement et en dénonçant deux décennies de gestion marquées par les aberrations : par exemple une décentralisation qui a ajouté de nouvelles strates administratives à celles qui existaient déjà ; de sorte que les collectivités locales ont embauché à tout va, ont dépensé à tout-va, sans que les fonctionnaires des administrations centrales aient perdu leur emploi.
LE TEMPS DE LA PRUDENCE EST FINI; VIVE LE PARLER-VRAI!Le sarkozysme est imparfait.
M. Strauss-Kahn, qui aurait pu être le candidat du PS, ne risque pas de nier la perversité d'un endettement destiné à boucler le budget et à payer des dépenses courantes, non à mettre de l'argent au service de la croissance.
Bien entendu, le sarkozysme n'est pas parfait : la gauche n'a pas tort de critiquer des allègements fiscaux (par exemple sur les heures supplémentaires) dont l'impact sur l'activité économique sera mineur ; ni de constater, comme nous-mêmes dans ces colonnes, que le projet de budget manque pour le moins d'audace en ce qui concerne les déficits et la dette.
Mais il est beaucoup trop tôt pour rejeter en bloc une politique qui n'est en place que depuis quatre mois et dont l'ouverture, précisément, est le plus beau fleuron. Il n'est pas juste de nier la dynamique que M. Sarkozy a donnée au pays ou de l'attribuer à une pure gesticulation.
Le chef de l'Etat a tout à fait raison de parler de « révolution culturelle ». Nous dirions pour notre part « révolution des mentalités ». Vouloir conserver ad aeternam des avantages acquis, c'est du conservatisme pur ; empêcher le travail le dimanche au nom de la tradition, c'est empêcher des créations d'emplois dans un pays qui en a furieusement besoin ; «travailler plus pour gagner plus» n'est pas qu'un slogan, c'est la vérité absolue dès lors que, tous les économistes vous le diront, c'est le travail qui crée des richesses et du pouvoir d'achat, contrairement à ceux qui croient encore que la semaine de 35 heures est une grande avancée sociale.
Provoquer plus.
M. Sarkozy n'est pas encore allé au bout de son programme, il s'en faut. Et pour tous ceux dont les oreilles tintent dès qu'il ouvre la bouche, nous ajouterons qu'il devrait multiplier les provocations : reconnaître par exemple que le programme Douste-Blazy-Bertrand de redressement de la Sécurité sociale a échoué et que les franchises (dont on pourrait simplifier le fonctionnement) serviront non pas à protéger les Français contre les maladies du vieillissement mais à renflouer partiellement les caisses de la Sécu ; qu'il va falloir, en 2008, mettre à plat nos sytèmes de protection sociale et trouver des financements pour les équilibrer ; que nous devons non pas nous contenter de financer la dette, mais la réduire pour diminuer du même coup son financement ; et que, malgré les chuchotements indignés de nos diplomates professionnels, il est rafraîchissant que Bernard Kouchner dise ses quatre vérités à Moscou, à Khartoum, à Téhéran ou à d'autres. On sait où les prudences d'il y a peu, prudences sociales ou diplomatiques, nous ont conduits : à perdre notre rang économique et une partie du rayonnement français.
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