Utérus cicatriciel : une femme sur deux accouche par voie basse

Publié le 30/05/2007
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CÉSARIENNES et myomectomies représentent les principales origines des utérus cicatriciels, très loin devant les autres gestes endo-utérins de type plasties utérines ou leurs complications. Elles concernent un nombre non négligeable de femmes, comme l'attestent les chiffres disponibles : 20 % des accouchements effectués par césarienne en France et 4 901 myomectomies associées à un diagnostic de fibromyome pratiquées en 2001, selon les données Pmsi. «Il existe également des petites cicatrices qu'on ne considère pas aujourd'hui comme des facteurs de risque importants de rupture utérine», comme les perforations après curetage ou à l'occasion d'une hystéroscopie, ajoute le Pr Subtil. Une notion qui doit être connue car «tout tourne autour de la rupture de l'utérus». Cet événement est, en effet, le risque majeur en cas d'utérus cicatriciel.

Alors que la rupture utérine est exceptionnelle sur un utérus sans cicatrice (de l'ordre d'environ 1/50 000 à 1/100 000), dès qu'une césarienne a été réalisée, sa fréquence augmente de façon significative. «Dans les pays industrialisés, on arrive à 0,5% de désunion de la cicatrice découverte par hasard lors de la réalisation de la césarienne avant travail.» Le chiffre atteint 1 % de désunion et de rupture chez les femmes autorisées à accoucher par voie basse et 2 % en cas de déclenchement. Comme le résume le Pr Subtil, «si on programme un accouchement par voie basse, on double le risque; on le quadruple en cas de déclenchement». Heureusement, «neuf fois sur dix, ces ruptures utérines sont bénignes et, parfois, passent même inaperçues». Dans d'autres cas, elles se manifestent uniquement par des hémorragies ou des anomalies peu sévères du rythme cardiaque foetal. Les 10 % de cas graves se traduisent par des hémorragies maternelles et, chez l'enfant, par la création d'un vol vasculaire avec des troubles du rythme brutaux et sévères, ainsi qu'une hypoxie foetale en rapport avec l'hémorragie. Beaucoup plus rarement, la déchirure peut se prolonger au-delà de l'utérus, entraînant une rupture de la vessie ou des organes avoisinants.

Une attitude consensuelle.

La conduite à tenir chez une femme enceinte avec un utérus cicatriciel fait généralement l'objet d'un consensus selon lequel il n'est pas raisonnable de proposer un accouchement par voie basse à une femme ayant eu deux césariennes antérieures, compte tenu du risque de rupture utérine trop important qu'il fait courir (environ 5 % {1, 2}). En revanche, après une seule césarienne, «on peut autoriser la voie basse, à condition que la cicatrice utérine soit segmentaire transversale ou longitudinale et, bien sûr, que l'indication de la première intervention ne persiste pas», comme c'est le cas, par exemple, du bassin rétréci. Dans la pratique, poursuit le Pr Subtil, «on propose la voie basse à 60-70% des femmes qui ont eu une césarienne, et, au total, 50% des patientes qui ont accouché antérieurement par césarienne vont effectivement accoucher par cette voie».

Les recommandations pour la pratique clinique (2) précisent trois autres points : d'une part, «la radiopelvimétrie n'est pas nécessaire pour apprécier les possibilités d'accouchement par voie basse», d'autre part, «aucun examen ne permet à ce jour d'apprécier la solidité de la cicatrice utérine», et, enfin, «la notion d'infection dans les suites d'une césarienne n'est pas une contre-indication à un accouchement par voie basse». Concernant l'utilisation des ocytociques, les experts estiment que l'utérus cicatriciel ne constitue pas en soi une contre-indication, «bien qu'il existe une augmentation modérée du risque de rupture utérine». L'analgésie péridurale n'est pas non plus contre-indiquée dans ces circonstances. Quant à la révision utérine, après avoir été réalisée durant de nombreuses années, son caractère systématique en cas d'accouchement par voie basse a été contesté. «On s'est aperçu qu'il était inutile de faire une révision chez une femme asymptomatique, et ce d'autant qu'elle révélait parfois une petite rupture pour laquelle l'indication d'une réparation n'était pas évidente», justifie le Pr Subtil.

Par ailleurs, après une myomectomie, «il est toujours difficile de savoir si la femme peut accoucher par voie basse». Chaque fois que cela est possible, la décision est prise après avis du chirurgien qui a effectué l'intervention.

Complications.

Parmi les complications à court terme de la cicatrice utérine figure l'infection, dont l'incidence a nettement diminué depuis l'antibioprophylaxie. Celle-ci se fait par injection unique d'un antibiotique, généralement une pénicilline, après clampage du cordon ombilical. Beaucoup plus fréquentes en postopératoire sont les douleurs avec paresthésies, qui disparaissent après quelques semaines ou quelques mois. En ce qui concerne les complications survenant à distance, outre la rupture utérine, les femmes avec utérus cicatriciel ont un risque majoré de placenta accreta, qui peut être responsable d'hémorragie sévère. «Sa fréquence a été multipliée par quatre en trente ans du seul fait de l'augmentation des césariennes», signale le Pr Subtil, en précisant que le risque croît de façon exponentielle avec le nombre de cicatrices. Enfin, plus anecdotiques sont les cas de grossesse ectopique et d'endométriose pariétale sur cicatrice de césarienne.

(1) Collège national des gynécologues et obstétriciens français. Recommandations pour la pratique clinique. Césarienne : conséquences et indications. J Gynecol Obstet Biol Reprod, 2000; 29 (suppl. n° 2): 9-108.
(2) d'Ercole C et al. La césarienne a-t-elle une indication en cas d'utérus cicatriciel ? J Gynecol Obstet Biol Reprod, 2000; 29 (suppl. n° 2): 51-67.

> Dr CATHERINE FABER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8175