LE RAPPORT, publié en catimini sur le site du ministère des Finances, n'a pas fait de vagues.
Pourtant, les conclusions* de l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) et de l'IGF (Inspection générale des finances) ne sont pas tendres avec les agences régionales de l'hospitalisation (ARH). Mais sans doute le contexte préélectoral a-t-il éclipsé un sujet autant technique que potentiellement polémique.
Car c'est tout le pilotage régional du système hospitalier, ni plus ni moins, que les inspecteurs généraux suggèrent de réformer. L'enjeu n'est pas mince : 63,7 milliards d'euros de dépenses sont concernés cette année.
La question de départ, posée par la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos), peut se résumer ainsi : les ARH peuvent-elles améliorer la qualité, les coûts et l'organisation des hôpitaux et des cliniques ? En somme, ont-elles les moyens de renforcer l'efficience hospitalière ? La tarification à l'activité ne leur laisse guère le choix : ce mode d'allocation des ressources, potentiellement inflationniste, impose la gestion rigoureuse de chaque euro dépensé. Les ARH doivent relayer la politique nationale d'une plus grande maîtrise des dépenses. Or elles «ont parfois du mal à jouer le rôle d'aiguillon et de catalyseur attendu d'elles», note la lettre de mission adressée par la Dhos à l'Igas et à l'IGF.
Créées en 1997 par les ordonnances Juppé, les 26 ARH semblent aujourd'hui au milieu du gué. Des années durant, elles ont été chargées de répartir les moyens hospitaliers au niveau régional.
Changement de cap et de missions.
L'entrée en T2A, en 2004, a sonné la fin d'une époque : désormais, la plupart des ressources hospitalières dépendent directement de l'activité des établissements de santé. «Avec la T2A, les ARH ont perdu une partie de leur pouvoir», observe un bon connaisseur du monde hospitalier.
L'heure est au changement de cap et de missions. Problème : «Les ARH ne disposent à ce jour ni de référentiels communs avec les établissements pour le suivi de la performance, ni d'outils nationaux d'aide à la décision, ni d'analyse structurée des causes des différences observées sur les coûts (…) ou sur les durées moyennes de séjour (…) », constatent l'IGF et l'Igas.
Or la missionrelève «qu'un très grand nombre d'établissements font du développement de l'activité la solution principale à leurs difficultés financières».
Les auteurs du rapport formulent toute une série de propositions pour aider les ARH à se repositionner dans le système de santé. Ils leur suggèrent notamment d' «imposer la généralisation de la mesure de la performance», à l'aide d'indicateurs portant sur l'activité, les finances, l'organisation et la qualité. Les ARH ont tout intérêt à faire des contrats locaux, «de véritables leviers d'amélioration de la performance», ajoute la mission. Chaque aspect doit être âprement négocié sur la base du donnant-donnant, qu'il s'agisse des aides aux établissements déficitaires ou des crédits finançant les missions d'intérêt général. Les contrats de bon usage du médicament doivent faire l'objet d'un suivi tout particulier, précisent les inspecteurs à destination des directeurs d'agence, également invités à développer une politique régionale de retour à l'équilibre financier des établissements de santé. En somme, l'IGF et l'Igas incitent les ARH à faire preuve de plus de fermeté pour gagner en influence. Les inspecteurs conseillent enfin aux ARH de mutualiser leurs expériences, en fonctionnant en réseau.
«La performance hospitalière, c'est vrai, est insuffisamment connue», commente un témoin averti, pour qui les ARH doivent songer à leur reconversion : «En dix ans, les agences ont permis d'accélérer la recomposition du système hospitalier. Et depuis leur création, l'Etat et l'assurance-maladie travaillent ensemble: même si c'est imparfait, c'est un progrès. De là à dire que les ARH sont adaptées, je ne le pense pas: il faut aller plus loin et les transformer en ARS (agences régionales de santé, ndlr) . Ce serait une grande révolution d'instituer un pilotage unique pour la santé publique et l'offre de soins, mais les résistances sont énormes, notamment du côté de l'administration préfectorale. Les principaux candidats à l'élection présidentielle promettent tous la transformation des ARH en ARS. Nous verrons bien.»
* Le rapport de l'Igas et de l'IGF sur les ARH et le pilotage des dépenses hospitalières est en ligne sur le site du ministère des Finances : www.finances.gouv.fr.
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