DANS LES PAYS occidentaux, plus de 5 % des adultes sont porteurs d'un syndrome d'apnée du sommeil (SAS), un chiffre qui dépasse les 10 % après 50 ans. Ronflements, arrêts respiratoires pendant le sommeil, somnolence pendant la journée, troubles de l'attention, cette pathologie, qui affecte la qualité de vie du patient et de son entourage, peut également avoir de graves conséquences sur la santé. « Génération sommeil » est une première campagne de sensibilisation au SAS. A l'initiative des principaux acteurs impliqués dans le domaine du sommeil, médecins spécialistes, sociétés savantes et associations de patients*, elle vise à informer le grand public, mais surtout à former les médecins généralistes afin de favoriser le dépistage et le traitement.
Le message essentiel de cette campagne est « consulter ». Il s'adresse bien sûr au patient, qui doit prendre conscience de ses symptômes et des risques encourus, mais aussi au médecin généraliste qui doit apprendre à dépister, à orienter et à suivre celui qui souffre d'un SAS.
«Cette pathologie est sous-diagnostiquée, avec 80% des patients qui s'ignorent, estime le Pr Patrick Lévy, président de l'Institut national du sommeil et de la vigilance (ISV). Le SAS est encore trop souvent banalisé et masqué par des problèmes de ronflement. Plus on répétera qu'il n'est pas normal de ronfler de manière importante, de somnoler, d'avoir des difficultés de concentration, plus on viendra consulter. Et aujourd'hui un SAS dépisté c'est un SAS traité.»
Or le traitement permet non seulement de retrouver une qualité de sommeil et donc d'améliorer la qualité de la vie du patient et de son entourage, mais également de prévenir les risques de maladies associées.
Le SAS fatigue le coeur et peut favoriser l'apparition de diverses maladies cardiaques. Une étude, publiée dans « The Lancet » en 2005, a montré que le risque de décès d'origine cardio-vasculaire à 10 ans était multiplié par trois chez les patients atteints d'un SAS sévère non traité, alors que ce risque redevenait presque normal chez les patients traités.
«La relation entre syndrome d'apnées du sommeil et hypertension artérielle est également démontrée, explique Patrick Lévy. Le risque d'HTA est multiplié par trois en cas de SAS, un risque qui augmente avec la gravité du SAS. Par ailleurs, il existe d'importantes pistes de recherche sur les liens entre SAS et maladies du métabolisme, telles que la résistance à l'insuline et le diabète. On doit donc traiter pour faire disparaître les apnées et améliorer les symptômes, mais aussi pour limiter les risques à plus long terme pour la santé du patient.»
Un outil pour le dépistage.
Dépister, orienter, suivre, le médecin traitant est la clé de voûte de l'édifice. Le premier dépistage n'est pas facile, soulignent les spécialistes, car les malades négligent et minimisent souvent les symptômes. Très peu consultent au sujet de leurs troubles du sommeil, qui sont plutôt évoqués à la fin d'une consultation motivée par d'autres pathologies. «On pense rapidement à un problème d'apnées lorsque le conjoint se plaint et s'inquiète des ronflements et des difficultés de respiration pendant la nuit de son partenaire, ironise le Dr Bruno Stach, de la Fédération française de pneumologie. Mais les pathologies associées, endocriniennes et cardiologiques doivent alerter le médecin traitant et le conduire à un premier dépistage. Nous disposons d'un outil, l'échelle d'Epworth, qui permet de mesurer la somnolence dans la journée; au-delà d'un certain score, il faut orienter le patient vers un spécialiste qui posera le diagnostic et prescrira le traitement.»
Les spécialistes sont principalement des pneumologues, libéraux ou hospitaliers, équipés d'appareil de polygraphie respiratoire ou de polysomnographie. Ils s'accordent aujourd'hui pour reconnaître que le traitement par ventilation à pression positive continue (PPC) est le plus efficace. Le traitement par PPC est pris en charge par l'assurance-maladie. Selon Patrick Lévy, malgré la contrainte que représente le port d'un appareil toutes les nuits, le bénéfice est tel que de 75 à 80 % des patients gardent ce traitement au long cours.
«Il s'agit d'un traitement à vie et, comme tout traitement à vie, cela nécessite un suivi et une éducation du patient et de son entourage pour obtenir les meilleurs résultats. Cela aussi fait parti du rôle du généraliste, souligne Bruno Stach. Pour contribuer à l'optimisation de l'observance, il doit connaître les différentes modalités thérapeutiques, les effets bénéfiques attendus ainsi que les effets secondaires.»
La formation du médecin généraliste est donc au coeur du programme « Génération sommeil », qui propose aux spécialistes du sommeil de s'investir dans la formation de leurs correspondants médecins généralistes, via des réunions d'information et des soirées de FMC. Chaque médecin se verra remettre une mallette avec un livret de formation sur le SAS, un bloc de tests de somnolence (échelle d'Epworth), un bloc de lettres d'orientation clinique, ainsi que des documents pour sensibiliser le grand public.
Pour en savoir plus sur le SAS et les formations proposées : www.syndrome-apnee-sommeil.fr.
* Société française de recherche et de médecine du sommeil (Sfrms), Institut national du sommeil et de la vigilance (ISV), Fédération française de pneumologie (FFP), Société de pneumologie et de langue française, Fédération française des associations amicales des malades insuffisants ou handicapés respiratoires (Ffaair).
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