LES SOLUTIONS en matière de correction et de protection auditive progressent, même si la frontière entre le son et le bruit reste assez floue. Gênant, nocif pour le conduit auditif, le bruit est pathogène, mais cette dimension ne fait l'objet d'aucune étude épidémiologique, même si la surveillance s'accroît. C'est pour mieux faire connaître les maux, les risques et les solutions disponibles pour communication avec les autres que l'association JNA organise la 10e Journée nationale de l'audition, qui se déroulera jeudi dans toute la France.
Cette journée sera l'occasion de prévenir et de dépister les déficiences auditives, et d'informer le public sur les différentes possibilités qui permettent aujourd'hui de sortir du silence. Les troubles de l'audition – qu'il s'agisse d'acouphènes, d'hyperacousie, de presbyacousie (surdité de perception liée au vieillissement), de surdité précoce ou traumatique – concernent 5 millions de personnes en France, parmi lesquelles 60 % d'adultes et 40 % d'enfants. Chaque année, 700 nourrissons naissent sourds, de parents entendants pour la plupart. Le dépistage à la naissance semble loin d'être systématique et, selon le président des JNA, Christian Gelis, sa pratique réelle serait limitée à 6 CHU. A titre d'exemple, il évoque la déficience bilatérale totale profonde, qui touche les personnes subissant une perte de l'audition supérieure à 90 décibels (dB) : «Ces sourds profonds mériteraient davantage d'attention, le plus tôt possible.» Aujourd'hui, 5 000 personnes seulement bénéficient d'implants cochléaires qui permettent de corriger cette difficulté auditive majeure.
Vigilance acoustique accrue.
«Officiellement limités à 100dB, les baladeurs restent trop souvent utilisés au-delà du niveau sonore autorisé», poursuit le président des JNA, qui rappelle que «la réglementation des émissions sonores doit continuer à évoluer vers une protection plus efficace de l'audition». C'était déjà le sens d'une directive européenne qui, dès 2005, renforçait l'application des limites autorisées pour certains appareils audio. Les experts regrettent pourtant le manque de contrôle des lieux à risque. Dans les discothèques, la limitation à 105 dB de l'émission sonore demeure peu respectée, tandis que les cinémas, les concerts exceptionnels et les rave-parties sont purement et simplement ignorés du législateur.
En revanche, la loi est devenue plus exigeante sur le bruit au travail, où le niveau sonore toléré vient d'être réduit de 5 dB, pour ne pas dépasser 80 dB. Les employeurs doivent garantir ce niveau acoustique et prévoir les protections obligatoires pour leurs salariés exposés au bruit. Le monde du travail s'adapte donc, sans toutefois faire preuve de beaucoup de compréhension. Les entreprises seraient même négligentes et les aménagements de postes trop rares. Le président des JNA dénonce ces manques d'adaptation, alors que les équipements existent : les installations de boucle magnétique et de téléphone adaptés maintiennent ou permettent de retrouver le lien avec la vie active et, tout simplement, avec les autres.
La puce à l'oreille.
Même si les programmes de traitement du signal ont nettement progressé, permettant notamment d'améliorer la netteté de la parole, les équipements internes et externes disponibles présentent des limites dans les milieux perturbés par des sources bruyantes. Pourtant, les progrès sont bien là. La prothèse de l'oreille moyenne, l'implant cochléaire ou le pont du tronc cérébral sont trois avancées majeures qui permettent aujourd'hui de sortir du monde du silence.
Gilles Cognat en sait quelque chose. Ce chirurgien-dentiste, devenu sourd profond il y a une quinzaine d'années, est aujourd'hui secrétaire général des JNA et président de l'Association européenne des porteurs d'implants cochléaires. Implanté depuis de nombreuses années, il salue les progrès réalisés : un appareillage plus discret ; une intervention chirurgicale simplifiée devenue bénigne ; des effets secondaires limités à quelques vertiges ; une mise au point à l'hôpital en 8 réglages, contre 150 il y a dix ans. Gilles Cognat précise qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle oreille, mais d'une nouvelle écoute : «On reste sourd, mais l'implant va permettre de développer le langage oral.»
Le langage des signes reste quotidiennement utilisé par 200 000 personnes et les sourds profonds ne formulent pas tous le voeu d'être implantés. En France, c'est le libre choix des patients et des parents. L'enquête comparative sur le nombre d'implants réalisés dans les différents pays de l'Union européenne, menée par l'association Euro-Ciu (Association européenne d'utilisateurs d'implant cochléaire), présidé par Gilles Cognat, place notre pays au 11e rang. Sachant que le coût global de l'implantation de l'appareillage a été estimé à 40 000 euros, on peut s'interroger sur le motif de ce retard, qui ne repose peut-être pas uniquement sur le libre choix.
Programme des actions JNA : www.audition-infos.org ou 0810.868.110 (Numéro Azur).
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