ANNONCÉ pour la fin du premier trimestre 2007, le plan gouvernemental sur le cerveau et les maladies du système nerveux est-il vraiment dans les tuyaux ? Jacques Glowinski, professeur au Collège de France et auteur du rapport sur ce sujet, s'en tient à rappeler les promesses faites par le Premier ministre à l'automne dernier. En attendant, la Fédération pour la recherche sur le cerveau, qui émane des principales associations de patients et de familles (France Alzheimer, France Parkinson, la Nafsep…), entend mobiliser l'opinion sur ces pathologies, cette année encore, par une succession de manifestations – appel aux dons (Neurodon), expositions, conférences-débats dans plus de 20 villes –, lors de la Semaine du cerveau, du 10 au 18 mars. «Investissez dans l'ordinateur le plus précieux au monde: le cerveau», invite le slogan de la campagne, qui a permis, l'an dernier, de collecter 2,269 millions.
Une campagne justifiée par des chiffres impressionnants : «Les maladies du cerveau touchent 14millions de personnes en France, rappelle Bernard Esambert, président de la FRC. Si l'on ajoute l'entourage, cela représente près de la moitié de la population qui est directement ou indirectement concernée par ces maladies?» Un écho à une préoccupation désormais mondiale : l'OMS estimait, dans un rapport tout récent, à 6,8 millions le nombre de personnes décédées des suites d'une maladie neurologique. Pesant plus lourd que le cancer en termes de coûts socio-économiques (42,8 milliards d'euros en 2004), cet enjeu de santé publique lié au vieillissement suscite dans notre pays moins de dépenses de recherche. « Nous encourageons l'éclosion de thèmes nouveaux de recherche, avec une forte interdisciplinarité», insiste Bernard Esambert.
Stimuler à nouveau les neurones.
Dans quelles directions orienter la science ? L'effort de recherche mené ces dernières années a permis de mieux connaître le fonctionnement du cerveau, et notamment d'invalider des idées reçues : contrairement au message diffusé par les scientifiques pendant des années, les neurones ne meurent pas de façon naturelle. «On ne perd pas de neurones du fait du vieillissement, explique le Dr Etienne Hirsch, futur président du conseil scientifique de la FRC et membre de l'Inserm. Simplement, ils fonctionnent moins bien.» D'où d'intéressantes pistes de recherche : «Stimuler à nouveau les neurones, c'est possible», assure le scientifique. Une étude américaine a montré que l'activité cognitive a un effet protecteur contre de la maladie d'Alzheimer.
Dans des situations pathologiques touchant le système nerveux (épilepsie, AVC…), la problématique est tout autre, puisque les neurones vont mourir. Il s'agit donc de comprendre les mécanismes de cette dégénérescence. Beaucoup de travaux actuels s'intéressent au processus inflammatoire survenant dans le cerveau, qui serait toxique pour les neurones.
Dans tous les cas, beaucoup d'espoirs sont fondés sur l'observation d'une formidable capacité d'adaptation et de transformation du cerveau, la plasticité cérébrale.
Autre enseignement de la recherche : l'inégalité hommes-femmes devant les maladies neurodégénératives. L'Alzheimer et la sclérose en plaques sont des pathologies plus souvent féminines ; le Parkinson est plus masculin (deux fois plus d'hommes touchés que de femmes). Des différences encore mal expliquées, liées en partie à des facteurs socio-économiques.
Distancée par ses voisins anglais et allemands, la recherche française dans ce domaine devrait bénéficier des retombées du plan à venir : selon le Pr Glowinski, l'appareil de recherche mérite une réorganisation générale, favorisant «les échanges entre tous les acteurs intervenant dans l'exploration de la physiologie du système nerveux, des maladies mentales et neurologiques», Inserm et Cnrs notamment. Sept neuropôles régionaux vont être créés sur le territoire pour une plus grande coordination des chercheurs. Sur le cerveau comme sur d'autres sujets, la mobilisation des grosses têtes exige une synergie toujours meilleure.
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