«LE CREDO du modèle biomédical triomphant, s’il a permis des progrès considérables –allongement de l’espérance de vie, diminution de la mortalité infantile–, a fait oublier un certain nombre de principes d’hygiène élémentaires, comme se laver les mains, utiliser des mouchoirs jetables ou éviter les contacts avec une personne enrhumée», explique Philippe Lamoureux, directeur général de l’Inpes. Dans les pays industrialisés, la forte croissance de la vie en collectivité fait que l’hygiène y est devenue une priorité. Réapprendre les gestes qui protègent des épidémies saisonnières de maladies virales respiratoires constitue donc aujourd’hui un enjeu essentiel. Du fait de leur mode de transmission (par voie aérienne ou par contact), les grippes, les rhumes et les bronchites se propagent rapidement. Une simple toux permet, par exemple, la dissémination immédiate de millions de particules infectieuses et suffit à contaminer une pièce pendant plusieurs heures (salle d’attente, bureau...).
Les gestes qui protègent.
Le lavage des mains, l’utilisation de mouchoirs jetables et le port du masque sont des gestes d’hygiène élémentaires qui ont démontré leur efficacité à limiter la propagation des virus. Chaque année, les périodes automnales et hivernales apportent leur lot de maladies respiratoires. L’épidémie de grippe touche de 1 à 7 millions de personnes, avec plusieurs milliers de décès. Pour la saison 2006-2007, elle devrait toucher près de 2,2 millions de personnes. Les cas de bronchiolite, maladie qui touche chaque année un tiers des nourrissons, en augmentation depuis octobre, donnent déjà lieu à une situation épidémique.
« Adoptons les gestes qui nous protègent », le thème de la campagne grand public de prévention des maladies respiratoires organisée par le ministère de la Santé et l’Inpes, se veut avant tout pédagogique : «Il s’agit, explique Philippe Lamoureux, de redévelopper une culture de l’infectieux»: permettre à chacun de s’approprier ces gestes souvent oubliés, mais qui devraient faire partie de la vie quotidienne.
La campagne devrait comporter plusieurs volets, identifiables par un code couleur progressif. Le premier, code vert, concerne uniquement les virus respiratoires courants. Cependant, avec l’épizootie de grippe aviaire, «si le virus venait à muter et qu’il donnait lieu à une pandémie, ses manifestations cliniques pourraient être similaires à celle d’une infection respiratoire virale de type grippal. Il est donc d’autant plus nécessaire d’anticiper et de promouvoir ces gestes d’hygiène». Les deux autres volets (logos orange et rouge) sont donc spécifiques à la grippe aviaire et ne seront déclenchés qu’en cas de risque de pandémie ou de pandémie déclarée.
Des chiffres pour visualiser la transmission.
Le volet vert de la campagne a déjà fait l’objet d’un premier lancement en avril dernier dans les écoles, les collèges, les lycées et les PMI : présentation sur une série de supports des trois gestes. Cette première série a été suivie, en mai, d’une diffusion auprès des professionnels de santé, qui «doivent jouer un rôle clé de relais», d’outils d’information (affichettes, dépliants). Cette fois, c’est le grand public qui est visé. A partir du 20 novembre et jusqu’au 10 décembre, trois films de 30 secondes vont être diffusés sur les chaînes hertziennes et sur quelques chaînes du câble. Le dispositif est complété par deux annonces à paraître dans la presse écrite jusqu’à la fin de décembre et des chroniques de 30 secondes pour les radios locales. Des rubriques à destination des professionnels de santé seront publiées à la fin novembre dans la presse spécialisée. Ils pourront télécharger un document à remettre à leurs patients sur le site de l’Inpes (www.inpes.sante.fr).
La campagne «se veut non anxiogène» et fait appel au sens de la responsabilité de chacun : «Se protéger, mais aussi protéger les autres.» Des chiffres sont utilisés pour visualiser la facilité et la rapidité avec lesquelles les virus se propagent lors d’une toux, d’un éternuement ou sur les mains. Le port du masque dit « chirurgical » est peut-être le geste le moins familier et le plus compliqué à promouvoir, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays, comme le Japon ou l’Amérique du Nord. La population est-elle prête à adopter un tel comportement ? «L’idée est de parvenir à faire entrer le port du masque dans les moeurs», explique Philippe Lamoureux. Des études de comportement ont montré que la protection des enfants pourrait être un bon levier pour faire accepter cette habitude. Comme pour le lavage des mains, c’est un geste technique : pour être efficace, le masque doit être attaché derrière la tête, moulé sur la racine du nez et abaissé sous le menton. Il doit être changé toutes les quatre heures ou dès qu’il est mouillé et jeté dans une poubelle couverte. Les masques sont déjà disponibles dans les pharmacies. Dans un premier temps, le rôle de conseil du pharmacien est essentiel, mais le réseau de vente pourrait être élargi à la grande distribution afin que le masque devienne réellement «un objet de consommation courante».
Bien se laver les mains
Quand?
. Chaque fois que l’on y pense.
. A certains moments considérés comme « essentiels » : avant de préparer les repas, de manger ou de nourrir les enfants ; après s’être mouché, avoir toussé ou éternué, lors de chaque sortie et en rentrant au domicile, après une visite à une personne malade et un contact proche (avec le matériel qu’il utilise, avec ses effets personnels), après avoir cuisiné.
. Dans tous les cas : après être allé aux toilettes, après avoir changé une couche ou aidé un enfant à aller aux toilettes, après avoir touché un animal ou ramassé ses excréments, à chaque fois que les mains sont sales. Comment?
La méthode employée est tout aussi importante que le geste. C’est la combinaison du savonnage, du frottage, du rinçage et du séchage qui permet d’éliminer les germes : se mouiller les mains sous l’eau chaude courante ; les savonner, si possible avec du savon liquide ; les frotter ensuite pendant trente secondes (apprendre aux enfants à le faire le temps d’une chanson) pour produire de la mousse, sans oublier de frotter le dos de la main, entre les doigts et sous les ongles ; les rincer sous l’eau courante puis les sécher avec une serviette propre ou à l’air libre.
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