POUR FÊTER ses quinze années de combat contre l’infection par le VIH, l’association Actions traitements a organisé dans ses locaux du 11e arrondissement une journée portes ouvertes, occasion de mesurer le chemin parcouru. En 1991, ils étaient une dizaine de volontaires animés par «l’impérieuse nécessité de se regrouper et d’agir au milieu d’un désert d’information», explique son président, Jean-Marc Bithoun. En l’absence de traitement, il fallait faire quelque chose : gagner du temps contre le virus, récupérer des informations sur la maladie, les traitements complémentaires. «Le projet initial était surtout de “sauver sa peau”», explique celui qui a fait partie de ces tout premiers volontaires. A un moment où il n’y a pas grand-chose pour se soigner, ils pistent l’information, traduisent les articles anglo-saxons, s’ouvrent aux médecines alternatives et complémentaires même si l’efficacité n’est pas au rendez-vous et qu’il faut se méfier des charlatans. Le premier numéro d’« Info Traitements » est publié le 10 mars 1993 et est entièrement consacré à l’essai du 3TC de Glaxo. «Actions traitements vous rappelle que les documents qu’elle diffuse sont des traductions de journaux américains. Ces articles sont donc à replacer dans leur contexte», y est-il précisé. «Pour ma part, j’allais à l’école de médecine de Paris photocopier les articles qu’on faisait paraître dans le bulletin», se souvient Jean-Marc Bithoun.
Le voyage de New York.
Pendant cette période, beaucoup de malades meurent. En 1996, une première bonne nouvelle arrive : «Le PrLeibovitch présente un essai de trithérapie (AZT-ddc--ritonavir) . Il parle même d’éradication du virus», témoigne le président d’Actions traitements. L’espoir est là, mais tout n’est pas gagné : «Le Conseil national du sida décide d’attribuer ces molécules par tirage au sort. Pour nous, ce fut difficile à accepter», poursuit-il. Avec onze autres membres de l’association, ils décident d’aller aux Etats-Unis acheter ces nouvelles molécules. Il raconte : «Nous avons enregistré chacun de son côté, car officiellement il ne fallait pas qu’on se connaisse car nous ne pouvions pas entrer aux Etats-Unis en tant que séropositifs. Arrivés à New York, nous nous sommes retrouvés à l’extérieur de l’aéroport où nous attendaient les journalistes que nous avions prévenus. Nous avons ensuite rejoint le praticien que nous avait recommandé notre médecin. Munis d’une ordonnance, nous nous sommes rendus dans une pharmacie, comme s’il s’agissait d’aller acheter un shampooing. Nous avons acheté pour 150000F de traitements. C’était un grand moment d’émotion.» De retour à Paris, ils organisent une conférence de presse. Quelques jours plus tard, l’Agence du médicament autorisera les molécules pour tous. Le voyage de New York fait la une du numéro de mai 1996 (n° 33), sous le titre «Antiprotéases: des résultats sans précédent». Le numéro suivant (n° 33/34 de juin/juillet) est consacré au congrès de Vancouver. Son éditorial annonce : «La monothérapie est donc condamnée unanimement et la bithérapie de produits peu efficaces le sera prochainement». Et d’ajouter : «Grâce au travail des associations et au système de santé français unique en Europe, on peut bénéficier sans délais des trithérapies.» L’heure est à l’euphorie. Mais, très vite, ce sera la découverte des effets secondaires, des résistances et de la nécessité de l’observance. «Il a fallu encore faire un nouveau travail sur soi pour rester maître de son parcours de santé et prendre conscience que l’on ne redeviendrait pas comme avant.»
Aujourd’hui, malgré les progrès indéniables, plus de 5 % des personnes atteintes n’arrivent pas à trouver un traitement efficace en raison d’une multirésistance. En 2005, près de 1 000 personnes sont décédées du sida en France.
Le combat continue donc. La ligne thérapeutique ouverte depuis 1994 et animée par des bénévoles écoutants continue à recueillir les appels de patients (plus d’une trentaine par mois) et parfois à les orienter. Des réunions qualité de vie, mises en place dès 1996, accueillent une vingtaine de participants.
Un site Internet.
Le journal, distribué à 8 000 exemplaires, est reconnu par les institutions et le monde médical pour la qualité de son information. Pour son numéro d’octobre, il bénéficie d’une nouvelle maquette plus agréable et d’un partage plus clair des rubriques, dont l’une sera consacrée à la qualité de vie. Le site Internet (www.actions-traitements.org), développé grâce à un partenariat avec l’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé), sur lequel sont mis en ligne tous les documents et supports édités par l’association, reçoit plus de 37 000 visites par mois. Des outils essentiellement pratiques qui font le succès de l’association : les Infocartes (fiches pratiques sur les molécules antirétrovirales disponibles en France) – celle consacrée à New Fill, remboursé depuis janvier 2005, a été diffusée à plus de 8 000 exemplaires – et la réglette d’interactions médicamenteuses (mise à jour chaque année). «Nous souhaitons développer une information sur l’utilisation de ces supports, souligne la directrice Séverine Fouran, parce qu’ils doivent faire partie du dialogue au moment de la décision de mise sous traitement. Ils sont un élément du droit des malades à participer au choix thérapeutique qui les concerne.» Le contenu scientifique est validé par le Dr Odile Vergnoux, qui fait partie des cinq permanents de l’association. Parmi les nouvelles orientations de l’association, le partage d’expérience avec une information proposée aux professionnels de l’accompagnement médico-social (écoles de soins infirmiers, bus des femmes, association Ikemberé).
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