LE NEUVIÈME rapport annuel de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dresse un bilan de la surveillance épidémiologique et des stratégies de lutte contre la tuberculose dans 199 pays dans le monde en 2003. Après dix ans de lutte, des progrès ont été accomplis, mais l'échéance prochaine pour la réalisation des objectifs du millénaire rend urgente la mobilisation.
Les objectifs mondiaux étaient de pouvoir, dès cette année, dépister 70 % des nouveaux cas à frottis positifs et traiter 85 % d'entre eux et, pour 2015, de réduire de moitié la prévalence et la mortalité par rapport à 1990 et de stopper la propagation de la maladie pour commencer à inverser la tendance.
Les dernières données disponibles indiquent que « le taux d'incidence de la tuberculose est encore en légère augmentation dans le monde, mais que les taux de prévalence et de mortalité sont en diminution ». L'incidence enregistrée en 2003 s'élève à 8,8 millions de nouveaux cas, la prévalence (nombre total de cas) est de 15,4 millions pour une mortalité de 1,7 million.
Un tiers de la population mondiale.
L'infection touche un tiers de la population mondiale et tue 5 000 personnes par jour.
Depuis 1993, la stratégie Dots est l'arme préconisée au niveau international pour combattre la maladie : dépistage (frottis), traitement de six à huit mois sous surveillance régulière directe par le personnel soignant, les agents communautaires ou des bénévoles formés, frottis en fin de traitement.
En 2003, 182 pays ont adopté la stratégie, soit 2 de plus qu'en 2002.
Les résultats les plus prometteurs du rapport concernent le dépistage réalisé dans le cadre de la stratégie Dots : « L'augmentation du nombre de cas à frottis positif notifiés dans le cadre de la stratégie Dots n'a jamais été aussi forte qu'entre 2002 et 2003. » Les 1,8 million de cas à frottis positifs signalés par les programmes représentent un taux de détection de 45 % (1,8 sur 3,9 millions des nouveaux cas à frottis positifs). L'augmentation est encore plus nette pour le nombre de cas notifiés (693 000 entre 2002 et 2003 pour une moyenne annuelle de 270 000, précédemment). Le taux de succès thérapeutique est également élevé : en moyenne 82 %. Cependant, certaines régions comme l'Afrique (73 %) ou l'Europe (76 %) présentent des scores moins bons. « Cela s'explique en partie par les complications de la coïnfection tuberculose-VIH en Afrique et par la pharmacorésistance dans la région européenne », expliquent les rapporteurs. D'autres pays, au nombre de 22, ont déjà atteint les objectifs fixés en matière de détection et de succès thérapeutique. Parmi eux, le Vietnam, le seul à faire partie des pays les plus touchés.
Coïnfection et résistance.
Les disparités régionales sont importantes, puisque le taux d'incidence calculé dans cinq des six régions de l'OMS montre une stabilisation ou un fléchissement de l'incidence. « La région qui fait exception est la région africaine, où le nombre de nouveaux cas a augmenté plus rapidement que dans les pays à plus haut taux de prévalence », indique le rapport. En Europe de l'Est, après une augmentation dans les années 1990 et un pic en 2001, les taux baissent également. L'Inde et la Chine sont les pays qui ont consenti le plus d'efforts : les deux pays concentrent 63 % de tous les nouveaux cas à frottis positifs signalés dans le cadre de la stratégie Dots.
Celle-ci devrait connaître une nouvelle extension en 2005, avec un nouveau cycle de planification.
Pour cela, les financements doivent suivre et les pays doivent s'assurer que les budgets alloués à l'organisation de leur Plan national contre tuberculose (PNT) est suffisant. D'ores et déjà, 12 pays ne seront pas en mesure d'atteindre les objectifs fixés pour le dépistage en 2005.
L'évolution de la coïnfection à VIH /tuberculose et la pharmacorésistance constituent une menace : « Il est urgent que les gouvernements, les prestataires de soins et les communautés se mobilisent pour trouver de nouvelles parades face à cette évolution inquiétante », insiste le rapport. La recherche de nouveaux moyens diagnostiques, thérapeutiques et préventifs (vaccins) est indispensable. L'OMS, en collaboration avec le partenariat Halte à la tuberculose, a élaboré une stratégie DOT-Plus pour lutter contre la pharmacorésistance. Elle est déjà appliquée dans 23 pays. En 2005, 2,2 milliards de dollars seront nécessaires pour lutter contre la maladie.
En France, une incidence stable
Avec 6 000 nouveaux cas par an, l'incidence de la tuberculose est constante depuis cinq ans en France. Cette incidence masque d'importantes disparités régionales. Comme dans les grandes villes des pays industrialisés, l'incidence est très élevée, cinq fois la moyenne nationale en 2002 (54,1/100 000 habitants). L'Ile-de-France concentre la moitié des nouveaux cas français (27 pour 100 000 habitants). Populations précarisées, personnes migrantes, personnes infectées par le VIH ou personnes vivant en milieu carcéral sont les plus exposées.
Des personnels de santé de première ligne
Le thème choisi pour la Journée mondiale de la tuberculose en 2005 est l'hommage au « Personnel de santé de première ligne : les héros de la lutte contre la tuberculose ». D'eux, personnels infirmiers et médico-sociaux, dépend le succès de la stratégie Dots. L'Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires (www.uictmr.org.) le rappelle. L'association est la première à l'avoir appliquée en Tanzanie, avant qu'elle ne soit reprise par l'OMS en 1993. La pénurie de personnel est d'ailleurs l'un des problèmes rencontrés dans les pays pauvres. L'Union a créé une division Personnel infirmier qui apporte une assistance en matière de savoir-faire, de formation et de sensibilisation. Depuis trois ans, 300 professionnels originaires des pays à faible revenus ont participé à des ateliers lors de conférence régionales et mondiales.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature