Cinq fruits et légumes par jour, c'était la première prescription du programme national nutrition santé (PNNS) lancé en 2001 ; l'incidence de certains cancers peut être réduite jusqu'à 50 % par l'alimentation, montrait l'étude européenne EPIC ; « La Santé vient en mangeant », dit le guide alimentaire diffusé en septembre. Et pour ceux qui ne seraient pas encore convaincus, voici un chiffre rond et parlant : 100 000 cas de cancers pourraient être évités chaque année en France par la prévention nutritionnelle.
C'est le World Cancer Research Fund (WCRF) International qui l'affirme dans le résumé, établi avec la collaboration du réseau NACRe (1), des données épidémiologiques : « Alimentation, nutrition et prévention des cancers, une perspective mondiale : application au contexte français » (2) ; une actualisation pour la France du rapport de référence de 1997 publiée à l'occasion des 4es Journées francophones de nutrition, à Dijon, du 27 au 29 novembre.
La probabilité d'avoir un cancer au cours de sa vie est estimée à une sur deux pour un homme et une sur trois pour une femme. En France, quelque 240 000 nouveaux cas et 143 000 décès par cancer sont enregistrés chaque année. Or la moitié des cancers du sein (17 000 sur les 34 000 nouveaux cas annuels) pourraient être évités par une augmentation de la consommation de légumes, de légumineuses et de produits céréaliers, une diminution de la consommation d'alcool, le maintien d'un poids équilibré et la pratique régulière d'une activité physique. La proportion de cancers colo-rectaux évitables (plus de fruits, de légumes et de sport, moins d'alcool, de tabac, de viandes et de charcuteries) est encore plus grande : 23 000 sur 33 000. Et même les cancers du poumon sont accessibles à la prévention nutritionnelle (en plus de l'arrêt du tabac) : 5 000 cas évitables par une hausse de la consommation de fruits et légumes.
Trois groupes à risque
En France, on boit encore trop d'alcool, on ne consomme pas assez de fruits et de légumes (qui doivent fournir 7 % de l'apport énergétique total), on est de plus en plus gros, on ne choisit pas assez souvent le poisson plutôt que la viande, on consomme trop d'acides gras saturés (le double des apports conseillés) et de sel, on ne fait pas assez de sport. En outre, on cuit trop et/ou mal les aliments et on n'utilise pas au mieux le réfrigérateur (température trop élevée, entretien insuffisant).
Bien sûr, tous les Français n'ont pas ces défauts réunis. Sur les six groupes définis par l'Observatoire des consommations alimentaires, trois surtout, qui représentent 50 % de la population adulte, sont à risque : les « jeunes mangeurs » (14 % de la population), entre 18 et 34 ans, gros consommateurs de biscuits sucrés, riz, pâtes, sodas et chocolat ; les « petites mangeuses pressées » (18 %), souvent jeunes et qui abusent des viennoiseries, pizzas et quiches ; enfin, les « gros mangeurs » (11 %), des hommes en majorité, amateurs de boissons alcoolisés, fromages, charcuteries, abats, pommes de terre et café (3).
Dans un pays où les plaisirs de la table restent heureusement valorisés et où la lutte contre le cancer a été justement décrétée priorité nationale, la marge de manœuvre est grande. A chacun de s'en convaincre.
(1) Le World Cancer Research Fund est une alliance internationale d'organisations dédiées à la prévention et à la maîtrise du cancer par une alimentation et des modes de vie équilibrés. Le réseau NACRe (Nutrition Alimentation Cancer Recherche), coordonné par Paule Martel (INRA), rassemble depuis janvier 2000 les équipes de recherches publiques engagées dans le domaine alimentation et cancer, parmi lesquelles celles de Serge Hercberg (INSERM), Elio Riboli (CIRC, Lyon), Marie-France Poupon (CNRS-institut Curie).
(2) Ce texte de 35 pages est diffusé avec le soutien de l'Institut français pour la nutrition ; il est accessible sur le site du WCRF International www.wcrf-fr.org.
(3) Les trois autres groupes : « petites mangeuses diversifiées » (15 % de la population), « gros mangeurs diversifiés » (14 %) et « mangeurs standards » (27 %).
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