On parle de bronchite chronique lorsqu'une personne tousse et crache le matin, de façon prolongée, au moins trois mois dans l'année et au moins deux années consécutives, rappelle le Pr Jean-François Muir. La bronchite chronique est due dans 75 % des cas au tabac et, plus précisément, à l'irritation répétée des bronches par les composants de la fumée de cigarettes.
La fréquence de la bronchique chronique augmente avec l'importance et la durée de consommation du tabac. Ces symptômes (toux et expectorations chroniques) sont souvent méconnus, car les fumeurs considèrent comme normal de tousser et de cracher. Souvent, ils ne le signalent même pas à leur médecin : la maladie est sous-diagnostiquée.
La BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive), poursuit le Pr Muir, se caractérise par une diminution chronique des débits expirés en rapport avec une réponse inflammatoire anormale aux aérocontaminants gazeux et particulaires. Cette obstruction est peu réversible (peu de réponse au test à la Ventoline, qui permet notamment de faire le diagnostic différentiel avec l'asthme).
Des examens simples et rapides
Pour diagnostiquer les complications de la bronchite chronique, quelques examens simples sont nécessaires. C'est par la mesure du souffle que sera évaluée l'obstruction bronchique. La mesure du DEP (débit expiratoire de pointe) à l'aide du débitmètre de pointe (Peak Flow Meter) permet d'avoir une première idée du niveau du souffle. Une mesure plus complète est celle du volume expiratoire maximum par seconde (VEMS), c'est-à-dire le volume d'air maximal que l'on peut expirer en une seconde.
Le VEMS se mesure chez le pneumologue à l'aide d'un spiromètre. Chez une personne non fumeuse, le VEMS décroît naturellement avec l'âge. Mais chez une personne atteinte de bronchite chronique obstructive, le VEMS va diminuer trois à cinq fois plus vite. Cependant, si cette personne arrête de fumer, elle retrouvera une décroissance de son VEMS identique à celle du non-fumeur. Ces deux techniques de mesure du souffle sont simples, rapides et indolores. A un stade ultérieur des complications, on pourra avoir recours à la mesure des gaz du sang, à une EFR complète et à un scanner thoracique.
Une nouvelle définition
Le groupe GOLD, explique encore le Pr Muir, a souhaité repenser le concept de maladie obstructive bronchique, sa définition, son histoire naturelle, sa prise en charge et, surtout, en termes de définition, recentrer cette maladie autour de l'obstruction bronchique, qui constitue le nud du problème, puisque c'est elle qui va conditionner la survie du patient. Un des vux du groupe GOLD est donc de débanaliser la maladie appelée classiquement « bronchite chronique », pour rappeler que, à partir du moment où l'on tousse et où l'on crache, on est exposé à l'apparition d'une obstruction qui entraînera à terme des infections de plus en plus fréquentes, une dyspnée d'effort, voire une insuffisance respiratoire oxygénodépendante. Cette démarche internationale a débouché sur un document écrit (rapport GOLD sur la BPCO présenté à la fin de 2001).
Un dépistage dans huit villes
Les membres du groupe GOLD ont voulu également que, dans les différents pays volontaires, soient déclinées les recommandations à chaque structure sanitaire. C'est dans ce sens qu'a été décrétée la journée mondiale du 20 novembre, au cours de laquelle seront menées des opérations de sensibilisation du grand public à la maladie ainsi qu'un dépistage du souffle. Huit villes participent en France (Rouen, Nîmes, Caen, Limoges, Besançon, Dijon, La Roche-sur-Yon, Angoulême). A Rouen, dans deux endroits passants (le centre-ville et la gare), des stands seront dressés pour un dépistage du souffle chez des passants volontaires de tout âge, informés par affichage lumineux. Un bref interrogatoire (antécédents pulmonaires, consommation tabagique, poids, taille, âge) et un examen du souffle permettront de quantifier à la fin de la journée le nombre de personnes ayant un déficit obstructif et de les classer en fumeur et non-fumeur. Cet examen sera réalisé par un débit de pointe et un appareil électronique qui mesurera simultanément le débit de pointe et le VEMS (OneFlow). L'objectif est de connaître le nombre d'obstructifs qui s'ignorent dans la population (pourcentage actuellement estimé à 10 %, quel que soit l'age - enquête présentée au congrès de Stockholm de septembre 2002).
En effet, au stade 1 de la BPCO, il y a une diminution des débits qui commencent à apparaître, mais les malades sont peu symptomatiques. Ces patients dépistés recevront comme conseils : une orientation vers une consultation anti-tabac et une orientation médicale vers leur médecin traitant qui jugera de la nécessité ou non d'une consultation pneumologique en vue d'examens plus sophistiqués (mesure des débits, épreuves avec bronchodilatateurs, mesure de la distension thoracique, etc.).
Ces patients du stade 1 sont particulièrement intéressants à dépister car un arrêt complet du tabac permet de contrôler la maladie. De plus, il sera conseillé aux patients qui le peuvent de consulter le site Internet de la Société de pneumologie (splf.org) ainsi que le site du CNMR (lesouffle@lavie.com) sur lesquels existent des bases de données accessibles au grand public sur la BPCO.
Faisant suite à cette journée, aura lieu, du 31 janvier au 3 février, le congrès de la SPLF qui se tiendra à Nice. Le thème central de ce congrès sera la BPCO et les nouvelles recommandations dans ce domaine y seront présentées.
* Chef du service de pneumologie, CHU de Rouen, hôpital de Bois-Guillaume.
En chiffres
- En France, la bronchite chronique touche 3 millions de personnes et 1 million sont atteintes de BPCO, dont 60 000 au stade de l'insuffisance respiratoire chronique nécessitant oxygénothérapie ou ventilation assistée. On recense 15 000 morts par an, la BPCO étant la troisième cause de mortalité par maladie (après les maladies cardio-vasculaires et les tumeurs). Sa fréquence a augmenté de 40 % en quinze ans.
- Dans le monde, l'OMS estime à 2,74 millions le nombre de victimes de la BPCO en 2000. C'est aujourd'hui la quatrième cause de mortalité mondiale, alors qu'elle n'était qu'en douzième position en 1990.
Un guide pour les patients
« Vous êtes facilement essoufflé ? Vous toussez tous les jours ou presque, par exemple, le matin ? Vous avez souvent des bronchites ou elles "traînent" ? Et si c'était une BPCO ? » : le Comité national contre les maladies respiratoires (CNMR) a choisi la première journée mondiale de la BPCO pour lancer un guide destiné aux patients.
Cette brochure présente la BPCO aux malades, les incite à faire mesurer leur souffle s'ils sont fumeurs et qu'ils ont des problèmes de respiration. Elle leur prodigue aussi des conseils, ainsi qu'à leur famille, pour ralentir la progression de la maladie.
Outre la brochure, le CNMR organise diverses actions d'information et de prévention à destination du grand public, mais aussi des médecins. Une campagne de sensibilisation sera bientôt lancée à destination des généralistes.
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