A VEC l'arrivée des traitements, les personnes infectées par le VIH ont de nouvelles perspectives, notamment celle d'accéder à l'emploi. Leur parcours est néanmoins semé d'embûches, à en croire l'association AIDES, qui dénonce, chiffres à l'appui, les « discriminations » dont les séropositifs font l'objet dans l'entreprise.
Dans un sondage CSA-AIDES-« Libération » (1), relatif au « regard des Français sur l'insertion des personnes handicapées et séropositives dans l'entreprise », 61 % des Français considèrent que la situation des personnes handicapées dans les entreprises n'est « pas satisfaisante ». Ce jugement intervient en priorité dans la catégorie « cadres, chefs d'entreprise et professions libérales » (71 et 72 % des réponses).
Parmi les différentes formes de handicap, ce sont les maladies infectieuses comme le SIDA qui sont « les moins bien acceptées dans l'entreprise », selon 57 % des personnes interrogées. Viennent ensuite les troubles psychologiques (comme les dépressions, les névroses, etc.), citées par 42 % des Français, puis les handicaps moteurs (32 % des réponses), enfin, les maladies chroniques évolutives (cancer, sclérose en plaques, etc.) (16 % des réponses).
97 % acceptent de travailler avec un handicapé
Pourtant, qu'ils soient handicapés ou non, tous les salariés doivent être logés à la même enseigne, selon 63 % des Français, qui affirment qu'un salarié handicapé doit être traité « comme les autres salariés ». C'est notamment l'avis des employés : 75 % d'entre eux optent pour cette hypothèse. Est-il justifié qu'une personne séropositive occupe les mêmes postes qu'une autre personne dans une entreprise ? C'est « justifié », répondent 85 % des personnes contactées.
Seulement 35 % des salariés interrogés déclarent travailler « avec un ou des salariés ayant un handicap » et seulement 4 % avec un ou des salariés séropositifs. Cependant, la quasi-totalité des salariés ne demanderait pas mieux que de travailler avec « une personne atteinte d'un handicap visible ou non » (97 %) ou avec une personne séropositive (93 %).
Les Français sont, en revanche, divisés quant à la révélation du handicap, selon la nature de ce handicap. Pour 55 % d'entre eux, « une personne atteinte d'un handicap visible ou non » doit en annoncer la nature à son employeur. S'il s'agit d'une personne séropositive, la nature du handicap peut être cachée, selon 55 % des Français. Enfin, 86 % des personnes interrogées pensent que les séropositifs subissent des discriminations dans l'entreprise.
Afin de sensibiliser le milieu de l'entreprise à l'intégration des personnes séropositives, AIDES lance, cette semaine, une campagne nationale, programmée sur deux ans. Outre la diffusion de 200 000 affiches auprès des entreprises, l'association édite un guide pratique « VIH/SIDA en milieu de travail » et une série de 15 cartes postales. En outre, trois spots TV et une vidéo de sensibilisation ont été réalisés.
Des malades dans la détresse
Le lancement de cette campagne a aussi donné l'occasion à AIDES de faire connaître un certain nombre de situations de détresse. Comme celle évoquée par ce maître auxiliaire qui a voulu garder l'anonymat. Dans une lettre adressée à l'association, il fait état « d'événements dramatiques, liés à sa séropositivité ». A la suite d'un arrêt maladie de trois semaines, alors qu'il enseignait dans un établissement privé sous contrat avec la direction de l'Enseignement catholique, il informe cette direction de sa séropositivité. « Par souci d'honnêteté », ajoute-t-il. C'est alors, poursuit-il, qu'il commence à en remarquer « les effets discriminatoires ». A la rentrée 1999, alors qu'il prétend à un poste vacant, on lui propose huit CDD (contrats à durée déterminée) d'un mois renouvelables, dans un établissement à 350 kilomètres de son domicile : « La précarité de l'emploi proposé ne me permettait pas de déménager ». Quand il obtient enfin un poste, il doit affronter « les rires moqueurs en salle des professeurs », des blâmes. Au bout de quatre jours, le maître auxiliaire craque : « Je devais stopper l'activité devenue infernale ». Depuis, « plus aucune proposition de remplacement » ne lui a été proposée. Il a engagé une procédure judiciaire pour discrimination.
Tous les jours, AIDES reçoit des témoignages similaires. C'est pour faire cesser ce genre de pratiques, pour qu'enfin les responsables de l'entreprise « acceptent de faire une place aux personnes touchées par une pathologie lourde » que l'association mobilise aujourd'hui l'opinion.
(1) Sondage réalisé auprès d'un échantillon national représentatif de 1 005 personnes âgées de 18 ans et plus, constitué d'après la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de ménage).
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