E NTRE 1997 et 1999, 2 075 accidents de roller ont été enregistrés par sept hôpitaux volontaires*. C'est 1,52 % des 136 676 « accidents de la vie courante » (AcVC) qu'ils ont comptabilisés durant ces trois ans dans le cadre du recueil européen EHLASS (European Home and Leisure Surveillance System).
Le Dr Bertrand Thélot (Institut de veille sanitaire, département maladies chroniques et traumatismes) et son équipe en ont tiré un précieux ensemble de données épidémiologiques, avec l'âge, le sexe des accidentés, les caractéristiques de l'accident, le type de lésion, la partie du corps atteinte, ainsi que la répartition temporelle.
Le membre supérieur touché dans deux cas sur trois
Les résultats, pour une part, corroborent les observations, beaucoup plus fragmentées, qui étaient disponibles jusqu'à présent (« le Quotidien » du 12 mars) : les principales lésions sont des contusions (40,4 %), des fractures (34,3 %), des luxations et entorses (13,4 %), et des plaies ouvertes (9,1 %).
Quant aux parties touchées, c'est le membre supérieur qui est en cause dans près de deux tiers des cas (61,7 %) : le poignet (30,7 %), l'épaule, le bras et l'avant-bras (21,6 %), la main et les doigts (9,4 %). Les autres parties atteintes sont le membre inférieur (15,1 %), la face (6,2 %) et le crâne (5,3 %). Les circonstances qui ont occasionné l'accident ne sont pas davantage surprenantes : dans 91 % des cas, c'est une chute qui est à l'origine de l'admission aux urgences. Autre cause, très loin derrière, les collisions (4,1 %). C'est la voie publique ou les lieux de transport qui sont le théâtre de l'accident dans 67 % des cas.
Ludique et sportif
Et, dans 65,8 % des accidents, la victime s'adonnait, ce qui peut sembler redondant, à une activité de loisirs.
Car même si le roller constitue un mode de déplacement pour tout type de besoins personnels et y compris professionnels, c'est bien évidemment son caractère ludique et sportif qui prime chez les aficionados.
Du reste, cette caractéristique est clairement mise en évidence dans l'étude de la répartition chronologique des accidents : on observe une nette prédominance du dimanche (21,1 %), à un moindre degré du lundi (15,2 %)**, du mercredi (14,1 %) et du samedi (14,7 %).
Mais la « découverte » du Dr Bertrand Thélot réside dans la saisonnalité marquée des accidents, jusqu'alors insoupçonnée : entre la treizième et la vingt-cinquième semaine de l'année, on enregistre en effet presque la moitié des accidents (43,2 %). C'est une période qui correspond au printemps, ou à peu près au deuxième trimestre. L'étude précise même que, dans les sept hôpitaux qui ont participé au recueil, un pic a été retrouvé pendant les 17e et 18e semaines, c'est-à-dire la dernière semaine de mai et la première de juin, avec une moyenne hebdomadaire de 35 accidents, contre 23 pendant les autres semaines printanières et 13 en moyenne annuelle.
Le fait qu'on déplore bien moins d'accidents pendant l'été s'expliquerait, selon les auteurs, par la concurrence d'autres sports durant la période estivale.
Des particularités se font jour, d'autre part, selon l'âge et le sexe. En dessous de 10 ans, ce sont le crâne et la face qui sont le plus souvent atteints, avec des contusions et des plaies ouvertes ; entre 10 et 14 ans, le poignet est touché dans plus d'un accident sur trois (34,5 %) ; de 15 à 19 ans, les lésions aux membres inférieurs atteignent le taux de 20,7 % ; et au-delà de 20 ans, ces lésions culminent à 24 % des accidents. Les hommes sont 1,3 fois plus souvent hospitalisés que les femmes.
Pour conclure, provisoirement, sur une pratique qui attire actuellement des millions d'adeptes à travers la France et entraîne plusieurs dizaines de milliers d'accidents chaque année, l'étude énumère les diverses facettes sous lesquelles une politique de santé publique mérite d'être rapidement engagée : nouvelles études épidémiologiques, port de protections adaptées, avec des normes, recommandées ou imposées pour leur fabrication, information et formation des pratiquants. Enfin, il paraît urgent de faire évoluer la réglementation sur les lieux de pratique de la glisse urbaine.
* Hôpitaux d'Annecy, de Besançon, Béthune, Bordeaux, Limoges, Reims et Vannes.
** Le fait que les accidents soient aussi nombreux le lundi s'explique vraisemblablement par un décalage entre la date de survenue de certains accidents dominicaux et le jour de recours aux urgences, le lendemain.
Des patins à roues alignées
C'est en 1990 qu'a été mis au point le « patin à roues alignées », ou in-line-skate, dénommé à l'origine roller blades, ou simplement blades.
Peu à peu, c'est le mot roller qui l'a désigné, un terme qui englobe cependant les patins à roulettes (à roues non alignées, disposées en carré), qui connurent leurs heures de gloire dans la deuxième moitié du XIXe siècle, cédant peu à peu la place, après la Deuxième Guerre mondiale, à la planche à roulettes (skate-board). Celle-ci s'est imposée dans les années 1970, avant d'être supplantée à son tour par le roller.
8,7 % des Français
8,7 % des Français s'adonnent à la pratique du roller, à savoir ont fait du roller pendant l'année précédant l'enquête, selon le Baromètre santé 2000 (enquête BVA auprès de 13 685 Français âgés de 12 à 75 ans). La prévalence est naturellement plus élevée parmi les plus jeunes et en particulier les moins de 15 ans, ainsi que dans les grandes agglomérations. La proportion atteint 43,3 % parmi les 12-14 ans et 0,2 % passé 60 ans.
Le pratiquant de la glisse urbaine est plus souvent une pratiquante (55,1 % sont des femmes). C'est un citadin (9,1 %) et surtout un Francilien (12,3 %). Sur le plan professionnel, il appartient à la catégorie des professions libérales, professeurs et cadres (8,1 %, contre 2,4 % des agriculteurs et 2,4 % des ouvriers).
Parmi les jeunes en âge scolaire, un sur quatre déclare faire du roller. Dans l'enseignement supérieur, les jeunes au niveau bac + 2 sont 17,5 % et même 19,9 % pour les bac + 3.
A la deuxième question posée, sur le point de savoir s'ils portaient un casque la dernière fois qu'ils ont fait du roller, 11,3 % ont répondu oui. Ce sont les plus jeunes qui disent le plus souvent avoir recouru à cette précaution : 16,8 % parmi les 12-14 ans, 7,9 % parmi les 15-19 ans et 7,3 % parmi les 20-24 ans. A titre de comparaison, chez les personnes qui font du vélo, 8 % affirment avoir porté un casque lors de leur dernière sortie.
Enfin, une troisième question était consacrée aux accidents ; 15 adeptes ont déclaré en avoir été victimes une fois au moins au cours des douze derniers mois, soit 1,1 % de l'ensemble des pratiquants.
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