La pose d’un stent réduit significativement le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) à 4 ans en cas de sténose carotidienne asymptomatique de haut grade selon l’étude internationale Crest-2 (Carotid Revascularization and Medical Management for Asymptomatic Carotid Stenosis Trials). En revanche, l’endartériectomie ne montre pas de bénéfice par rapport à un traitement médical « intensif ».
« Les progrès réalisés dans le domaine des traitements médicaux, des stents carotidiens et de l'endartériectomie carotidienne remettent en question la prise en charge privilégiée de la sténose carotidienne asymptomatique », introduisent les auteurs qui publient leurs résultats dans The New England Journal of Medicine. Ces derniers attendent désormais les résultats du suivi à long terme de l’étude Crest avant de se prononcer en faveur d’une conduite à tenir.
Deux essais randomisés parallèles
Crest-2 comprenait deux essais parallèles dans lesquels tous les patients ont reçu un traitement médical dit « intensif » associé ou non à une intervention de revascularisation (stent ou endartériectomie) pour la prise en charge d’une sténose asymptomatique de haut grade (≥ 70 %). Le traitement intensif incluait une prise en charge des facteurs de risques cardiovasculaires avec, en premier lieu, le contrôle de la tension artérielle, l’équilibre lipidique et glycémique et un conseil hygiéno-diététique ; et en second lieu un traitement anti-plaquettaire qui différait selon l’intervention.
Un premier essai a randomisé 1 245 patients pour recevoir le traitement médical avec une pose (n = 616) ou pas de pose (n = 629) d’une endoprothèse carotidienne. Un deuxième a randomisé 1 240 patients pour recevoir le traitement et subir (n = 617) ou non (n = 623), une endartériectomie carotidienne. Les patients provenaient de 155 centres dans cinq pays (Australie, Canada, Espagne, États-Unis et Israël). Le critère de jugement principal était un critère composite incluant la survenue d’un AVC ou d’un décès dans les 44 jours à partir de la randomisation, ou un AVC ischémique dans les 4 ans de suivi.
Confirmation de précédents résultats pour l’endartériectomie
Dans l'essai sur l'endartériectomie, l'incidence à 4 ans des événements était de 3,7 % dans le groupe endartériectomie contre 5,3 % (RR = 1,43) dans le groupe traitement médical intensif, soit un taux annualisé de 0,5 contre 1,3 % (RR = 2,38) après 44 jours, sans différence significative. Trois AVC sont survenus dans le groupe sous traitement médical et neuf dans le groupe sous endartériectomie dans les 44 jours après la randomisation.
« Les conclusions de l'essai Crest-2 sur l'endartériectomie concordent avec les résultats de deux autres essais récents (Space-2 et ECST-2), de moindre envergure, qui ont examiné des questions similaires. Nous pouvons en conclure que l'endartériectomie carotidienne de routine n'a plus sa place chez les personnes présentant une sténose asymptomatique », commentent le Pr Martin Brown et le Dr Léo Bonati dans l’éditorial du NEJM.
Prudence pour les stents
Dans l'essai sur les stents, l'incidence à 4 ans des événements était de 2,8 % dans le groupe stent contre 6 % dans le groupe sous traitement médical seul (RR = 2,13), soit un taux annualisé de 0,4 contre 1,7 % (RR = 4,07) au-delà des 44 jours. Une significativité qui ne tiendrait qu’à 3 ou 4 patients, soulignent les auteurs.
En revanche, du jour 0 au jour 44, sept AVC et un décès sont survenus dans le groupe stent, contre aucun dans le groupe sous traitement médical. « Sur 100 patients traités par stent, seul environ un par an bénéficiera d'une prévention de l'AVC, au prix d'environ un patient victime d'un AVC ou décédé à la suite de l'intervention. Sur une période de 4 ans, 95 patients sur 100 auront subi une intervention inutile », analysent le Pr Martin Brown et le Dr Léo Bonati.
Les deux experts appellent donc à rester prudents : « Les bénéfices observés sur la période de 4 ans de l'essai justifient-ils l'augmentation précoce du risque lié à la pose d'une endoprothèse ? », interrogent-ils. Dans l’essai Space-2 qui a aussi comparé la pose de stent au traitement médical seul, aucune différence significative n’a été relevée entre les deux groupes.
Les auteurs de Crest-2 jugent, quant à eux, que le plan de traitement « intensif » a eu des effets similaires aux deux interventions sur le contrôle des facteurs de risque et avancent que les traitements médicaux auraient pu être intensifiés. Une approche qui pourrait confirmer sa pertinence avec l’arrivée des anti-PCSK9 (certains patients y ont eu accès après 2018) et des nouveaux traitements du diabète et de l’obésité.
« Nous considérons donc qu'il est raisonnable de conseiller aux patients atteints de sténose carotidienne asymptomatique de commencer immédiatement un traitement médical intensif et de retarder la revascularisation jusqu'à l'apparition des symptômes, qui ne surviennent que chez une petite proportion de patients. Des exceptions seraient alors faites pour les patients qui préfèrent prendre le risque de la revascularisation ou qui ne peuvent pas suivre un traitement médical — dans ce cas, la pose d'une endoprothèse serait le choix approprié pour les patients éligibles dans un centre disposant d'intervenants qualifiés et expérimentés », concluent Brown et Bonati.
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