CETTE DÉCOUVERTE explique comment les animaux adaptent leurs rythmes circadiens de manière à faire face à un manque de nourriture et à éviter de mourir de faim.
Et elle donne des indications sur un plan pratique aux humains : en adaptant leurs horaires de repas, ils devraient pouvoir atténuer les effets des décalages horaires des voyageurs.
«Trouver de la nourriture tous les jours est une mission essentielle pour les animaux de petite taille. Quelques jours de privation alimentaire, ce qui est une menace courante dans l'environnement naturel, et l'animal peut mourir», explique l'auteur principal de l'étude, Clifford Saper (Beth Israel Deaconess Medical Center et professeur de neurologie à Harvard).
L'horloge biologique principale est située dans le noyau suprachiasmatique (NSC), qui est un groupe de cellules appartenant à l'hypothalamus. Le NSC reçoit des signaux concernant le cycle jour-nuit à travers le système visuel. L'information est ensuite transmise à un autre groupe de cellules hypothalamiques, le noyau dorso-médian (NDM). Le NDM organise les cycles de veille-sommeil, tout comme les cycles d'activité, l'alimentation et les hormones.
Tant que la nourriture est facilement disponible, ce système fonctionne extrêmement bien. Les signaux lumineux de la rétine synchronisent les rythmes circadiens de l'animal. Mais si la nourriture vient à manquer pendant la période normale d'éveil, l'animal doit être capable d'adapter sa vigilance pour trouver une nourriture présente pendant sa période habituelle de sommeil.
Les auteurs ont découvert qu'il a développé une seconde horloge, une « horloge alimentaire », qui prend le pas sur l'horloge principale et modifie spontanément ses horaires «pour augmenter ses chances de trouver de la nourriture».
Comme le souligne C. Saper, il existe plusieurs oscillateurs biologiques (les « horloges ») dans le corps en plus de celles qui sont situées dans le cerveau. L'estomac, le foie, les tissus périphériques, les adipocytes contribuent au développement des rythmes circadiens associés à la nourriture.
Un seul cycle privation-renutrition est suffisant.
Pour démêler cet écheveau, Patrick Fummer et Clifford Saper ont utilisé une souris génétiquement modifiée, privée de ses rythmes biologiques par inactivation d'un gène clé, BMAL1. À l'aide d'un vecteur viral, ils ont transfecté peu à peu différentes régions cérébrales, une à la fois, ce qui leur a permis d'avancer dans leur découverte.
«Nous avons trouvé qu'un seul cycle de privation de nourriture suivi par une renutrition est suffisant pour mettre en activité l'horloge alimentaire qui prend le contrôle du rythme veille-sommeil pour le modifier.»
La découverte est riche d'implications pour les voyageurs au long cours et les travailleurs postés.
Pour quelqu'un qui va, par exemple, à l'ouest des États-Unis et doit faire face à un décalage horaire de neuf heures, l'adaptation aux horaires locaux peut prendre une semaine. L'horloge naturelle ne s'ajuste que peu à peu chaque jour.
Un jeûne de seize heures.
En adaptant ses horaires de repas, le voyageur peut forcer son horloge alimentaire à s'activer, ce qui devrait lui permettre de s'adapter plus facilement aux nouveaux horaires. «Une période de jeûne de seize heures, sans aucune nourriture, est suffisante pour mettre en action l'horloge alimentaire. Le voyageur d'est en ouest peut simplement éviter de consommer toute nourriture à bord de l'avion, puis prendre un repas dès qu'il arrive, ce qui pourrait atténuer l'inconfort du décalage horaire.»
« Science », 23 mai 2008, vol. 320, pp. 1074-7.
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