LA PLACE croissante des moteurs Diesel, par rapport à leurs homologues à essence, dans la circulation ne pouvait que créer des interrogations. Si les premiers émettent effectivement moins de monoxyde et de dioxyde de carbone que les seconds, ils envoient cent fois plus de particules dans l'atmosphère. Les diesels contribuent à 90 % de la pollution particulaire urbaine.
C'est ainsi qu'est née l'idée de médecins britanniques de tester l'impact de ces microparticules sur les voies aériennes de sujets asthmatiques (légers ou modérés) en situation réelle. Pour y parvenir, des volontaires ont circulé, à pied, pendant deux heures dans Oxford Street. La particularité de cette rue londonienne est d'être interdite aux véhicules, sauf les taxis et les bus, qui tous fonctionnent au gazole. Plusieurs constantes ont été évaluées à cette occasion. Elles ont été prises à nouveau, quelques semaines plus tard après une promenade de deux heures dans la verdure de Hyde Park (assez proche géographiquement).
Comme cela était probable, la balade en zone polluée a altéré les constantes biologiques mesurées. De façon modérée dans les deux situations, mais plus marquée dans Oxford Street.
Deux heures entre bus et taxis.
Plus en détail. La marche de deux heures entre bus et taxis a provoqué une réduction asymptomatique, mais réelle, du VEMS (jusqu'à – 6,1 %) et de la capacité vitale forcée (jusqu'à – 5,4 %). Des chiffres significativement plus élevés que ceux relevés dans Hyde Park (respectivement – 1,9 % et – 1,6 %). Ces effets étaient plus marqués chez les 29 volontaires atteints d'asthme modéré que chez les 31 porteurs d'une forme légère. D'autres marqueurs biologiques de l'inflammation ont été altérés. La myéloperoxydase des expectorations était à 24,5 ng/ml après le séjour dans Oxford Street et à 4,24 pour le parc. Le pH de l'air expiré était abaissé de 1,9 % dans la première et de 0,04 % dans le second.
«Nos observations peuvent servir de démonstration directe et d'explication aux preuves épidémiologiques qui associent le trafic Diesel avec la sévérité de l'asthme et des symptômes que de nombreux patients asthmatiques rapportent après une exposition aux échappements de diesel», écrivent les auteurs. Ils ajoutent que, même si les modifications du VEMS sont faibles et sans cortège symptomatique significatif, elles peuvent tirer davantage à conséquence chez des patients à l'insuffisance respiratoire plus marquée. «Il n'y a pas de quoi dissuader les sujets asthmatiques de visiter les zones urbaines ou d'y travailler .» Ce travail a surtout l'avantage d'avoir été réalisé sur un test grandeur nature, alors qu'à l'ordinaire il s'agit d'épreuves de laboratoire.
« New England Journal of Medicine », 357 ; 23 : 2348-2358 et 2395-2397 (éditorial).
Les particules fines
Les moteurs Diesel, dans leurs fumées noires, rejettent des microparticules faites de poussière, de crasse, de suie et de fumée. Ces émissions particulaires ont diverses tailles, mais les plus néfastes sont celles de moins de 2,5 µ. Parmi elles, les plus fines ou « ultra-fines » semblent le plus à même d'agir sur les voies respiratoires. En raison de leur diamètre extrêmement faible, elles peuvent être inhalées très profondément dans les poumons. Elles sont même susceptibles de passer dans la circulation sanguine, créant ainsi d'autres actions délétères à distance.
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