Depuis le début de l'année 2001, un registre des accidents cardio-vasculaires a été mis en place dans la région de Dijon. Le Dr Yves Cottin (cardiologue au CHU de Dijon) a travaillé en collaboration avec le Pr Jean-Pierre Besancenot (unité climat et santé, faculté de médecine, Dijon) sur l'influence de la pollution atmosphérique sur l'incidence des pathologies cardio-vasculaires.
Pour cela ils ont analysé rétrospectivement les dossiers des patients atteints et ont retenu ceux pour lesquels des données atmosphériques quotidiennes étaient disponibles : présence d'une borne météorologique, enregistrant les conditions atmosphériques et détectant différents polluants, proche du lieu où les premiers symptômes se sont déclenchés. Parmi les polluants atmosphériques, ces chercheurs ont distingué l'ozone, les dioxydes de sulfure et d'azote, les particules de moins de 10 µm. Ces dernières sont liées à la circulation et en particulier aux émanations des véhicules Diesel, aux industries, aux incinérateurs de déchets - « dont le rôle est de plus en plus important », selon le Pr Besancenot - et les chauffages au fuel et au charbon.
La ville de Dijon est peu industrialisée et elle se situe partiellement dans une cuvette. Son niveau de pollution est légèrement inférieur à celui des villes de même taille en France et nettement moindre que celui de Lyon, Paris et Strasbourg.
Plus de 2 000 patients
Au total, entre le début janvier 2001 et la fin décembre 2002, plus de 2 000 patients ont été admis dans les services de cardiologues en raison d'un infarctus du myocarde et 322 d'entre eux ont pu bénéficier d'une évaluation croisée avec les données météorologiques. Parmi ces sujets, 42 % étaient fumeurs.
La première partie du travail a consisté en l'analyse des données cliniques selon le taux de pollution global : l'indice ATMO, qui apprécie la qualité de l'air et dont les résultats sont exprimé par des chiffres allant de 1 (bonne qualité) à 10 (très mauvaise qualité). A Dijon, l'indice ATMO a été inférieur à 4 pendant 628 jours sur les 730 du suivi. Pendant les 50 jours où cet index était supérieur à 6, le taux d'infarctus a été majoré de 51 % en moyenne dans la population générale et les 18 jours où il était supérieur à 7, le taux était majoré de 163 % dans la population générale et de 250 % chez les fumeurs. Ces 18 jours étaient répartis au cours des mois de janvier, de juin et de septembre.
Taux supérieur à 25 ug/m3
« En outre, nous avons subdivisé cette étude en fonction du taux des différents polluants : ozone, particules, dioxyde d'azote et de soufre. Lorsque le taux des particules fines est supérieur à 25 ug/m3 (soit un chiffre relativement bas), le taux d'admission à l'hôpital pour cause d'infarctus du myocarde est majoré de 91 % dans la population générale et ce chiffre est encore plus élevé chez les fumeurs », analyse pour « le Quotidien », le Dr Yves Cottin. En revanche, les variations de taux des autres polluants ne s'est pas accompagnée de majoration du risque de pathologie coronarienne.
« La raison pour laquelle les fumeurs sont plus sensibles à la pollution reste encore inconnue. Si le rôle des particules dans le déclenchement des maladies respiratoires (pneumopathie, bronchite et asthme), la baisse des capacités respiratoires et l'induction de pathologies néoplasiques est connu, son effet sur le cur et les vaisseaux est étudié depuis trois à quatre ans. Une étude menée chez des lapins a montré qu'à niveau de risque strictement égal, les lapins élevés dans une atmosphère polluée par des microparticules présentent un taux de lésions athéromateuses plus important que les témoins et que ces plaques d'athérome se caractérisent par un infiltrat macrophagique particulièrement intense. La mise en présence de ces plaques avec un phénomène pro-inflammatoire tel que l'existence de pic de pollution, pourrait contribuer à déstabiliser les plaques et à induire des accidents cardio-vasculaires », conclut le Pr Besancenot.
Une communication présentée par le Dr Yves Brottin à l'occasion du congrès de l'American Heart Association.
Un observatoire en Côte-d'Or
RICO, l'observatoire des Infarctus de Côte-d'Or travaille avec le soutien de l'Association de cardiologie de Bourgogne et l'URCAM de Bourgogne. Il comptabilise l'ensemble des infarctus du myocarde survenus dans le département grâce à la participation de l'ensemble des cardiologues libéraux et hospitaliers ainsi que des urgentistes de Côte-d'Or.
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