« La France présente une situation originale par rapport aux autres pays d'Europe, puisque le nombre de cas continue à augmenter en liaison avec une croissance du nombre de voyageurs vers les pays d'endémie. » Ce constat est extrait d'une lettre adressée au Pr Lucien Abenhaïm, directeur général de la Santé, par le Pr Martin Danis, directeur du Centre national de référence pour l'épidémiologie du paludisme d'importation et autochtone. Le courrier accompagnait un rapport, que s'est procuré « le Quotidien du Médecin », détaillant la situation de la France vis-à-vis du paludisme.
Dans ce document (direction : Pr M. Danis ; coordination : M. Fabrice Legros), la courbe des infections notifiées en France apparaît clairement. Après une baisse constatée de 1988 (4 860 cas) à 1992 (3 430 cas), suivie d'un plateau jusqu'en 1995, une franche ascension a commencé en 1996. Cette année-là, 5 109 cas ont été relevés, suivis de 5 377 en 1997, 5 940 en 1998, 7 127 en 1999 et 8 056 en 2000. Les données incomplètes pour 2001 laissent augurer d'une légère baisse à 7 223 cas.
Afrique intertropicale, 95 %
La France occupe une place à part en Europe à la fois par le nombre de cas et l'incidence croissante du paludisme. Sur les mêmes périodes, Royaume-Uni, Italie ou Allemagne enregistrent des chiffres stables, voire en régression.
Les sujets atteints sont plutôt jeunes (médiane : 29,5 ans) et de sexe masculin (sex-ratio : 1,78). Les pays de contamination incriminés, très divers, se situent essentiellement en Afrique intertropicale (95 %).
Dans la grande majorité des cas, les accès palustres sont cliniquement simples (90-95 %), mais de 2 à 5 % sont graves. Ils entraînent une létalité de 0,37 à 0,47 % pour les infections à Plasmodium falciparum. Ce parasite est impliqué dans 83 % des cas recensés. En 1999, 11 décès ont été constatés, 12, l'année suivante.
Plusieurs constats se font jour après ces données chiffrées et les nombreuses autres qui émaillent le rapport. Moins de 10 % des 45 % de patients alléguant une prophylaxie ont suivi un schéma thérapeutique correct et 48 % (en 2000) n'ont pas eu recours à la chimioprophylaxie. Dans plus de la moitié des cas (56 %), le médicament était inadapté au pays visité. Les auteurs considèrent, toujours à l'exemple de l'année 2000, que seulement 10 % des patients ont pris correctement le bon médicament. « Il convient de noter que l'usage de prophylaxies correctes est tombé de 35 à 10 %, en particulier depuis l'exigence d'une prescription pour la délivrance des antipaludiques et que l'adéquation au pays visité, déjà habituellement faible, a été divisée par quatre en trois ans... » Des propos, rapportés dans le document remis au directeur de la DGS, à rapprocher de quelques mots du Pr Danis dans son courrier au même Pr Abenhaïm : « J'attire votre attention sur le fait que les médicaments antipaludiques récents, utilisables en prévention comme en traitement curatif, ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale. »
Le document s'achève sur deux commentaires. Tout d'abord, l'un des buts recherchés doit être la réduction de la mortalité, aidée en cela par les recommandations de la Conférence de consensus de 1999. L'autre objectif est d'aboutir à une réduction des risques d'infestation par la mise en uvre des diverses prophylaxies. Cette réduction passe par une meilleure information des voyageurs à la fois de la part des médias, des acteurs du voyage et du corps médical.
Des cas autochtones ou accidentels
Sur la période 1998-2000, 13 cas de paludisme autochtone (sujets n'ayant pas voyagé en pays d'endémie) ou accidentels ont été notifiés. Quatre cas certainement contractés dans une zone aéroportuaire et deux autres possibles.
Les sept autres sont liés à des greffes de rein ou de moelle, des accidents d'exposition au sang ou sont congénitaux.
En 2001, 10 cas accidentels ou autochtones ont été relevés.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature