Les stratégies vaccinales contre la maladie d'Alzheimer visent à détruire le peptide bêta-amyloïde constitutif des plaques et dépôts observés chez les patients. L'efficacité d'une telle approche a été démontrée dans un essai de phase I, utilisant le peptide bêta-amyloïde 42 chez un modèle de souris transgénique : le traitement a entraîné une réduction des plaques cérébrales et l'amélioration du déficit cognitif. Un peptide de synthèse l'AN-1792 mis au point par les Laboratoires Elan devait être testé chez des patients légèrement ou modérément atteints. La survenue de réactions inflammatoires sévères chez certains patients a conduit à l'arrêt de cet essai multicentrique.
Toutefois, des résultats suggèrent que cette voie mérite d'être poursuivie. D'une part, une étude immunologique de 24 patients enrôlés au centre de Zurich montre que l'injection du peptide bêta-amyloïde aboutit bien à une production d'anticorps spécifiques. Ces derniers sont sélectivement dirigés contre les structures pathologiques : plaques et dépôts des vaisseaux et de la substance cérébrale. Ils ne réagissent ni contre le précurseur ni contre les dérivés physiologiques, y compris solubles, de la protéine bêta-amyloïde.
L'immunomodulation
D'autre part, des chercheurs canadiens et allemands ont étudié chez la souris les mécanismes immuns susceptibles d'induire des effets bénéfiques, sans réaction inflammatoire. Ils ont pu mettre en évidence un épitope actif, petite séquence d'acides aminés (A. A. 4-10) du peptide bêta-amyloïde 42 capable d'induire des anticorps spécifiques sans entraîner de réponse inflammatoire. Ce résultat permet d'envisager « des antigènes plus raffinés et de concevoir de nouvelles molécules simulant l'anticorps, ce qui pourrait éliminer les effets néfastes du vaccin original », a précisé au « Quotidien », le Dr Joanne McLaurin, de l'université de Toronto.
D'autres stratégies concernent des molécules susceptibles de prévenir ou de retarder l'apparition des symptômes de la maladie. Un travail coréen et américain, réalisé chez la souris, apporte des arguments en faveur d'un traitement préventif par les chélateurs du zinc. Yoo-Yong Lee et coll. ont démontré que le zinc présent dans les vésicules synaptiques favorise l'agrégation du peptide bêta-amyloïde et la formation des plaques. Des travaux antérieurs avaient déjà suggéré que cet ion métallique présent en quantités élevées dans le cerveau des patients jouait un tel rôle, mais on ignorait l'origine du zinc détecté dans les plaques.
L'effet protecteur des statines a, lui, fait l'objet d'une étude américaine présentée au 54e Congrès de l'Académie américaine de neurologie. Pendant six ans, 2 581 sujets appartenant à plus de 800 familles ont été suivis dans 15 centres. Les 912 patients atteints d'une maladie d'Alzheimer ont été comparé avec 1 669 membres de leur famille indemnes de toute démence. Après ajustement pour différentes variables, l'analyse révèle que la prise de statines entraîne une diminution de 79 % du risque de développer une maladie d'Alzheimer. Cet effet n'est pas retrouvé pour les autres hypoglycémiants.
Toujours américaine, une étude prospective sur 1 357 hommes (73 ans en moyenne) et 1 889 femmes (74,5 ans en moyenne) résidant en Utah a mis pour la première fois en évidence un effet protecteur des estrogènes administrés en traitement substitutif de la ménopause. Environ deux fois plus de femmes que d'hommes ont développé une maladie d'Alzheimer (4,7 % contre 2,6 %). Les femmes qui avaient, au cours de leur vie, reçu un traitement substitutif ont vu leur risque diminuer. Mais l'étude, publiée dans la revue « Jama », ne permet pas de recommander la prescription systématique du THS en prévention primaire. En effet, après plus de dix années d'utilisation, le risque de développer la maladie devient identique dans les deux sexes. La substitution hormonale ne semble efficace qu'à la période latente préclinique de la maladie.
Quant à l'action de l'extrait standardisé de ginkgo biloba (EGb 761), elle fait l'objet de nombreuses évaluations cliniques. Certaines études ont déjà mis en évidence une diminution du risque de démence après prise de vasodilatateurs, notamment de EGb 761. Les résultats de l'étude européenne GuidAge, qui doit inclure 2 800 patients jusqu'en juin 2003, sont attendus.
Des signes d'atrophie à l'IRM
La recherche se porte également sur les moyens du diagnostic et du suivi des lésions. Selon un travail publié dans les « Proceedings of the National Academy », les lésions atrophiques seraient un meilleur marqueur des anomalies fonctionnelles du cerveau que ne le sont les dépôts amyloïdes et les filaments. Visibles à l'IRM, elles sont présentes dès le stade présymptomatique de la maladie et touchent surtout la partie inférieure et latérale du lobe temporal. Le suivi des images de l'IRM volumétrique, réalisée chez vingt-huit patients, a montré, en outre, une évolution de la localisation des lésions d'atrophie qui s'étendent à la région médiane du lobe latéral lorsque la maladie progresse. Cette étude a des implications sur la compréhension du mécanisme physiopathologique de la maladie d'Alzheimer (MA). Plutôt que la perte neuronale, la déconnexion neuronale apparaît comme plus fondamentale dès les stades précoces. L'isolement précoce de l'hippocampe déconnecte en effet tous les circuits neuronaux entrant et sortant, ce qui explique les déficits de l'apprentissage et de la mémoire qui apparaissent plus de vingt ans avant l'apparition des symptômes.
Dr L. A.
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