Des déchets qui s’accumulent dans les rues, des bennes à ordures brûlées par des riverains exaspérés et une odeur pestilentielle qui flotte dans l’air. Comme en janvier dernier mais aussi en 2012 et 2013, la ville éternelle est à nouveau prise dans l’étau infernal d’une nouvelle crise des déchets. À l’origine de ces flambées récurrentes, la quantité énorme de déchets produits chaque jour que l’entreprise municipale de ramassage (AMA), n’arrive pas à gérer en raison du manque de structures de traitements. « Attention, nous risquons une crise sanitaire », a estimé le Dr Antonio Magi
Après la fermeture le 1er octobre 2013 de la plus grande décharge publique à l’échelle européenne qui pouvait accueillir entre 4 500 et 5 000 tonnes de détritus par jour, Rome n’a toujours pas de nouveau dépôt d’ordures ou d’incinérateur. Car le Mouvement 5étoiles [M5S] qui détient les clefs de la ville depuis trois ans, refuse toute nouvelle installation pour répondre aux vœux des résidents installés dans la zone choisie pour la construction de l’installation.
Aussi, la ville externalise le traitement de ses déchets dans d’autres régions comme la Lombardie ou l’Emilie-Romagne ou carrément d’autres pays comme l’Autriche. Une mesure toutefois insuffisante, un total de 650 tonnes de déchets restent chaque jour sur les pavés romains et pourrissent au soleil.
Avec la canicule qui frappe la péninsule, cette énième crise des déchets a pris une tournure inquiétante. Au point que le président de l’Ordre romain des médecins (Omeceo) a saisi la maire de Rome, Virginia Raggi, et les ministères de la Santé et de l’Environnement. « Attention, nous risquons une crise sanitaire, les montagnes d’ordures qui s’accumulent dans les rues de Rome attirent les mouches, les cafards, les rats, les mouettes, les chats et les chiens errants qui se nourrissent de déchets et peuvent être en contact avec les êtres humains, ils peuvent être infectés et leurs déjections peuvent véhiculer des maladies infectieuses », a estimé le Dr Antonio Magi dans sa missive envoyée aux représentants des institutions.
Les risques sont ceux de la salmonelle et de la leptospirose même si les systèmes hydriques sont ponctuellement désinfectés, souligne toutefois l’Ordre des médecins romains.
Les médecins soulèvent également le problème des exhalations de substances toxiques, les habitants exaspérés brûlant des poubelles pour combattre les mauvaises odeurs. « Dans certains quartiers, le nombre de personnes âgées enregistrées dans les Urgences a augmenté de 30 % en raison des substances toxiques qu’ils respirent lorsque les bennes sont brûlées par les résidents en colère. Il faut agir et vite », préconise le Dr Marco Macrì, médecin urgentiste dans un hôpital situé dans la banlieue romaine.
Pour sa part, l’Ordre des pédiatres a conseillé aux parents de surveiller leurs enfants afin d’éviter qu’ils entrent en contact avec des animaux errants où qu’ils s’approchent des bennes. « Pour le moment, aucun cas médical n'a été enregistré, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas être attentif », a indiqué le Dr Giuseppe Mele, président de l’ordre italien des médecins pédiatres (Simpe).
Plusieurs médecins ont demandé au ministère de la Santé et de l’Environnement de lancer des opérations de désinfections dans toute la ville. L’Ordre des médecins a conseillé aux résidents d’endosser des paires de gants pour jeter leurs ordures « car les bactéries prolifèrent tout autour des bennes ». La région du Latium s’apprête, quant à elle, à signer un décret demandant à ce que les déchets de Rome soient détruits dans tous les sites de traitements installés dans la région en raison de la situation d’urgence.