Découverte d'une hyperéosinophilie sanguine

Parmi les nombreuses étiologies, les parasitoses

Publié le 25/05/2008
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Plus de 500/mm3

L'hyperéosinophilie est définie par un nombre d'éosinophiles supérieur à 500/mm3. Ses deux principales étiologies sont l'allergie, parfois professionnelle (benzène, mercure), et les parasitoses, mais les dermatoses bulleuses, les collagénoses, les hémopathies, les métastases, un contexte de gastrectomie, de splénectomie et la prise de certains médicaments (extraits hépatiques, bêta-lactamines, vitamine B12) peuvent aussi être responsables d'une hyperéosinophilie.

Le lieu du séjour

Les parasitoses responsables diffèrent selon le lieu où le voyageur a séjourné. Après un retour d'Afrique intertropicale, il faut évoquer : les nématodes intestinaux, la bilharziose intestinale, la bilharziose urinaire, une trichinellose, la distomatose pulmonaire, une filariose. Après un retour d'un séjour dans le Pacifique, les nématodes intestinaux, la méningite à éosinophiles, le kyste hydatique. Après un retour d'Amérique du sud, les nématodes intestinaux, la bilharziose intestinale, le kyste hydatique et une myiase. Enfin, devant une hyperéosinophilie, après un retour des Antilles, les nématodes intestinaux, la bilharziose intestinale et la filariose lymphatique, bien que cette dernière affection soit rare chez le touriste, doivent être évoqués.

Trématodes

Les trématodes sont responsables de bilharzioses intestinales et/ou urinaires et de distomatoses (grande douve du foie et autres douves). Les bilharzioses sont des affections très fréquentes dans les eaux douces (rivières, marigots) des pays tropicaux. La contamination se fait par voie cutanée lors de bains en eau douce (10 minutes suffisent !). Plusieurs espèces sont en cause : Schistosoma mansoni (Amérique du sud, Afrique Noire, Madagascar) responsable de bilharziose intestinale, S.haematobium (Afrique intertropicale) responsable de bilharziose urinaire, S.intercalatum (Afrique centrale) responsable de bilharziose rectale, S.japonicum (Extrême-Orient) responsable de bilharziose artério-veineuse et S.mekongi (Asie du Sud-Est) responsable de bilharziose artério-veineuse. La phase d'invasion est silencieuse ou marquée par un syndrome infectieux (« fièvre des safaris ») et la phase d'état est marquée par des troubles digestifs, pour les espèces intestinales, et une hématurie indolore, pour S.haematobium. Les localisations sont diverses (poumon, peau, système nerveux) et les complications variables et parfois graves : hypertension portale, sténose urétrale, hydroné-phrose, atteinte des organes génitaux (salpingite, stérilité). Le diagnostic peut être évoqué devant une hyperéosinophilie et confirmé par le sérodiagnostic, l'examen parasitologique des selles et des urines et surtout la biopsie de la muqueuse rectale.

Nématodes et cestodes

Les vers intestinaux peuvent être des nématodes (oxyures, trichocéphales, ascaris, trichines, ankylostomes, anguillules) ou des cestodes (taenia, kyste hydatique, échinococcoses).

Parasitose très commune, la trichocéphalose se contracte par voie orale (eaux souillées) ; elle reste le plus souvent asymptomatique, mais peut être accompagnée de troubles digestifs (douleurs abdominales, diarrhée). Les complications sont rares (prolapsus rectal si invasion massive de l'enfant) et le diagnostic repose sur l'examen parasitologique des selles.

Vers blancs, qui se rencontrent le plus souvent chez les enfants, les oxyures sont responsables d'un prurit anal nocturne. Le diagnostic repose sur le scotch-test anal qui met en évidence les oeufs. Quant au traitement, il repose sur le flubendazole (traiter toute la famille) et sur l'hygiène.

L'anguillulose est une parasitose intestinale strictement tropicale dont la contamination se fait par voie transcutanée (marche pieds nus ou «en claquettes» sur terrain boueux). Lors de l'invasion des larves, elle provoque une éruption par pénétration transcutanée, une allergie, une toux sèche, une inflammation de la muqueuse intestinale avec diarrhée, voire une méningite ; l'invasion des adultes provoque une diarrhée sévère, dans certains cas, une insuffisance respiratoire aiguë. Cette infection peut être asymptomatique durant plusieurs années, être responsable de troubles digestifs non spécifiques ; en cas d'immunosuppression ou de corticothérapie, l'infection peut se généraliser. Le diagnostic repose sur l'examen parasitologique des selles avec technique particulière de recherches d'anguillules.

Les trichinelloses sont contractées lors de la consommation de viande peu cuite (porc ++, ours, cheval) et provoquent des symptômes caractéristiques (fièvre, oedème de la face, diarrhées, myalgies). Le diagnostic repose sur l'hyperéosinophilie, l'élévation des enzymes musculaires, le sérodiagnostic, la biopsie musculaire (si diagnostic tardif au-delà d'un mois après l'infestation), l'examen des selles est inutile. Le traitement repose sur l'albendazole.

Ankylostomiase

Parasitose intestinale tropicale, l'ankylostomiase se propage par voie transcutanée (marche pieds nus ou en «claquettes», dans la boue). Elle est responsable de troubles digestifs (douleurs abdominales, nausées, vomissements...) et, au long cours, d'une dyspnée et d'une pâleur (par anémie ferriprive). Le diagnostic repose sur l'examen parasitologique des selles.

Les taenias sont des vers cosmopolites. La contamination se fait en consommant du boeuf ( Taenia saginata), du porc ( Taenia solium) ou du poisson (bothriocéphales) mal cuits, des crudités (kyste hydatique), des baies sauvages (échinococcose alvéolaire). Les risques sont différents selon les pays : Inde, Madagascar, La Réunion, Amérique du Sud ( Taenia solium), Europe du Nord, lacs suisses et lacs italiens (Bothriocéphales), Maghreb, Amérique du Sud, Australie, Nouvelle-Zélande (kyste hydatique), Europe centrale, Alaska (échinococcose alvéolaire ), tous pays (France ++) ( Taenia saginata).

Filarioses

Les filarioses peuvent être sous-cutanées : onchocercose (prurit, nodules cutanés, risque de cécité), Loa loa (prurit, passage sous-cutané et oculaire), filaire de Médine (ulcération cutanée). Elles peuvent également être lymphatiques : adénite, lymphangite, éléphantiasis.

D'après la communication du Pr Patrice Bourée (unité des maladies tropicales, hôpital de Bicêtre), lors du 3e Printemps de Bicêtre organisé par l'université Paris-Sud-XI et la faculté de médecine Paris-Sud, avec la collaboration de sanofi-aventis.

> Dr BRIGITTE VALLOIS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8377