REFERENCE
Le syndrome d'IMC peut se traduire de plusieurs façons.
Il peut s'agir d'une tétraplégie de type extra-pyramidal, lorsque les noyaux gris centraux ont été touchés par un problème autour de la naissance, entraînant dystonie ou athétose - où tous les mouvements sont parasités -, dysarthrie importante. Le tableau est impressionnant. Cependant, s'il n'existe pas d'autre lésion sur des aires non motrices, les apprentissages se feront quasi normalement. Le handicap social est important et il existe un risque d'erreur dans l'évaluation.
D'autres formes semblent moins catastrophiques avec, au plan moteur, une spasticité des membres inférieurs (maladie de Little) ; en revanche, les lésions étant beaucoup moins focalisées au niveau cérébral, les troubles d'apprentissages peuvent être importants.
Quant à l'hémiplégie cérébrale infantile, le diagnostic est rarement fait à la naissance ; c'est souvent la mère qui le fait dans les premiers mois, mais l'évolution ne sera pas aussi mineure que le laisse croire le tableau clinique initial.
Il existe donc des enfants très discordants sur le plan clinique et le pronostic doit rester très prudent.
Le système perceptivo-moteur est auto-organisé, c'est-à-dire que l'évolution de l'équilibration inconsciente est très peu dépendante de l'environnement ; la structure motrice est préfabriquée. L'enfant ne peut compter que sur des aménagements « sur mesure », c'est-à-dire apprendre à tout contrôler et, en cas de besoin, à utiliser des cannes ou un fauteuil roulant... On estime à 6 ans environ l'âge ultime pour les apprentissages moteurs de déambulation... Il existe une exception qui concerne les formes cérébelleuses : dans les ataxies cérébelleuses, les enfants ont besoin d'un apprentissage avec l'âge - par l'expérience, par le calcul du risque -, pour obtenir une démarche contrôlée volontairement.
Il faut donc bien expliquer aux parents par le dialogue que le problème moteur n'est pas le seul à mettre en avant chez ces enfants au-delà d'un certain âge. Il vaut mieux en effet s'occuper davantage des apprentissages scolaires au lieu de se cantonner dans une rééducation motrice outrancière.
En dehors du trouble moteur et indépendamment de celui-ci, ce qui est fondamental dans les apprentissages ce sont l'anticipation, la représentation mentale, la qualité du langage ; l'action mentale, donc, et non pas l'action au sens manipulation. Ceux qui ont du mal à développer leur représentation mentale ont un risque de difficultés scolaires importantes.
Une des choses les plus difficiles pour un enfant qui a des lésions cérébrales précoces c'est la généralisation de son savoir. L'acquis reste cantonné à un domaine mais est inapplicable à un autre domaine.
(Les dyspraxies ou troubles séquentiels dans la réalisation d'une tâche de coordination).Des signes indirects permettent de suspecter un trouble : demander à un enfant de faire une tour avec des cubes ; c'est assez facile sauf en cas de trouble important de la motricité ; lui faire faire un pont avec trois cubes est beaucoup plus simple sur le plan moteur mais impossible si la représentation mentale est incorrecte. Cette épreuve fait la différence entre ce qui est motricité et utilisation de la motricité.
Les troubles moteurs peuvent s'accompagner de troubles cognitifs indépendants de ceux-ci, avec de larges discordances entre le facteur verbal et de « performance » à fort contenu visuel.
La dyspraxie, c'est-à-dire la difficulté à exécuter un ordre séquentiel qui permet d'aboutir à un geste finalisé (par exemple l'enfant qui ne tend pas le bras pour le mettre dans la manche du manteau ou qui n'arrive pas à porter la fourchette à la bouche), est l'impossibilité de conformer le mouvement au but proposé. Ces enfants ont une vie symbolique riche (ce qui permet d'éliminer tout trouble psychique grave), mais une mauvaise représentation à base d'éléments neuro-visuels : leurs dessins sont très pauvres, d'une réalisation très mauvaise, mais ils ont de l'imagination pour les commenter.
En dehors de troubles marqués de l'acuité visuelle, les troubles oculomoteurs fréquents jouent un rôle dans la perception des informations visuelles, l'agnosie visuelle étant le témoin d'un trouble du décodage des images.
C'est pourquoi, pour évaluer un enfant par des tests psychométriques, il ne faut pas se baser sur le résultat du quotient intellectuel (QI) global. Il est très important de comparer les résultats des épreuves verbales et des épreuves de performances, et de connaître le comportement de l'enfant pendant les tests.
Dans le cas des dyspraxies visuo-spatiales par exemple, les épreuves verbales sont réussies alors que les épreuves de performances sont mauvaises : l'enfant ne peut pas recréer de modèle sauf si l'on fait intervenir du verbal dans la réalisation. Ces enfants sont très aidés par le langage et ont besoin qu'on leur apprenne à s'organiser. Contrairement aux enfants peu doués, ils ne sont pas aidés par le figuratif. Cela pose un problème important de pédagogie scolaire : est-ce l'enfant qui doit s'adapter à l'école ou inversement ?
Les autres troubles cognitifs
Pour les enfants hémiplégiques, par exemple, les difficultés scolaires sont liées à plusieurs facteurs : hémianopsie latérale homonyme souvent négligée, manifestations d'une épilepsie lésionnelle, troubles du langage écrit (dyslexie, dysorthographie). Les risques d'aphasie, selon le côté cérébral atteint, sont nettement moindres qu'en cas de pathologie acquise. Statistiquement, ces enfants ont une évolution scolaire moins bonne que les tétraplégiques dystoniques.
D'autres éléments, comme les troubles importants de l'attention (rôle du cervelet) et de la motivation, lorsqu'ils existent, peuvent entraver les apprentissages. Il en est de même pour les troubles de la fonction dite exécutive, c'est-à-dire de la fonction de cadrage, troubles dans lesquels l'enfant ne sait pas quoi faire de toutes les informations qu'on lui donne.
Les décisions d'orientations de ces enfants dépendent de plusieurs facteurs. Il est essentiel d'écouter et de comprendre la demande des parents.
Il faut aussi voir les rééducateurs qui s'occupent de ces enfants et savoir comment ils évaluent les chances de récupération dans la partie la plus handicapante du syndrome. Ces données doivent permettre de trouver la structure la plus adaptée à l'enfant, c'est-à-dire celle qui lui offrira d'optimiser toutes ses possibilités et, par là-même, sa socialisation. Un travail de collaboration avec les pédagogues est nécessaire pour les soutenir face à des enfants IMC déconcertants.
L'idéal serait, bien sûr, la multiplication des structures ayant une pédagogie adaptée aux troubles spécifiques des apprentissages.
D'après une conférence du Dr D. Truscelli, ex-praticien hospitalier, responsable du service de rééducation neurologique, département de pédiatrie, CHU de Bicêtre (94), dans le cadre des formations organisées par le service de santé scolaire de la DASES de Paris.
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